Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Monaco (suite)

Étroitement associé à la France au temps de Louis Ier (1662-1701), Monaco accepte l’avènement d’une dynastie française : celle des Grimaldi-Matignon, née du mariage en 1715 de Louise Hippolyte, fille aînée d’Antoine Ier (1667-1731), avec Jacques de Goyon-Matignon (1689-1751), qui prend alors les armes et le nom de la famille de son épouse (Jacques Ier [de 1731 à 1733]).

Le prince Honoré III (de 1733 à 1795) est contraint d’accorder quelques réformes politiques à ses sujets en 1789, et il ne peut empêcher la Convention d’annexer sa principauté le 3 janvier 1793 sous le nom de Port-Hercule. Restaurés en 1814, les Grimaldi-Matignon (Honoré IV [de 1814 à 1819]) sont placés en 1815, par le congrès de Vienne, sous le protectorat du royaume sarde, dont les droits sont précisés par le traité de Stupinigi du 8 novembre 1817. Le despotisme et l’absentéisme d’Honoré V (de 1819 à 1841), qui réside presque continuellement à Paris, puis la lourdeur des charges fiscales imposées par son frère Florestan Ier (de 1841 à 1856) favorisent l’explosion révolutionnaire de 1848. Amputé de Menton et de Roquebrune, qui proclament alors leur indépendance avant d’être rachetés pour 4 millions de francs le 2 février 1861 par Napoléon III à Charles III (de 1856 à 1889), associé à la France au sein d’une union douanière en 1865, Monaco demande au tourisme de nouvelles ressources. Ouvrant un casino, créant une station de villégiature, fondant enfin en 1861 la Société des bains de mer, Monaco peut supprimer les impôts dès février 1869.

Dotée en 1911 d’une Constitution (libéralisée en 1917 et en 1930) par le savant océanographe Albert Ier de Monaco (de 1889 à 1922), qui fonde à Paris l’Institut d’océanographie en 1911 et l’Institut de paléontologie humaine en 1920, et à Monaco un Musée océanographique en 1910, la ville accueille en 1934 une conférence internationale pour l’humanisation des conflits, réunie à l’initiative du prince Louis II (de 1922 à 1949). Officier français de la Première Guerre mondiale, promu général de division en 1929, fondateur en 1948 de la Croix-Rouge monégasque, ce prince accroît le prestige de Monaco (Opéra de Monte-Carlo, grand prix de l’automobile-club de Monaco, créé en 1928). Pour éviter que la France ne soit déclarée héritière de la principauté en vertu des accords de 1918, il a reconnu sa fille naturelle Charlotte et accordé par ordonnance souveraine dès mars 1920 le nom de Grimaldi à son époux, le prince Pierre de Polignac († en 1964), souche de la troisième dynastie des Grimaldi, dont le réel fondateur est le fils du couple : Rainier III (né en 1923), qui a de son union en 1956 avec l’actrice américaine Grace Kelly trois enfants (Caroline, Albert et Stéphanie).

Au terme d’une grave crise provoquée par le renvoi en 1962 du ministre d’État français Émile Pelletier, désireux d’aligner le système fiscal monégasque sur celui de son voisin (1962-63), Monaco accepte le 18 mai 1963 que les citoyens français résidant depuis moins de cinq ans à Monaco soient assujettis aux mêmes impôts qu’en France. Par contre, le gouvernement de la principauté réussit à reprendre le contrôle de la Société des bains de mer, puis celui de son propre essor économique en rachetant en mars 1967 à l’actionnaire majoritaire de cette firme les parts qu’il avait acquises : Aristote Onassis.

P. T.

➙ Gênes.

Les Grimaldi

Noble famille génoise dont le nom apparaît pour la première fois dans un document de 1158, les Grimaldi ont joué un rôle de premier plan dans l’histoire du grand port ligure. De prénom inconnu, l’un d’eux fut le dernier ambassadeur de Gênes auprès de l’empereur Manuel Comnène en 1174. Soutenant presque dès l’origine la cause des guelfes, les Grimaldi s’associent aux Fiesque (ou Fieschi) en 1262 pour disputer aux Doria et aux Spinola la majorité au sein du Conseil des huit. Aussi, le 21 juillet 1262, Bovarello Grimaldi s’allie-t-il à Charles d’Anjou avant que l’un de ses parents, Luca, ne devienne l’un des signataires du pacte du 12 août 1269, par lequel Gênes accepte en fait le protectorat du nouveau roi de Naples. Les Grimaldi, qui sont victimes de la révolution gibeline de 1270, se mettent alors au service de Charles d’Anjou ; celui-ci confie à Gabriele, fils de Luca, le commandement des galères armées contre Gênes. Défenseurs jusque-là de l’indépendance nationale en Italie et au-dehors, comme le souligne l’action navale menée par l’amiral génois Lucchetto Grimaldi contre les positions vénitiennes à Acre, puis à Korykos (ou Gorighos) en Arménie, à l’embouchure de l’actuel Tarsus Çayı, en 1267, les Grimaldi semblent abandonner paradoxalement cette mission à leurs adversaires gibelins. La famille est richement possessionnée dans la Riviera di Ponente, où elle détient des fiefs importants autour de Mioglio (au nord de Savone) et surtout autour de Monaco, dont l’un de ses membres, Grimaud, a été gouverneur pour Gênes dès 1219 ; elle accroît sa puissance dans cette région lorsque Franceschino s’empare de la seigneurie de cette ville en 1297 et en fait une importante base navale.

De retour à Gênes, grâce à un coup d’État en décembre 1317, Gaspare Grimaldi, associé à Carlo Fieschi, accepte la seigneurie du roi Robert de Naples de 1318 à 1335. Exclus définitivement avec tous les autres nobles de la direction de la république par les marchands Adorno et Fregoso au profit d’un doge perpétuel, en 1339, les Grimaldi conservent pourtant le droit de siéger au Conseil des Anciens, où ils détiennent au xve s. 22 sièges contre 26 aux Fieschi. Ils se consacrent dès lors en partie à la défense des intérêts de leur ville en Orient, où l’un d’eux, Carlo, a tenté dès 1324, mais en vain, de reprendre le contrôle de Pera et des colonies génoises de la mer Noire restées gibelines. Par contre, en 1387, Gentile de’ Grimaldi participe à une mission diplomatique qui arrache d’importantes concessions commerciales au tsar bulgare Ivanko, qui obtient du sultan ottoman Murat Ier (1359-1389) l’abaissement des droits frappant les exportations de grains de son pays (traité de Pera du 8 juin) et qui fait confirmer le 12 août par le khān du Qiptchaq, Tugtamich († 1406), les traités de 1381 et de 1383, qui laissent aux Génois le contrôle de leurs comptoirs de la mer Noire, et notamment celui de Kaffa (auj. Feodossiia), dont le consul Benedetto Grimaldi acheva de fortifier les faubourgs en 1386. À partir de Monaco, dont ils reprennent définitivement le contrôle en 1419, les Grimaldi participent à la lutte sur mer contre Venise, notamment entre 1431 et 1435, quand le seigneur de Monaco — Vintimille Giovanni Ier Grimaldi († 1454) — s’est mis au service de Milan.