Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Mexique (suite)

Les couvents des Franciscains étaient les plus simples : citons ceux de Calpan (1548) et de Huejotzingo (1550-1570). Parmi les couvents dominicains, on peut prendre comme exemple ceux de Coyoacán (auj. faubourg de Mexico) et de Tepoztlán, dans la montagne au nord de Cuernavaca (1560-1570) ; les églises de ces couvents ont déjà un transept, mais elles restent très sobres. Les couvents les plus luxueux étaient ceux des Augustins, qui, n’ayant pas fait vœu de pauvreté, se permettaient des décors de fresques et de peintures en grisaille. Parmi les plus intéressants de ces couvents, citons ceux d’Actopan (v. 1548), surtout connu pour la qualité de ses peintures murales, d’Acolman, au portail plateresque accolé à une grande façade nue (1560), et de Yuriria (1548-1566).

Le seul peintre important du xvie s. est le Flamand Simón Pereyns (v. 1530 - v. 1600), qui a exécuté certaines parties du grand retable de Huejotzingo (1586), le saint Christophe (1585) et la Vierge de l’autel du Pardon (1587) de la cathédrale de Mexico. Quant aux images sculptées, elles venaient en général directement d’Espagne, telle la Vierge de Xochimilco ou celle qui est vénérée à Pátzcuaro. En ce qui concerne les reliefs architecturaux, on perçoit un curieux mélange de formes du Moyen Âge et de la Renaissance, avec parfois un parfum local introduit par les tailleurs de pierre indigènes.


Le xviie siècle

À cette époque, l’expression artistique doit être recherchée surtout dans les grandes villes et non plus dans les campagnes. On assiste ainsi à la construction de près de 15 000 églises et d’une trentaine de cathédrales, qui couvrent encore le pays. Mexico* mise à part, Puebla est le centre le plus important. Sa cathédrale fut entreprise par l’Espagnol Francisco de Becerra (1545-1601), passé ensuite au Pérou ; mais l’essentiel de sa réalisation se situe vers 1640-1649, sous l’impulsion de l’évêque Juan de Palafox. Inspirée de la cathédrale de Mexico, plus petite, mais aussi plus cohérente, cette cathédrale est un magnifique bâtiment classique en pierre et en marbre, avec deux hautes tours, coupole et bas-côtés très élevés et bien éclairés. Toujours à Puebla apparaît dès le xviie s. une architecture qui est le résultat de la rareté de la pierre : les murs des bâtiments importants sont recouverts de plaques de céramique rouge ou d’azulejos (carreaux polychromes en faïence) ; à l’intérieur et à l’extérieur prolifère un décor baroque en plâtre blanc ciselé.

Partout au Mexique, le xviie s. est caractérisé par l’apparition de nombreux couvents féminins à grand programme. Chez eux, l’église est toujours parallèle à la rue, sur laquelle elle ouvre par deux portails jumeaux. À l’intérieur et en face du maître-autel se trouve le chœur des nonnes, à un ou à deux étages, séparé de la nef par de lourdes grilles.

La sculpture est encore imprégnée d’un classicisme calme (relief du couvent de San Agustín, aujourd’hui Bibliothèque nationale de Mexico) ; les Mexicains appellent cette phase, d’un goût assez lourd, le baroque sévère. La peinture a des caractères voisins. Baltasar de Echave Orio (v. 1548 - v. 1620) est un artiste de qualité, très italianisant encore, connu notamment pour son Martyre de saint Pothin. Plus espagnol est le style de Sebastián López de Arteaga (1610 - v. 1675), notaire du Saint-Office, qui peignit de belles œuvres ténébristes telles que le Christ en croix et l’Incrédulité de saint Thomas (palais des Beaux-Arts, Mexico).


Le xviiie siècle

C’est la grande époque de l’art colonial. Si presque toutes les cathédrales ont été élevées au siècle précédent, c’est le xviiie s. qui les enrichit de portails à l’extérieur, de retables et d’un mobilier baroque très ouvragé à l’intérieur. Les diverses églises de Tlaxcala, d’Ocotlán, d’Oaxaca, de Morelia, de Guadalajara, de Querétaro, de Guanajuato (surtout la Valenciana, 1765-1788) et enfin, la plus réussie de toutes, l’église Santa Prisca (1751-1758) de Taxco sont là pour témoigner de cette passion du décor et du luxe. On remarquera la liaison existant le plus souvent entre le mécénat et l’activité minière de villes comme San Luis Potosi, Zacatecas, Guanajuato et Taxco.

Il est assez normal que la peinture, la sculpture, l’orfèvrerie se mettent presque entièrement au service d’une architecture ainsi caractérisée par la surcharge. C’est dans les retables et les portails de Tepotzotlán, de Salamanca, de Taxco, de Querétaro que l’on doit chercher les pièces maîtresses de cet art. Puebla, quant à elle, conserve sa tradition et la prolonge en quelque sorte dans la campagne environnante, sous forme d’un baroque populaire qui nous charme dans quelques églises comme San Francisco Acatepec et Santa María Tonantzintla, littéralement recouvertes d’un décor fourmillant et ingénu fort réussi. La peinture se fait tourmentée et un peu plus superficielle que précédemment. Son meilleur représentant est peut-être Miguel Cabrera (1695-1768), originaire d’Oaxaca, auteur du portrait fin et spirituel de la grande poétesse sœur Juana Inés de la Cruz.


Le xixe siècle

Il n’est pas surprenant que le néo-classicisme, contemporain de l’indépendance, fasse figure de style « national » aux yeux des Mexicains. Son apogée correspond à un grand moment de la construction civile, notamment avec l’architecte et sculpteur Manuel Tolsá (1757-1816). Architecte, peintre et sculpteur, le Mexicain Francisco Eduardo Tresguerras (1759-1833) était originaire de la ville de Celaya, et c’est encore là qu’on peut voir le principal de son travail, à commencer par la magnifique église du Carmen (1802-1807).

Par la suite et jusqu’au début du xxe s., les arts ont connu au Mexique les mêmes tendances assez conventionnelles et éclectiques que dans le reste du monde occidental. La peinture, toutefois, présente plus d’intérêt que l’architecture. Un bon peintre espagnol, Pelegrín Clavé (1810-1880), pratiqua son art avec succès et forma des élèves. Mais ceux-ci voulurent prendre des sujets de l’histoire nationale tout en idéalisant les types autochtones. Erreur évitée par un autre artiste, Juan Cordero (1824-1884), qui essaya d’aborder dans sa peinture la réalité mexicaine telle qu’elle se présentait à ses yeux. À la charnière entre le xixe et le xxe s., les deux personnalités majeures sont José María Velasco (1840-1912) et José Guadalupe Posada (1852-1913). Le premier a presque fixé d’une manière idéale le « portrait » de la vallée de Mexico, telle qu’elle devait apparaître avec ses deux volcans et son ciel limpide. Posada est le contraire d’un artiste savant. Dans ses gravures sur bois, il arrive à préserver un contexte populaire et mélodramatique qui, de nos jours encore, plaît aussi bien au peuple qu’au public cultivé.