Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Monaco (suite)

Les Grimaldi, qui comptent 110 personnes vivantes de ce nom dès 1333, constituent au xve s. l’un des plus importants des 40 alberghi génois, c’est-à-dire des maisons nobles « qui, issues de plusieurs familles, portent cependant le même nom » (Jacques Heers). La composition de cet albergo, qui comprend d’anciens esclaves affranchis ayant pris le nom de leurs maîtres, est évidemment très hétérogène, puisque, en 1458, 36 chefs de famille de ce nom (41 en 1465) paient une avaria variant entre 1 et 500 lires. Groupés en ville autour de leurs tours faciles à défendre, possédant en commun l’église urbaine de San Luca, les Grimaldi implantent leurs villas de banlieue à Sampierdarena et subsidiairement à Ripparolio ; surtout, ils multiplient leurs fiefs dans la Riviera di Ponente, où leurs principaux chefs sont seigneurs non seulement de Monaco, mais aussi de Menton, Cagnes, Roquebrune, Antibes, Beuil, Vintimille, etc. Bien tenu en main par ses gouverneurs élus par tous ses membres, l’albergo des Grimaldi s’agrège en 1448 par contrat notarié celui des Ceba, dont 7 membres renoncent à leur nom et à leurs armes pour prendre celui qui est porté par 60 Grimaldi.

En fait, à partir du xvie s., les destinées de cet albergo se confondent avec celles des trois maisons qui règnent successivement sur la principauté de Monaco.

P. T.

 SOURCES. G. Saige, Documents historiques relatifs à la principauté de Monaco depuis le xve siècle (A. Picard, 1888-1891 ; 3 vol.) ; Documents historiques antérieurs au xve siècle, relatifs à la seigneurie de Monaco et à la maison de Grimaldi (A. Picard, 1905) ; Glanes d’archives. Les Grimaldi chez eux et en voyage (A. et J. Picard, 1906).
L. H. Labande, Histoire de la principauté de Monaco (Picard, 1934). / L. Aureglia, Contribution à l’histoire constitutionnelle de Monaco (Impr. réunies, Chambéry, 1960). / F. de Bernardy, Histoire des princes de Monaco de Rainier Ier à Rainier III (Plon, 1960). / J. Heers, Gênes au xve siècle (S. E. V. P. E. N., 1961 ; éd. abrégée, Flammarion, 1971). / J. B. Robert, Histoire de Monaco (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1973).

monarchie d’Ancien Régime

Régime politique, économique et social de la France antérieur à la proclamation de l’Assemblée nationale le 17 juin 1789 et à l’abolition des privilèges dans la nuit du 4 août. L’Ancien Régime paraît constitué pour l’essentiel dès le règne de François Ier (1515-1547).


L’origine de l’appellation « Ancien Régime »

Qualifié de régime précédent, de régime ancien par les décrets de la Constituante, le système politique et social antérieur à 1789 semble avoir été dénommé ainsi pour la première fois par Mirabeau dans une lettre au roi de 1790 citée par Alexis de Tocqueville* : « Comparez le nouvel état de choses avec l’Ancien Régime [...] » Pourtant, l’expression apparaît, selon M. Daviet, dès 1788 dans une brochure beaujolaise d’origine nobiliaire et, selon François Furet, dans quelques cahiers de curé, pour désigner le régime monarchique traditionnel par opposition à celui que doivent instituer les États généraux. Mais c’est seulement avec la publication en 1856 de l’œuvre d’Alexis de Tocqueville l’Ancien Régime et la Révolution que cette appellation reçut ses lettres de noblesse.


Caractères de l’Ancien Régime

Comme le souligne Hubert Méthivier, l’Ancien Régime est avant tout une société et en second lieu seulement un régime politique.

Cette société est d’abord coutumière. Elle respecte, au même titre que des lois écrites, les coutumes d’origine médiévale qui règlent, dans les pays de droit non écrit, les rapports de droit privé entre les individus et les communautés, alors que, dans les contrées du Midi, ceux-ci sont définis par le Code Justinien selon les règles du droit romain.

Mais cette société est aussi corporative et hiérarchisée puisqu’elle ne reconnaît aux sujets du roi d’autre importance que celle qui leur est accordée au sein du groupement social dont ils font partie. Isolé, l’individu n’est rien. Mais membre d’une collectivité (communauté, pays, État, corporation, etc.), il peut assurer en son sein et par son seul effort sa promotion sociale « dans la hiérarchie juridique, matérielle ou morale de [...] » cette dernière, qui est essentiellement un corps privilégié doté de « libertés », de « franchises ».

Très précise de ce fait, cette hiérarchie dépend non seulement de l’échelle des revenus de ses membres, mais encore plus de la naissance et de la fonction de chacun d’eux en raison du degré de prestige accordé à ces deux critères de qualité par l’ensemble du corps social. Et si dans ces conditions le riche méprise le pauvre, par contre le gentilhomme, quoique pauvre, méprise le roturier, bien que riche, tandis que le moindre détenteur d’une parcelle quelconque de l’autorité publique dédaigne le plus fortuné de ses assujettis.

Enfin, paradoxalement, cette société du mépris est aussi une société catholique, nonobstant la révolte antiromaine des réformés du xvie s., le libertinage intellectuel des penseurs du xviie s. ou l’incrédulité des philosophes au xviiie s. Religion de l’« État et couronne de France », excluant par là même ceux qui ne la pratiquent pas (hérétiques, juifs), la religion catholique est celle de tous les fidèles sujets du roi ; elle rythme leur vie de la naissance à la mort. Aussi l’Église, qui en dispense le culte, est-elle investie d’une triple fonction d’administration (tenue des registres de l’état civil), d’enseignement (écoles et collèges) et d’assistance (hôpitaux et hospices), dévolue aujourd’hui à l’État.

Société d’un type particulier, l’Ancien Régime est aussi un régime politique : celui de la monarchie de droit divin, qui tend par là même à devenir absolue, car elle se situe naturellement au-dessus des institutions coutumières et des communautés diverses et agit à leurs dépens. Ainsi, le roi fait rédiger les premières et limite les libertés des secondes en renforçant le « corps d’officiers » chargés de faire triompher la raison d’État. Commencée au temps de François Ier, sous le règne de qui de nombreuses coutumes juridiques sont codifiées et l’usage de la langue française est rendu obligatoire dans les jugements et les actes notariés par l’ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539, cette évolution du régime monarchique vers l’absolutisme se poursuit au xviie s.