Madras (suite)
Le Grand Madras actuel couvre environ 130 km2, comportant un grand développement le long de la mer ; il mesure près de 30 km du nord au sud, et environ 10 km de lest à l’ouest. Avec des espaces verts, incomplètement bâtie, la conurbation conserve un caractère hétérogène qui trahit la diversité de ses origines. On y reconnaît trois noyaux anciens, à population plus dense : au nord, George Town, vieille cité populeuse datant du xviiie s. et dont l’activité est liée à la proximité du port ; au centre, Triplicane (Tiruvallikeni), quartier à prédominance musulmane, formé au xviiie s. près de l’ancien palais du nabab ; Mylapore, au sud, quartier issu de l’ancienne ville portugaise. De nouveaux quartiers centraux, plus aérés, se sont développés de part et d’autre du Mount Road, la grande-avenue qui relie le quartier du port au Saint Thomas Mount. Des quartiers périphériques, constitués autour de villages annexés, se sont diversifiés, le nord étant plus industriel (Perambûr, Tondiarpet, etc.), le sud affirmant plutôt une vocation résidentielle (Nungambākkam, Kilpauk, Māmbalam, Teynampet, etc.). Tout un ensemble de villages est pratiquement rattaché à la grande cité.
Les quartiers centraux comptent un certain nombre de monuments relativement anciens, comme les temples hindous d’Ekāmbareśwarar (fin du xviie s.), de Pārthasārathi, de Kāpāliswarar, la mosquée de Wālājāh, la cathédrale de San Thomé. Il existe également des édifices plus récents, comme le Central Museum, la bibliothèque Connemara et surtout l’université, dont les bâtiments bordent la Marina, majestueuse promenade sur le front de mer.
La population est, pour les trois quarts, de langue tamoule. Les autres langues importantes sont le telugu (8 p. 100) et l’urdū (3 p. 100), tandis que l’anglais est largement utilisé comme langue culturelle et de relations. À côté d’une majorité hindoue vivent d’importantes minorités religieuses qui se groupent dans certains quartiers : les musulmans (près de 10 p. 100) à Triplicane, Muthialpet, Kothwāl Bāzār, Rāyapettah, etc. ; les chrétiens (7 p. 100) à Vepery, San Thomé, Saint Thomas Mount, etc.
Le secteur tertiaire représente près des trois quarts de la population active ; le secteur secondaire, un quart (une grande masse de travailleurs est en fait difficile à classer). Ces proportions soulignent le fait que Madras est avant tout une métropole assumant des services variés : commerce et transport, banques, fonction culturelle et politique (écoles, journaux). Le port, artificiel, est le seul port moderne qui existe sur les côtes peu hospitalières de l’Inde méridionale. Ses importations (3,7 Mt en 1970) sont des produits énergétiques (charbon, pétrole), des matières premières (coton, textiles synthétiques, peaux brutes), des produits alimentaires, de l’outillage. Ses exportations (3,2 Mt) consistent surtout en cuir, tissus, produits agricoles variés, minerais.
Les industries doivent moins au trafic portuaire qu’à l’arrière-pays. Elles comprennent une grande variété d’activités artisanales : fabrication des « bidi », tissage et impression des célèbres cotonnades appelées madras, imprimeries, réparations mécaniques, habillement. Les industries de caractère moderne ont longtemps manqué de capitaux, de sources d’énergie et de matières premières proches. Certaines spécialisations se sont cependant affirmées : verrerie, petite métallurgie. Depuis la seconde moitié du xixe s., la tannerie est devenue une des grandes activités de la banlieue et de la région voisine. L’industrie moderne est représentée par le textile, les allumettes, le matériel ferroviaire, l’automobile, les bicyclettes, les studios de cinéma.
Anciennement capitale d’une présidence, Madras a souffert d’être réduite, depuis 1956, au rôle de capitale d’État. Sa fonction de métropole est ainsi concurrencée par la croissance de Bangalore et Hyderābāb.
J. D.
➙ Tamilnād.
J. Dupuis, Madras et le nord du Coromandel (A. Maisonneuve, 1960).