Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

lèpre (suite)

Forme tuberculoïde (type T)

Isolée en 1898 par Josef Jadassohn (1863-1936), elle s’oppose à la précédente par sa pauvreté en bacilles, son polymorphisme cutané et l’importance de ses manifestations nerveuses.

Les lésions cutanées consistent en micropapules disposées en nappes annulaires (léprides marginées), zones dépigmentées, macules brunâtres, plages érythémato-squameuses de bordures extensives surélevées. On distingue une forme tuberculoïde mineure, pour laquelle les lésions sont relativement superficielles, et une forme tuberculoïde majeure, dont les léprides sont saillantes et fortement infiltrées. Dans les deux formes, les oreilles sont toujours respectées. Les manifestations nerveuses sont presque constantes : anesthésies au centre des placards ; dissociation thermo-algésique à rechercher au bord cubital de la main et à la face externe du pied ; hypertrophie des nerfs cubitaux ; atrophie musculaire des muscles de la main (éminences thénar et hypothénar) ; troubles trophiques (mal perforant) ; lésions osseuses. La lèpre tuberculoïde est relativement stable et d’évolution favorable. Toutefois, la survenue de poussées réactionnelles, la persistance de graves séquelles nerveuses et surtout la possibilité de transformations en lèpre lépromateuse en assombrissent le pronostic.


Diagnostic de la lèpre

Il faut penser à la lèpre chez tout sujet revenant d’une région tropicale d’endémicité et atteint de troubles nerveux ou d’une éruption de nature indéterminée. Les causes d’erreur sont : le pian, le lupus tuberculeux, les leishmanioses, la syphilis tertiaire. Les formes tuberculoïdes sont à différencier de la maladie de Besnier-Bœck-Schaumann (v. dermatose), mais celle-ci ne comporte pas de lésions cutanées avec des troubles sensitifs localisés.

Le diagnostic positif repose avant tout sur la découverte du bacille de Hansen. On le recherche sur les prélèvements cutanés et sur un copeau de la muqueuse nasale détachée à la curette. Il est souvent décelable par scarification de la paupière inférieure. De même morphologie que le bacille de Koch, possédant les mêmes affinités tinctoriales, il s’en différencie par sa disposition en amas compacts (globi). Le bacille de Stefanski, agent pathogène de la lèpre murine (du Rat), ne se dispose qu’exceptionnellement en globi ; il est inoculable au Rat et au Hamster, alors que le bacille de Hansen n’est pas inoculable aux animaux.

L’image histologique de la forme lépromateuse est faite d’infiltrats massifs avec de volumineuses cellules histocytaires macrophagiques remplies de bacilles de Hansen (cellules spumeuses de Virchow). Celle de la forme tuberculoïde a l’aspect du nodule sarcoïdique de la maladie de Schaumann. L’interprétation en est délicate, mais les infiltrats de la lèpre sont surtout disposés autour des glandes sudoripares et des nerfs. Le bacille de Hansen n’y est présent qu’exceptionnellement. L’intradermoréaction à la lépromine (réaction de Mitsuda) n’a en elle-même aucune valeur diagnostique, ne témoignant que d’un état d’allergie au bacille de Hansen suivant son stade évolutif. Son gros intérêt consiste à préciser la forme de la lèpre en cause : positive dans la lèpre lépromateuse, elle est positive dans 90 p. 100 des formes indéterminées, mais s’affaiblit dans la forme border-line, pouvant même se négativer. La réaction de Mitsuda est généralement positive chez les sujets sains vivant en pays d’endémicité.


Pronostic

Il n’a plus l’extrême gravité de jadis, alors que l’on ne disposait que du traitement par l’huile de chaulmoogra. L’introduction en 1941 dans la thérapeutique antilépreuse des médications soufrées (sulfones) a totalement modifié l’évolution de la maladie. Deux médications sont usitées : la diaminodiphénylsulfone (D. D. S.), dite « sulfone-mère », et la sulfaméthoxypyridazine.

De nombreuses médications ont été proposées contre les redoutables « poussées réactionnelles ».

Un traitement précoce et prolongé peut apporter la guérison complète, ou tout au moins enrayer l’évolution. Le traitement doit être poursuivi des années, alors que les symptômes cutanés et nerveux ont disparu.

A. C.

 R. G. Cochrane, Leprosy in Theory and Practice (Bristol, 1959 ; 2e éd., 1964). / A. Carayon, P. Bourrel, J. Languillon et M. Touze, Chirurgie de la lèpre (Masson, 1964). / J. Languillon et A. Carayon, Précis de léprologie ; clinique et thérapeutique de la lèpre en Afrique noire (Masson, 1969).

Leprince (les)

Peintres verriers français du xvie s.


Si quelque document d’archives ne vient pas éclairer leur biographie, la vie professionnelle de deux des plus grands maîtres du vitrail* français de la Renaissance, Engrand ou Encuerand († Beauvais 1531) et Jean Leprince (mentionné à Beauvais de 1496 à 1547), restera très obscure.

La tradition veut qu’Engrand se soit représenté sous les traits d’un des ancêtres du Christ dans la verrière de l’Arbre de Jessé de l’église Saint-Étienne de Beauvais, avec la signature ENGR. D’autre part, le sigle ELP se lit sur le vitrail de Charles de Villiers à l’église de Montmorency (1524) et sur l’un des vitraux, sauvés, de l’église Saint-Vincent de Rouen (détruite en 1944), l’Histoire de saint Jean-Baptiste d’après Lucas* de Leyde. Le même sigle est accompagné de la signature Jehan LE DE... PRI..., sans doute celle de Jean, sur un autre de ces vitraux, le Triomphe de la Vierge, daté de 1515 — dit « vitrail des Chars » en raison des chars de triomphe à l’italienne qui portent, sur trois registres, Adam et Ève, Satan, la Vierge, entourés de figures allégoriques. De 1522 date une autre œuvre certaine des deux artistes, la Déposition de Croix offerte à la cathédrale de Beauvais, en commémoration d’une famine, par Louis de Roncherolle et son épouse Françoise de Halluin. L’art des Leprince se distingue, en leur temps, non seulement par la sûreté du dessin large et rapide, l’originalité de style et d’expression, mais encore par une virtuosité technique exceptionnelle.