Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Indonésie (suite)

Les transports terrestres

Ils sont caractérisés, d’une part, par leur rôle relativement mineur (40 p. 100 du total, mesuré en tonnes kilométriques, répartis à raison de 15 p. 100 pour les chemins de fer et 25 p. 100 pour la route) et, d’autre part, par leur inégal développement sur le plan régional.

La situation des chemins de fer, comme celle du réseau routier, reflète fidèlement les aspects de l’économie coloniale.

Sumatra compte ainsi près de 2 000 km de lignes de chemin de fer relativement disparates dans leurs caractéristiques techniques et leur localisation. Il n’y a pas, à proprement parler, de réseau, mais un certain nombre de dessertes locales destinées aux entreprises minières ou aux plantations. Java, par contre, est dotée d’un véritable réseau de 6 640 km qui relie sans discontinuité la capitale à la ville de Surabaya, à l’est de l’île, par deux itinéraires distincts, l’un empruntant les plaines côtières septentrionales, le second se faufilant entre les volcans et longeant le littoral méridional. Le réseau et le matériel non seulement sont anciens, mais souffrent d’une détérioration due à l’absence d’entretien.

En dépit d’un effort particulier pour entretenir le réseau routier, à peine 25 p. 100 de celui-ci sont dans un état satisfaisant, 15 p. 100 dans un état qualifié de moyen, le reste dans un très mauvais état. Quant au parc automobile, il est encore réduit, mais il s’accroît, notamment par l’importation d’un grand nombre de véhicules utilitaires, comme la Jeep.


Les échanges commerciaux

Ils reflètent, tout comme les communications, l’inachèvement de l’appareil économique du pays. Ils font apparaître de nets déséquilibres dans la nature des produits échangés. Seules les matières premières sont exportées. Parmi elles, on trouve, en bonne place, le pétrole et les minerais (principalement l’étain), qui rapportent à eux seuls plus de la moitié des devises du pays. Le reste de la recette provient de la vente des produits agricoles, qui sont d’ailleurs commercialisés sous une forme aussi peu valorisée que le pétrole et les minerais. Par contre, les importations consistent essentiellement en achats de produits manufacturés ou de produits de consommation.

B. D.

➙ Bali / Bornéo / Célèbes / Djakarta / Java / Nouvelle-Guinée / Sumatra.

 C. Robequain, le Monde malais (Payot, 1946). / J. Delvert, l’Indonésie (C. D. U., 1964). / J. Dupuis, l’Asie méridionale (P. U. F., coll. « Magellan », 1969). / B. Dorléans, l’Économie indonésienne (la Documentation française, « Notes et études documentaires », 1971).


Les littératures indonésienne et malaise

Sorties du même berceau et se servant de la même langue, évoluant sous tutelles différentes, ces deux littératures semblaient devoir s’ignorer et poursuivre des voies séparées. Or, l’Indonésie, consciente de la nécessité d’une langue commune pour construire une nation, a choisi le malais pour sa langue nationale, le malais consacré depuis longtemps dans ses îles comme langue de relation. Son rival, le javanais, magnifique outil d’une littérature écrite séculaire, ne pouvait s’imposer. Archaïsant, il est doté d’un système complexe de vocabulaire, ensemble de véritables « sous-langues » dont aucun étranger pressé ne saurait saisir les finesses... Aussi, cet exposé ne tiendra-t-il compte des autres composantes de l’Indonésie, dont Java, que dans la mesure où elles seront nécessaires à son propos.


La littérature ancienne

Les relations avec l’Inde préaryenne datent, sans aucun doute, du Néolithique. Certains mythes et faits linguistiques sont tellement communs que l’on hésite à parler d’influence, il s’agit plutôt de contamination mutuelle. Ces relations devaient avoir un caractère commercial. Or, depuis le début de l’ère chrétienne, des émigrés, lettrés et religieux, apparaissent par vagues successives dans les mêmes régions. Les Pallava de la côte de Coromandel, bouddhistes, laissent les premiers vestiges (ive s.) épigraphiques et archéologiques à Bornéo, dans la péninsule malaise, à Célèbes et à Java. Ils participent à la fondation des royaumes, introduisent leur alphabet et la connaissance du sanskrit. Ils importent également des traditions religieuses, brahmaniques et bouddhiques, ainsi que deux grandes épopées ; le Mahābhārata et le Rāmāyaṇa.

Sumatra ne manifeste son réveil à ce contact qu’au viie s., par les célèbres inscriptions du royaume de Śrīvijaya, de la région de Palembang et de l’île de Bangka. Elles sont rédigées en « vieux malais » mêlé de sanskrit et représentent ainsi les plus anciens documents écrits de langue malaise. Ils resteront « uniques » jusqu’au xive s. Malgré tous les témoignages des religieux chinois et d’autres étrangers sur les activités de l’université religieuse de Palembang, aucun document écrit de l’époque n’a plus été livré par la terre de Sumatra...

Entre-temps, à Java, où des royaumes hindouisés se fondent, se développe une vie courtoise, et des lettrés affluent pour y transcrire et traduire des ouvrages poétiques ou savants. Une langue savante, le kawi, mélange de sanskrit et de vieux javanais, s’élabore au viiie s., ainsi qu’une écriture fondée sur l’alphabet pallava et qui portera également le nom de kawi. On croit que le Rāmāyaṇa en vieux javanais, sous sa forme poétique, kakawin, aurait été composé au xe s. au plus tard ; le xie s. verra un résumé du Mahābhārata, en prose, et le xiie s., un épisode de ce dernier, le Bhāratayuddha, sous forme poétique (tembang gede). La métrique sanskrite fut connue à Java, où elle réglait la poésie savante ; le vieux javanais utilisait une trentaine de mètres en les annonçant à l’intérieur des strophes, mais, à mesure que la langue se débarrassait du sanskrit en se rapprochant de la langue parlée, on élabora une douzaine de normes originales (tembang macapat). Les deux épopées furent également retransposées pour le répertoire du théâtre d’ombres, rendant les héros du Mahābhārata familiers au point que le peuple les identifia aux ancêtres, surtout Aryuna, et en forma son premier cycle épique. Vers la même époque, croit-on, se situerait la conception d’un roman authentiquement javanais, relatant les aventures de Radén Panji (ou Hino) et de son amour pour une princesse de Janggala ; ce roman, également incorporé au répertoire du wayang, formera un cycle favori qui passera loin au-delà des frontières, jusqu’au Cambodge et aux pays thaïs.