Lurçat (Jean) (suite)
Voici les principaux faits de sa carrière : en 1913, il fonde à Paris une revue, les Feuilles de mai, à laquelle collaboreront Bourdelle, Élie Faure, Charles Vildrac... ; en 1914, après avoir voyagé en Italie, il s’engage dans l’infanterie ; blessé, il est versé dans le service auxiliaire en 1917 ; la même année, exposition à Zurich (peintures) et premières tapisseries exécutées par sa mère au point de canevas (sorte de broderie) ; nombreux voyages à partir de 1918 ; 1920, peintures à Seiano près de Sorrente, tapisseries au point de canevas (Pêcheurs et Piscine) exécutées par Marthe Hennebert ; expositions à Zurich, à Berne et à Paris, au Salon des artistes indépendants ; 1921, décors et costumes pour la compagnie Pitoëff ; 1922, premières expositions particulières à Paris, tapisserie au canevas (le Cirque), décoration murale au château de Villeflix ; 1923, voyage en Espagne ; 1924, en Afrique du Nord, Grèce, Asie Mineure ; tapisserie au canevas, les Arabes ; s’installe à Paris, villa Seurat, dans une maison bâtie par son frère André Lurçat ; 1925, Afrique du Nord, Espagne, Écosse ; exposition à Paris, galerie Jeanne Bucher ; 1927, tapisseries au canevas, dont l’Orage pour M. Georges Salles (léguée au musée national d’Art moderne) ; 1928, voyage en Grèce, à Rome, à New York, où il expose peintures et gouaches ; 1930, expositions à Londres et à New York ; tapisserie au canevas, l’Été, exécutée par les ateliers Hennebert à Toulon ; 1931, s’installe à Vevey en Suisse ; 1933, travaille à New York (décors et costumes pour un ballet) ; première tapisserie de lisse (l’Orage) exécutée à Aubusson pour le compte de Mme Cuttoli ; 1934, séjours à New York et à Moscou ; 1936, première tapisserie exécutée à la manufacture nationale des Gobelins, les Illusions d’Icare, suivie de Forêts (1937).
En raison du succès immédiatement remporté et aussi de la révélation qu’est pour lui en 1938, à Angers*, la tenture de l’Apocalypse, Jean Lurçat, désormais, se consacrera surtout à la rénovation de la tapisserie à Aubusson. Parmi les quatre cent cinquante pièces de sa production, et sans parler de thèmes favoris comme celui du Coq, il faut citer Liberté (1943, musée national d’Art moderne), la Tapisserie de l’Apocalypse (1947, église d’Assy), le Vin (1947, musée du Vin de Bourgogne à Beaune), Hommage aux morts de la Résistance et de la Déportation (1954, musée national d’Art moderne), la Rose et le colibri (1955, maison de France à Rio de Janeiro) et, couronnement de cette carrière, le Chant du monde, tenture dont les dix pièces achevées ont été acquises par la ville d’Angers : « la Bombe atomique », « l’Homme d’Hiroshima », « la Fin de tout », « l’Homme en gloire dans la paix », « le Feu et l’eau », « le Grand Charnier », « Champagne », « la Conquête de l’espace », « la Poésie », « Ornamentos sagrados ». Infatigable voyageur, Lurçat a continué de parcourir le monde, présent aux multiples expositions de son œuvre, tout en exécutant, outre ses cartons de tapisserie, gouaches, lithographies, illustrations de livres et céramiques.
Peintre, Jean Lurçat se rattache au cubisme et au surréalisme ; cartonnier, consacré officiellement comme l’initiateur d’une brillante renaissance de la tapisserie dans sa technique originelle, il est le maître d’un art aux libres métamorphoses, à la fois fantastique, intemporel et délibérément inséré au cœur de la réalité, celle du cosmos et celle de l’homme. Il a notamment exprimé ses idées dans l’ouvrage Tapisserie française (1947).
M. G.
➙ Tapisserie.
C. A. Cingria, Lurçat ou la Peinture avec des phares (Amsterdam, 1927). / P. Soupault, Jean Lurçat, (Éd. « Cahiers d’art », 1928). / J. Marcenac, l’Exemple de Jean Lurçat (Falaize, 1952). / C. Roy, Jean Lurçat (Caillier, Genève, 1956 ; nouv. éd., 1962). / Hommage à J. Lurçat, le Chant du monde (Centre international de la Tapisserie ancienne et moderne, 1967).