Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

jambe (suite)

L’articulation péronéo-tibiale supérieure unit les extrémités supérieures du tibia et du péroné : les surfaces articulaires sont jointes par une capsule et des ligaments, mais cette arthrodie ne peut exécuter que des mouvements de glissement peu étendus. L’articulation péronéo-tibiale inférieure est une amphiarthrose : les surfaces articulaires n’ont pas de revêtement cartilagineux, mais, recouvertes de périoste, sont unies étroitement par les courtes fibres du ligament interosseux renforcé par les ligaments antérieur et postérieur ; cette articulation présente de légers mouvements liés à ceux de la tibio-tarsienne. L’articulation du cou-de-pied, ou tibio-tarsienne, réunit les deux os de la jambe à l’astragale. Les extrémités inférieures des os de la jambe forment une mortaise dans laquelle pénètre le corps de l’astragale, taillé en forme de tenon. La mortaise tibio-péronière présente une surface articulaire supérieure concave d’avant en arrière et deux surfaces latérales, malléolaires ; le tenon astragalien lui oppose trois facettes articulaires, deux latérales et une supérieure, la poulie astragalienne, plus étendue dans le sens antéropostérieur que son homologue tibiale ; le tenon astragalien est recouvert d’une couche continue de cartilage ; une capsule et deux puissants ligaments maintiennent en présence les surfaces articulaires ; le ligament latéral externe est formé de trois faisceaux distincts qui divergent de la malléole externe vers l’astragale et le calcanéum ; le ligament latéral interne, double plan fibreux très résistant, est tendu de la malléole interne à l’astragale, au scaphoïde et au calcanéum.

Les muscles de la jambe sont répartis en trois groupes séparés par un plan ostéofibreux (tibia, péroné et membrane interosseuse) et par les cloisons intermusculaires antérieure et externe. La loge antérieure comprend les muscles jambier antérieur, extenseur commun des orteils, extenseur propre du gros orteil et péronier antérieur ; la loge externe renferme les muscles péroniers latéraux ; la loge postérieure présente un plan superficiel formé par le triceps sural, union des jumeaux et du soléaire, qui constitue à la partie supérieure de la jambe le relief du mollet et se continue en bas par le tendon d’Achille ; plus profondément, séparés du triceps par l’aponévrose profonde de la jambe, se trouvent les muscles jambier postérieur, fléchisseur commun des orteils, long fléchisseur du gros orteil ; les trois loges de la jambe sont entourées par l’aponévrose jambière, sur laquelle cheminent les faisceaux nerveux sensitifs et les veines superficielles : saphènes interne et externe.

La jambe est une région de passage pour les vaisseaux et nerfs du pied* : dans la loge antéro-externe cheminent les vaisseaux tibiaux antérieurs, les nerfs tibial antérieur et musculo-cutané (branches terminales du sciatique poplité externe, qui a gagné la jambe en contournant le col du péroné). Dans la loge postérieure descendent les vaisseaux tibiaux postérieurs et le nerf sciatique poplité interne, qui, après avoir innervé le triceps, devient nerf tibial postérieur. Dans la gouttière rétromalléolaire interne, il se divise en ses deux branches terminales : nerfs plantaires externe et interne.


Pathologie traumatique


Fractures des deux os de la jambe

Ce sont les plus fréquentes des fractures ; elles sont parmi les plus difficiles à traiter. Si elles relèvent d’un mécanisme direct (pare-chocs d’automobile, coup de pied de cheval), les os sont alors brisés en même temps et au même niveau. Mais elles peuvent aussi être dues à un mécanisme indirect : fractures par flexion (chute d’échelle, jambe entre deux échelons) et surtout fractures par torsion (accident de ski), dans lesquelles le tibia se rompt à son point de moindre résistance, c’est-à-dire au-dessous du tiers moyen, le péroné se fracturant secondairement ; le trait peut être transversal, oblique ou spiroïde avec un fragment supérieur taillé en V ; souvent existe un troisième fragment, qui peut atteindre l’articulation tibio-tarsienne ; le trait péronier n’est pas au niveau du trait tibial, mais dans le prolongement du plan de la fracture tibiale. Il existe des fractures comminutives, ou à deux traits transversaux (particulièrement difficiles à réduire et à contenir), et chez l’enfant des fractures sous-périostées, en bois vert.

Le traitement des fractures de jambe est parfois purement orthopédique (réduction sous anesthésie, aidée au besoin de broches trans-osseuses et contention plâtrée), mais souvent il faut se résoudre au traitement sanglant (réduction à ciel ouvert, contention par vis ou plaque métallique vissée [ostéosynthèse]). Dans tous les cas, la surveillance postopératoire clinique et radiologique doit être attentive. En l’absence de complications, la consolidation survient en trois mois en moyenne. Fréquente est l’ouverture du foyer de fracture, soit de dehors en dedans par l’agent vulnérant, soit de dedans en dehors par un fragment du tibia dont la face interne et la crête sont sous-cutanées. Ces fractures ouvertes imposent l’intervention d’urgence : parage de la plaie, fermeture rigoureuse du revêtement cutané (au besoin par plastie), contention plâtrée ou ostéosynthèse. Tardivement, la grande complication des fractures de jambe est la pseudarthrose, particulièrement fréquente dans les fractures ouvertes, mais qui peut survenir après une fracture fermée même correctement traitée : le foyer de fracture se transforme en une « fausse articulation », provoquant une impotence totale du membre. Le traitement de ces pseudarthroses est difficile (greffe osseuse, décortication) et toujours de longue durée. Les séquelles sont fréquentes : rétractions musculaires, raideurs articulaires, ostéite fracturaire (particulièrement dans les fractures avec gros délabrements des parties molles).


Fractures isolées d’un des os de la jambe

• Les fractures isolées du tibia sont rares : elles se produisent lorsque le traumatisme a eu juste la force de fracturer cet os, le péroné restant intact. Le pronostic est meilleur que dans les fractures des deux os, car le péroné constitue une attelle naturelle, mais le traitement et la durée de consolidation sont analogues aux fractures des deux os.

• Les fractures isolées du péroné sont bénignes, mais, si le trait siège au niveau du col, la fracture peut se compliquer de lésion du sciatique poplité externe (rarement blessure immédiate, plus souvent inclusion dans le cal).