Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Iran (suite)

Trois jours durant, Mossadegh souleva la population contre la monarchie. Le chāh quitta le pays, mais le soulèvement échoua ; le 16 août, le général Zāhedi devint Premier ministre, et, trois jours après, le chāh rentra en Iran. Les relations avec les grandes puissances furent normalisées et en 1954 fut créé un consortium international du pétrole composé de compagnies anglaise, française, hollandaise et américaine ; celui-ci reçut l’autorisation d’extraire le pétrole et d’utiliser les installations. Les droits perçus par l’Iran sur la production du pétrole étaient de 50 p. 100 (cette convention devait prendre fin en mars 1973, quand le gouvernement iranien proclama, en accord avec le consortium, sa souveraineté absolue sur toutes ses installations pétrolières, réduisant le rôle du consortium international du pétrole à celui d’acheteur privilégié). Mossadegh fut condamné à mort en décembre 1953 par un tribunal militaire, mais, sur l’intervention du chāh, la peine fut commuée en trois ans de prison. Mossadegh fut libéré le 5 août 1956 et finit ses jours dans ses propriétés. Le F. N. I., dont les militants furent poursuivis et certains condamnés à mort (dont le docteur Fatemi, ancien ministre des Affaires étrangères), entra dans la clandestinité. En avril 1954, des élections législatives eurent lieu (dix-huitième madjilis et deuxième sénat), et le gouvernement, dirigé par un Premier ministre militaire, céda la place aux civils.

L’Iran adhéra au pacte de Bagdad (1955), puis au Cento (Central Treaty Organization, 1959) après la révolution irakienne. Le 9 janvier 1963, le souverain promulgua les six premiers points de la « révolution blanche » : réforme agraire, nationalisation des forêts et pâturages, ventes d’actions des fabriques d’État, distribution de 20 p. 100 des bénéfices des entreprises aux ouvriers, droit de vote des femmes, création de l’« armée du savoir » pour lutter contre l’analphabétisme.

Le 26 janvier de cette même année, un référendum approuva ces réformes ; le vingt et unième madjilis (1963) marqua un glissement vers le parti majoritaire, celui du Nouvel Iran (Iran Novin), dont le leader, Haṣan ‘Ali Mansur, devint Premier ministre en 1964 ; mais ce dernier, ayant été assassiné en janvier 1965, fut remplacé par le Premier ministre actuel, Amir ‘Abbās Hoveyda. Le chāh prit un certain nombre de mesures pour asseoir le pouvoir de la monarchie (en particulier après la tentative d’assassinat d’avril 1965) : nomination d’un Conseil de régence, couronnement solennel (26 oct. 1967) du chāh et de son épouse, célébration de vingt-cinq siècles de monarchie iranienne à Persépolis, série de voyage et de rencontres en Orient et en Occident, assurant la stabilité du régime dans le cadre de la coexistence pacifique. Les États-Unis accordèrent une aide financière importante à l’Iran, qui, d’autre part, se rapprocha de l’U. R. S. S. et des pays communistes, et qui signa des accords avec la France, l’Allemagne, le Japon, les États arabes voisins, la Chine, l’Inde, etc.

P. P. et I. B.

➙ ‘Abbās Ier le Grand / ‘Abbāssides / Achéménides / Alexandre le Grand / Arsacides / Assyrie / Cyrus II / Darios Ier / Gengis khān / Hellénistique (monde) / Mazdéisme / Mèdes / Mésopotamie / Mongols [l’histoire des Mongols] / Omeyyades / Ottomans / Parthes / Rhaznévides / Sassanides / Séfévides / Seldjoukides / Tīmūr Lang.

 J. Chardin, Voyages (Amsterdam, 1711 ; 10 vol.) ; Voyage en Perse (Union gén. d’éd., 1965). / J. Malcolm, The History of Persia (Londres, 1815 ; 2 vol.). / Ibn Athir, Al-Kāmil fi’t Ta’rikh (éd. par C. J. Tornberg, Leyde, 1862-1876 ; 14 vol.). / Tabarī, Tar’rikh al-Rusul wa’l Mulūk, Annales, quos scripsit... Tabari (Leyde, 1879-1901 ; 15 vol.). / L. L. Bellan, Chāh / Abbās Ier, sa vie, son histoire (Geuthner, 1932). / E. Eghbals, Tarikh-i Muffasal-i Iran, des Monghols aux Timurides (Téhéran, 1933). / W. Hinz, Irans Aufstieg zum Nationalstaat im fünfzehnten Jahrhundert (Berlin et Leipzig, 1936). / L. Lockhart, Nadir Shah (Londres, 1938). / Rasid al-Din Fadlallah, Geschichte Gāzān-Hān’s (Londres, 1940) ; Histoire des Ghaznevides et leurs contemporains (Ankara, 1957) ; les Saldjukides (Ankara, 1960) ; les Ismā’iliens (Téhéran, 1958-60) ; les Turco-Monghols (Moscou, 1965). / L. Binder, Iran, Political Development in a Changing Society (Berkeley, 1964). / P. Avery, Modern Iran (Londres, 1965). / Mohammad Reza Pahlavi Aryameh, la Révolution sociale de l’Iran (Téhéran, 1967). / The Saljuq and the Mongol Periods (Cambridge, 1968). / P. Sykes, A History of Persia (Londres, 1969 ; 2 vol.) ; the Cambridge History of Islam (Cambridge, 1971 ; 2 vol.). / M. Mokri, Contribution scientifique aux études iraniennes (Klincksieck, 1970).


La population et l’économie


Populations et genres de vie


L’ancienne vie sédentaire iranienne

Le stock fondamental de la population est constitué par les peuples issus de la grande famille indo-européenne des Aryens, dont la persistance exprime une extraordinaire continuité humaine. En effet, ces pasteurs semi-nomades se fixèrent vite sur le plateau. L’Empire achéménide offre déjà le tableau d’une société à écrasante prépondérance sédentaire, et dans l’armée de Xerxès les nomades ne constituaient qu’un dixième de la cavalerie. Le genre de vie prédominant dans les montagnes du Zagros était au plus un semi-nomadisme à court rayon d’action et déplacements lents, dont les Kurdes et Lurs d’aujourd’hui — populations de dialectes iraniens dont l’ethnogenèse dans ces montagnes se place dans les premiers siècles de l’ère chrétienne — nous offrent, avec leurs bœufs porteurs, le vestige vivant.

C’est essentiellement une civilisation agricole savante, minutieuse, qui s’est depuis longtemps enracinée dans les oasis du plateau et dans les vallées montagneuses du Zagros ou du versant intérieur de l’Elbourz. Les instruments en ont été des techniques perfectionnées de l’irrigation : galeries drainantes souterraines (qanāt) sur tous les piémonts arides du plateau intérieur ; barrages de dérivation et aménagement des pentes en terrasses dans les vallées de montagnes. En même temps, des rotations complexes et enrichissantes (association de légumineuses comme la luzerne avec les céréales), la fumure abondante d’un gros bétail stabulant, les soins d’une population de paysans-jardiniers bénéficiaires de traditions séculaires ont toujours permis d’atteindre de hauts rendements. L’Iran s’affirme comme un pays sédentaire par excellence, antithèse du Touran (ou Tūrān), des steppes d’Asie centrale, livrées aux nomades.