Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

maronite (Église) (suite)

Les institutions


Organisation ecclésiastique

L’Église maronite est dirigée par un patriarche élu par le synode des évêques. Jusqu’en 1736, ceux-ci gouvernaient collégialement l’ensemble de la communauté. Depuis lors, la plupart d’entre eux sont, comme dans les autres Églises traditionnelles, à la tête de diocèses, actuellement au nombre de onze ; depuis 1966, un exarchat maronite a été en outre créé aux États-Unis. Le clergé compte une proportion non négligeable de prêtres mariés, notamment dans les villages de la montagne. Il est néanmoins recruté de plus en plus parmi les séminaristes qui s’engagent à demeurer dans le célibat.


Le monachisme

Seule de toutes les Églises chrétiennes, l’Église maronite doit son origine à l’influence prédominante des moines. Néanmoins, ce monachisme a gardé jusqu’à la fin du xviie s. une structure très fruste. C’est sous l’influence directe des ordres religieux latins, et notamment des Jésuites, que se constituèrent dans les dernières années du xviie s. deux congrégations monastiques observant la règle dite « de Saint-Antoine » (compilation éditée en 1646) : la congrégation libanaise (approuvée en 1700, réformée en 1732) et la congrégation de Saint-Isaïe (1703). La première se divisa en 1757 pour donner naissance à la congrégation des Antonins alépins, approuvée en 1770. Depuis 1951, l’ordre libanais maronite a créé l’université du Saint-Esprit à Kaslik, près de Djouniyé, pour promouvoir l’étude des traditions théologiques et liturgiques syriaques.


Doctrine

Fermement attachée à la tradition des anciens conciles et en particulier à la christologie de Chalcédoine, l’Église maronite n’a jamais été en situation d’élaborer une théologie propre. Surtout depuis le concile de Trente, l’influence de la théologie romaine a été prédominante.


Liturgie

Sur le plan liturgique, par contre, l’Église maronite a mieux réussi à sauvegarder son originalité. Elle constitue une branche du rite syro-antiochien qui a intégré des formulaires et des usages de la tradition mésopotamienne (chaldéenne) et semble avoir conservé de très anciens éléments venus des communautés syriennes araméennes. L’influence latinisante des derniers siècles n’a guère atteint que les formes extérieures (notamment les vêtements) et certains détails du rituel ; un travail de longue haleine est actuellement entrepris en vue de rendre à cette liturgie sa forme originelle. La langue liturgique officielle demeure le syriaque, mais, depuis plusieurs siècles déjà, il est fait un large usage de l’arabe.

H. I. D.

➙ Églises orientales / Liban.

 P. Dib, l’Église maronite jusqu’à la fin du Moyen Âge (Letouzey, 1931) ; Histoire de l’Église maronite (Éd. « la Sagesse », Beyrouth, 1962 ; 2 vol.). / R. Janin, les Églises orientales et les rites orientaux (Letouzey, 1957). / J. P. Allem, le Liban (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1963). / M. Hayek, Liturgie maronite, histoire et textes eucharistiques (Marne, 1964). / C. J. Mahfoud, l’Organisation monastique dans l’Église maronite (Univ. du Saint-Esprit, Beyrouth, 1967).

Marot (Clément)

Poète français (Cahors 1496 - Turin 1544).


Fils du grand rhétoriqueur Jean Marot, qu’il accompagne vers 1506 à la cour de France, Clément Marot évoque avec nostalgie les distractions champêtres de son enfance dans l’Églogue au roi sous les noms de Pan et Robin (1539), ainsi que dans un passage de l’Enfer. Après des études médiocres, peut-être à Orléans, il reproche aux régents d’avoir « perdu » sa jeunesse. Vers 1514, il entre comme page au service de Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy ; en 1516, il est clerc du procureur Jean Grisson. Il traduit alors la Première Églogue de Virgile, le Jugement de Minos de Lucien, et il publie ses premières œuvres.

Choisi, en 1519, comme valet de chambre par Marguerite d’Angoulême, sœur de François Ier, il trouve auprès de cette princesse une protectrice fidèle, si bien qu’après la mort de son père Marot deviendra en 1527 valet de chambre du roi. Mais il est vite aux prises avec l’autorité ecclésiastique. Dès 1526, accusé d’avoir mangé du lard en carême, il a été incarcéré au Châtelet, puis à la « prison claire et nette » de Chartres, où il a préparé une violente satire des juges, l’Enfer. L’année suivante, on le retrouve en prison pour avoir rossé le guet et délivré un prisonnier, mais il obtient vite la grâce royale par une amusante épître. L’affaire des Placards, qui éclate en 1534, le contraint de fuir à Nérac, puis à Ferrare, auprès de Renée de France, favorable aux idées nouvelles. Période féconde et heureux exil, pendant lequel, tout en rimant épigrammes et « blasons » (le Beau Tétin) et en s’initiant à la poésie pétrarquiste italienne, il fortifie ses convictions religieuses. De retour en France, il doit abjurer ses erreurs à Lyon, devant le cardinal de Tournon. François Sagon, un obscur rimeur, avait profité de l’absence du poète pour lancer contre lui un violent Coup d’essay et le dénoncer comme hérétique. Marot réplique avec une verve étourdissante dans l’Épître de Fripelipes (1537). En 1541, il publie, dangereuse entreprise, la traduction de Trente Psaumes ; condamné par la Sorbonne, il cherche asile à Genève, puis à Chambéry. Il meurt à Turin, le 10 septembre 1544, on ignore dans quelles circonstances, loin de son pays.

Vie relativement courte, mais pleine d’aventures déconcertantes, qui ont une répercussion profonde sur son œuvre, toute de circonstance. Insouciance ou bravade ? Peut-on lui reprocher d’avoir aimé la liberté comme l’« arondelle qui vole », et de rester toujours, au plus fort des épreuves, « fasché d’ennuy, consolé d’espérance » ?

Loin de se contenter de cultiver les genres des rhétoriqueurs, « les épiceries, comme rondeaux, ballades et virelays », comme le dit du Bellay dans la Défense et illustration, Marot a cherché à renouveler sa conception de la poésie. Sans doute les rhétoriqueurs sont-ils ses modèles préférés dans les premières œuvres ; à leur exemple, il fait des traductions et se plaît dans l’allégorie. En quête de Ferme Amour (le Temple de Cupido, 1515), le poète rencontre Bel Accueil et Faux Danger dans un verger fleuri. Les mêmes procédés apparaissent dans l’épître du Despourveu ou dans l’Épître de Maguelonne. Pourtant, l’élégance et la discrétion ne sont pas absentes de ses premiers essais, de cette Adolescence clémentine qu’il publie lui-même en 1532.