Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Iran (suite)

Muḥammad ‘Alī Chāh devint roi en 1907 et choisit un grand vizir réactionnaire. Une situation anarchique se développa dans tout le pays, menaçant même la cohésion de la famille royale. Le 31 août 1907, tandis que Russes et Anglais se partageaient l’Iran en deux zones d’influence, le grand vizir était assassiné. Deux tentatives de coup d’État du chah contre le Parlement (madjlis) se heurtèrent à une vive opposition populaire rassemblant les diverses couches de la société contre l’absolutisme du roi et aussi contre la présence des cosaques intégrés à l’armée iranienne. Le palais du madjlis et plusieurs foyers révolutionnaires furent bombardés par les troupes royales, mais le soulèvement se propagea en Azerbaïdjan et gagna le reste du pays, commandé à partir de Nadjaf, premier centre chī‘ite et cœur de la résistance. En juillet 1909, Téhéran était investi, et le chāh contraint à l’exil.

Son fils, âgé de onze ans, lui succéda sous le nom de Aḥmad Chāh. Pendant son règne (1909-1925), les Russes continuèrent à dominer la vie économique de l’Iran, et les Anglais à contrôler le Sud et à peser sur la politique de Téhéran, tandis que le régent Nāṣir al-Mulk rétablissait un régime absolutiste.


De 1914 à 1941

La Première Guerre mondiale favorisa une alliance anglo-russe contre les pénétrations allemande et turque. Mais, parallèlement, les mouvements populaires pour l’indépendance et la démocratie s’organisèrent en diverses régions. En août 1919, les Anglais projetèrent l’établissement d’un protectorat sur l’Iran, accepté par le Premier ministre anglophile de l’époque. Ce plan mobilisa contre lui la population ; les pays membres de la Société des Nations (S. D. N.) furent alertés à leur tour par les rapports des nationalistes iraniens.

La révolution d’octobre 1917 avait très momentanément éloigné les Russes de l’Iran et avait laissé les Anglais seuls maîtres du jeu politique dans le pays. Le 21 février 1921, le régiment iranien de cosaques déclencha un coup d’État qui porta à la tête du gouvernement Seyyed Ziaeddine Tabatabaï (Sayyid Divā’ al-Dīn), journaliste, et Rezā Khān Sawadkuhi (Riḍā Khān Sawādkūhī), colonel du régiment iranien des cosaques, qui fut nommé ministre de la Guerre. Mais ce gouvernement ne devait pas durer. Le 31 octobre 1925, le cinquième madjilis (Chambre des députés) désigna Rezā Khān comme chef du gouvernement provisoire, et, le 12 décembre de la même année, la nouvelle Assemblée constituante le proclama roi. Le 25 avril 1926, celui-ci était couronné sous le nom de Rezā Chāh Pahlavi. Ainsi fut fondée la dynastie Pahlavi, qui succédait à l’ancienne dynastie Qādjār.

Le nouveau régime lutta avec vigueur contre les diverses oppositions et institua un régime très centralisé. Une armée moderne fut créée à base du service militaire obligatoire. Le régime procéda à la refonte de l’Administration, se montra favorable à l’occidentalisation (abolition du voile pour les femmes par exemple) et développa dans ce sens les infrastructures économiques (construction du Transiranien, etc.) et culturelles (fondation de l’université de Téhéran, envoi massif d’étudiants iraniens en France et ailleurs). Une série de traités d’amitié furent signés entre l’Iran et les autres pays, notamment le traité de Sa‘dābād en 1937. La concession d’Arcy fut renouvelée aux Anglais pour soixante ans (1933).

Au début de la Seconde Guerre mondiale, Russes et Britanniques intervinrent en Iran le 25 août 1941 et occupèrent des territoires stratégiquement importants au sud et au nord, en vue d’établir une voie de ravitaillement commode du golfe Persique à l’U. R. S. S. Le 16 septembre 1941, le chah était contraint d’abdiquer en faveur de son fils Muhammad Rezā.


Depuis 1941

À la fin du conflit, l’Iran connut d’importantes difficultés économiques, des troubles et l’instabilité gouvernementale (18 cabinets en dix ans). On assista peu à peu au renforcement de la monarchie et du pouvoir central, en particulier après l’attentat de février 1949 contre le chāh. En fait, la situation resta très dépendante de la politique des grandes puissances (conférence de Téhéran de 1943 entre Roosevelt, Churchill et Staline) : les Anglais, moins influents que jadis, n’en gardèrent pas moins un rôle important ; les Russes maintinrent l’occupation du Nord et armèrent les mouvements séparatistes d’Azerbaïdjan et du Kurdistān ; quant aux Américains, ils développèrent fortement leur influence.

Les interventions étrangères et surtout les tentatives de séparatisme provoquèrent, par réaction, un mouvement nationaliste iranien. Le différend irano-soviétique dans l’affaire d’Azerbaïdjan fut porté devant le Conseil de sécurité, et, le 12 décembre 1946, l’armée iranienne entra à Tabriz, mettant fin au mouvement séparatiste. Dans les années qui suivirent, Mossadegh (1881-1967), député de Téhéran au quatorzième madjilis, rassembla des partisans de diverses tendances dans un mouvement appelé Front national de l’Iran (Djebhe-ye Melli-ye Irān). En mars 1951, le seizième madjilis vota la nationalisation des pétroles et, un mois après, son application en neuf points, avec le départ de l’Anglo-Iranian Oil Company. Devenu Premier ministre le 29 avril 1951, Mossadegh entreprit une politique antibritannique : fermeture des consulats britanniques (janv. 1952), rupture des relations diplomatiques (oct. 1952), fermeture de l’Imperial Bank of Persia. En mai 1952, le problème de la nationalisation de l’industrie pétrolière fut porté devant la Cour internationale de justice à La Haye.

En juin 1952, un conflit constitutionnel avec le chah provoqua la démission de Mossadegh ; en juillet de la même année, celui-ci fut ramené au pouvoir ; il prépara un référendum en vue de la réforme électorale. Mais, le 13 août 1953, deux décrets royaux étaient signés, l’un démettant Mossadegh, l’autre le remplaçant par le général Zāhedi.