Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Lune (suite)

Les cratères suggèrent et souvent imposent l’hypothèse dite « météorique », qui attribue leur formation à l’impact de corps arrivant de l’extérieur ; ce résultat est d’autant plus assuré que, contrairement au cas de la Terre, il n’existe aucune atmosphère pour les freiner et, le plus souvent, provoquer leur désintégration en les portant à incandescence. Mais un grand nombre de cas apportent une évidence aussi convaincante en faveur de l’hypothèse volcanique, avec la répartition des matériaux et certaines structures radiales autour d’un cratère important (comme Copernic) qui gardent la trace de projections lors d’une éruption centrale. Il est vraisemblable que la Lune conserve un noyau central résiduel qui entretient une activité dont les manifestations en surface sont très espacées. En 1958, puis de nouveau en 1959, l’astronome Kozyrev a observé dans le cratère Alphonse un phénomène lumineux qui était très probablement une éruption. La Lune offrait alors aux astronomes le spectacle d’un monde qui a pu ressembler à la Terre, mais qui a vieilli plus vite. L’effet des marées liquides et atmosphériques a ralenti sa rotation jusqu’à la rendre synchrone de son mouvement orbital (tendance qui est aussi celle de la Terre) ; sa faible pesanteur n’a pu retenir l’atmosphère, et depuis longtemps aucune érosion ne vient plus modifier sa surface. À ceux qui s’étonnent de ne pas voir se former des cratères météoriques, on peut opposer le calcul des probabilités, qui fixe très au-dessus de la durée de notre civilisation l’intervalle entre deux impacts importants.

L’exploration rapprochée de la Lune a commencé en octobre 1959 quand l’engin automatique « Luna 3 » a photographié sa face cachée ; prise pourtant à 60 000 km, cette première image, développée dans l’engin même, qu’il n’était pas question de récupérer, et transmise à la Terre selon une technique encore imparfaite, est grossière et peu détaillée, mais elle n’en a pas moins soulevé un immense intérêt. En 1964, trois engins « Ranger » successifs ont atteint le sol lunaire, en des points choisis dans des zones très diverses, après avoir transmis en fin de course des images de la région sur laquelle ils allaient se précipiter. Au cours des années suivantes, les « Luna » soviétiques, les « Lunar Orbiter » et les « Surveyor » américains ont gravité autour de la Lune ou ont été déposés sur son sol. Les uns et les autres ont retransmis une très grande quantité d’images, examiné, analysé, sondé ce sol, mesuré des températures, des champs magnétiques et électriques, guetté des séismes parfois provoqués. Enfin, en conclusion de la magistrale progression du programme « Mercury » (monoplace), « Gemini » (biplace), « Apollo » (triplace), l’homme a approché la Lune pour finalement y poser le pied le 21 juillet 1969 (« Apollo 11 ») ; cinq autres missions « Apollo » ont réussi depuis, chacune débarquant deux hommes, les trois dernières les munissant d’un petit véhicule autonome pour étendre et faciliter leur exploration. Plusieurs quintaux de matériaux lunaires de régions diverses ont été ramenés et étudiés. Ces missions ont déposé également sur la Lune des stations automatiques complètes qui continuent de transmettre les mesures les plus diverses, ainsi que des réflecteurs laser qui permettent d’inaugurer toute une technique nouvelle en astronomie de position non seulement dans l’étude des distances lunaires, mais dans celle de la rotation terrestre et des mouvements du pôle. Sur la surface elle-même, les conclusions antérieures des astronomes se confirment : elle est très poussiéreuse, la couche étant plus ou moins profonde selon les régions, et les températures extrêmes y sont évidemment excessives avec un jour et une nuit de 14 fois 24 heures chaque, et sans aucun manteau atmosphérique. En fouillant ce sol (car on a extrait des carottes de 2 m de haut), et même en surface quand ils ont été projetés par des éruptions, on trouve des blocs rocheux. Les roches compactes sont souvent de type basaltique ; mais on trouve parfois à l’intérieur de petites sphérules comme vitrifiées. Les parties métalliques peuvent être attribuées à l’apport de météorites de ce type, et ne sont donc pas nécessairement d’essence lunaire. L’étude de la radioactivité des matériaux ne contredit pas jusqu’à présent l’hypothèse selon laquelle la Lune aurait en gros le même âge que la Terre.

En ce qui concerne les mesures physiques, le champ magnétique paraît beaucoup plus important que ne semblaient l’annoncer les sondages à distance par les premiers engins non déposés sur le sol, peut-être plusieurs dizaines de gammas en surface. Une autre surprise est venue des premiers résultats de la séismologie lunaire ; les séismes artificiels provoqués notamment par l’écrasement des étages S-IV B des missions « Apollo » ou du LEM abandonné après avoir rejoint l’engin « Apollo » pour y ramener les deux astronautes débarqués ont été enregistrés pendant des durées relativement considérables. Il est certain que l’étude de ces résultats conduira à mieux asseoir des hypothèses sur l’intérieur du globe lunaire et notamment sur un noyau central.

P. M.

➙ Astronautique / Astronomie / Mécanique céleste / Planète / Soleil / Terre.

 Z. Kopal, The Moon in the Post-Apollo Era (Reidel Publishing Company, 1974). / G. Camille-Flammarion et A. Danjon (sous la dir. de), Astronomie populaire Camille Flammarion (Flammarion, 1955). / V. de Callataÿ, Atlas de la lune (Gauthier-Villars, 1962). / P. de Latil, la Lune et les planètes (Hachette, 1969). / F. Link, la Lune (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1970).

Lurçat (Jean)

Peintre et cartonnier de tapisserie français (Bruyères, Vosges, 1892 - Saint-Paul-de-Vence 1966).


À Nancy, où le jeune homme étudiait pour devenir médecin militaire, vivait Victor Prouvé, l’un des animateurs de cette école de Nancy* vouée, la première en France, à la rénovation des arts appliqués. Intéressé par cette cause, Jean Lurçat obtint d’abandonner la médecine pour accomplir deux années d’apprentissage (1911 et 1912) dans l’atelier du maître. Or, Prouvé était un ami de Gustave Geffroy, qui, administrateur de la manufacture nationale des Gobelins*, avait tenté dès 1908 de moderniser l’art de la tapisserie, dégénéré au point de ne plus servir qu’à la reproduction de peintures et non, comme autrefois, à l’interprétation de cartons propres à mettre en valeur les qualités intrinsèques du tissage.

En 1913, venu à Paris achever sa formation, Lurçat, après un bref passage à l’École nationale supérieure des beaux-arts, devint l’élève du dessinateur et graveur Bernard Naudin (1876-1946) à l’académie Colarossi, puis s’intéressa à l’art mural.