Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Melbourne (suite)

Bien que Melbourne ait connu un développement important de ses industries, elle reste avant tout une grande métropole où les services occupent la majeure partie de la population active. Melbourne est le premier centre bancaire de l’Australie avec en particulier les sièges centraux de l’Australia and New Zealand Bank et de la National Bank of Australia. C’est également une grande ville universitaire : aux 14 000 étudiants de l’université de Melbourne, créée en 1853, à Parkville, s’ajoutent la Monash University, créée en 1958 à Clayton (8 400 étudiants en 1968), et la Latrobe University, qui a commencé à fonctionner en 1967.

Le centre des affaires correspond à la ville primitive, c’est-à-dire au quadrillage des rues tracées par Batman. Les immeubles de tous styles et de toutes tailles construits au début du siècle sont progressivement remplacés par des gratte-ciel ultra-modernes tels que celui du National Mutual Center ou le bloc de verre et de métal de l’Imperial Chemical Industries. L’artère essentielle reste Collins Street, mais Bourke Street, où se trouvent en particulier les grands magasins Myers, et Flinders Street, séparée du port par la gare, ne sont pas moins animées. Dans ces grandes artères, dans les « lanes » intermédiaires, comme dans les rues qui leur sont perpendiculaires (Queen Street, Elizabeth Street, Swanston Street), la circulation est devenue très difficile : il y a en Victoria un véhicule pour trois habitants. De grands travaux ont été entrepris pour aménager de vastes parkings autour du centre urbain, véritable « city » où bien peu de gens habitent encore.

Comme dans toutes les villes australiennes, les quartiers de résidence sont extrêmement étendus : la plupart des gens restent fidèles à la maison individuelle, et c’est seulement depuis une dizaine d’années que les appartements se multiplient. Les habitations se sont répandues en tache d’huile vers le sud au-delà d’un grand parc (King’s Domain), le long de la côte de Port Phillip (Saint Kilda, Brighton) et de la voie ferrée et de la route du Gippsland (Dandenong). Vers le nord-est, l’expansion a été également considérable, mais, vers le nord-ouest et l’ouest, la ville est beaucoup moins étalée : marais, installations portuaires et industrielles, aérodromes ont gêné le développement urbain. La construction d’un haut pont près de l’embouchure de la Yarra va certainement favoriser la progression de la ville vers le sud-ouest, en direction de Geelong, au-delà des champs d’épandage de Werribee.

Il existe près de Melbourne une véritable « banlieue agricole » tournée vers l’approvisionnement de la ville : à l’ouest, les cultures maraîchères progressent aux dépens de l’élevage des moutons et des cultures céréalières ; à l’est, les fermiers se consacrent surtout à l’élevage laitier et aux cultures fruitières. Mais, à son tour, cette agriculture spécialisée est peu à peu refoulée par l’expansion d’une ville qui couvre déjà plus de 800 km2. Les experts prévoient à Melbourne 5 millions d’habitants à la fin du siècle, et l’immense agglomération couvrira alors probablement près de 2 000 km2.

A. H. de L.

➙ Australie / Victoria.

Méliès (Georges)

Illusionniste et metteur en scène de cinéma français (Paris 1861 - id. 1938).


C’est au cours d’un voyage à Londres, où l’occasion lui est offerte de rencontrer le prestidigitateur David Devant dit Maskeline, que le jeune Méliès se prend de passion pour tous les arts de l’illusion. De retour à Paris, il est un spectateur assidu du théâtre Robert-Houdin, dont il deviendra propriétaire et dont il restera l’animateur jusqu’en 1923 (date de sa démolition). Il est également caricaturiste dans le journal antiboulangiste la Griffe, sous l’anagramme de Geo Smile. En 1895, il fait partie des invités de la toute première projection publique du cinématographe dans les sous-sols du Grand Café. Son enthousiasme le conduit à supplier les frères Lumière* de lui vendre un de leurs appareils. Devant le refus des inventeurs, il ne se décourage pas, achète à l’Anglais R. W. Paul un projecteur (bioscope), fait construire par l’ingénieur Korsten une caméra rudimentaire et se procure un stock de pellicule Eastman. Il décide alors de tourner lui-même quelques petites bandes, se prend au jeu, fonde une société avec un associé (Reulos) et bâtit dans les jardins de sa propriété à Montreuil-sous-Bois un modeste atelier de poses qui sera ainsi l’un des premiers studios de cinéma. Si son premier essai (Une partie de cartes, 1896) suit la voie tracée par les opérateurs Lumière (scènes prises sur le vif), il s’éloigne très vite de ce réalisme documentaire pour aborder le domaine du merveilleux et du fantasmagorique. Il fait alors bénéficier le septième art de toutes les techniques de l’illusion qu’il connaît déjà et invente une multitude de trucages nouveaux (fondu enchaîné, arrêt au tour de manivelle, tournage « à rebours », accélération, etc.), s’éloignant ainsi de l’animation photographique pure pour aborder la mise en scène filmique, toute dépendante soit-elle encore des lois traditionnelles du spectacle théâtral. Tout en produisant d’innombrables petites bandes documentaires, des saynètes comiques, des « actualités reconstituées » (notamment en 1899 l’Affaire Dreyfus en onze tableaux et en 1902 le Couronnement du roi Édouard VII), Georges Méliès s’intéresse essentiellement au domaine du rêve et de l’aventure, qu’il illustre avec une foi naïve et imaginative. Des contes de fée (Cendrillon, 1899) à la science-fiction (le Voyage dans la Lune, 1902), le passage est rapide : Méliès devient alors l’ordonnateur d’un univers où le trucage est roi. Parmi ses films les plus célèbres, il faut citer le Royaume des fées (1903), le Voyage à travers l’impossible (1904), les Quatre Cents Farces du Diable (1906), 20 000 Lieues sous les mers (1907), le Tunnel sous la Manche (1907), les Hallucinations du baron de Münchhausen (1911), À la conquête du pôle (1912). Après une période créatrice intense, il commet peut-être l’erreur de poursuivre ses efforts en solitaire et en artisan, alors que partout dans le monde le cinéma devient une industrie et que surgissent les concurrents et les plagiaires. À partir de 1912, les malheurs vont s’abattre sur lui : désastre de sa filiale américaine qu’il avait ouverte à New York en 1903 et de la société American Wild West, dirigée par son frère Gaston (1852-1915), versatilité des goûts du public, qui commence à bouder les « films à trucs », intransigeance de Charles Pathé, devenu son distributeur exclusif depuis 1910. Méliès interrompt sa production en 1913 et va désormais végéter dans un oubli profond jusqu’en 1928, date où un journaliste le retrouve tenant un magasin de jouets et de sucreries à la gare Montparnasse. En son honneur, on organise un gala à la salle Pleyel (en 1929), qui permet de rendre hommage à son talent (hélas, de nombreux films avaient déjà disparu, perdus ou détruits par Méliès lui-même dans un moment de découragement). Peu après, il entre à la maison de retraite du Cinéma à Orly, où il demeure jusqu’à sa mort.

J.-L. P.

 M. Bessy et J. Lo Duca, Georges Méliès (Prisma, 1943 ; nouv. éd., Méliès mage, Pauvert, 1961). / C. Ford, Georges Méliès (Bruxelles, 1959). / G. Sadoul, Georges Méliès (Seghers, 1962 ; 3e éd., 1970). / M. Malthête-Méliès, Méliès l’enchanteur (Hachette, 1973).