Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hippocrate (suite)

Dans tous ces livres, l’esprit du texte a pour nous plus de valeur que les faits eux-mêmes. Ceux-ci, en effet, sont encore entachés de grossières erreurs, qui ne seront levées d’ailleurs qu’après de nombreux siècles. Ainsi Hippocrate reconnaît-il quatre humeurs principales : le sang, le phlegme, la bile jaune et la bile noire. Pour lui, la bonne santé résulte d’un heureux équilibre entre ces constituants. C’est l’excès ou le défaut de l’un d’eux qui engendre maladie et mort. De même, sa conception du système circulatoire est erronée, l’air étant, selon lui, l’élan vital nécessaire au mouvement du sang, auquel il vient se mêler... Mais, si toutes ces données restent imprécises pour l’auteur, on ne peut qu’admirer les réflexions que lui suggère une bonne observation d’influences diverses, telles que l’âge, les saisons et le climat. De ces hypothèses découlent des préceptes valables concernant l’hygiène de vie ou la diététique. Les connaissances anatomiques d’Hippocrate sont limitées, sauf en ostéologie. La chirurgie de l’époque reste ainsi un domaine à peu près inexploré, à l’exception de quelques trépanations, pour lesquelles Hippocrate semble avoir conçu un appareil. Pour l’orthopédie, il imagina un banc de bois porteur de treuils destinés à permettre la traction et la réduction des luxations et des fractures.

Sur le plan déontologique, son serment a été suffisamment omnivalent pour parvenir jusqu’à nous et rester valable dans ses moindres termes. Ce serment que les nouveaux médecins prononcent au seuil de leur carrière met en relief la nécessaire honnêteté du praticien, sa reconnaissance de l’enseignement reçu, son engagement à le transmettre aux générations nouvelles, sans omettre le principe du secret médical, qui garde encore aujourd’hui toute sa valeur malgré les tentatives d’ébranlement dont il est périodiquement l’objet.

Le tableau de ce chef d’école exceptionnel serait incomplet si l’on omettait son patriotisme farouche. Tous les faits concordent pour considérer comme une légende le fait d’avoir défendu Athènes contre la peste par l’implantation d’immenses bûchers. Par contre, Hippocrate aurait refusé d’être le médecin d’Artaxerxès malgré les présents somptueux que celui-ci lui offrait pour sa venue à la cour de Perse. Il refusa ces présents « de la part d’un ennemi de sa patrie ». Il est également plausible, toujours en raison de ces sentiments, qu’il ait obtenu une alliance de la Thessalie à la veille d’une guerre contre Athènes, évitant ainsi un douloureux combat. Tout cela explique qu’Hippocrate ait bénéficié dès son vivant d’un très grand prestige, qu’il est légitime de lui conserver de nos jours en raison des dons prémonitoires exceptionnels dont il fit preuve.

La médecine hippocratique

L’observation précise des faits, leur description objective, le refus des idées préconçues et surtout des théories échafaudées à partir de vues de l’esprit ont fait la valeur de l’enseignement d’Hippocrate. Certains signes ou symptômes décrits par lui restent encore d’une valeur entière. C’est ainsi que dans le langage médical actuel, on emploie toujours des expressions qui rappellent le nom du père de la médecine.

• Les doigts hippocratiques (qu’on désigne aussi sous l’expression hippocratisme digital) consistent en une déformation des dernières phalanges des doigts, en un épaississement de la pulpe et en un ongle convexe en « verre de montre ». Cette anomalie aurait une origine circulatoire et se voit surtout chez les insuffisants respiratoires chroniques, mais aussi dans quelques autres maladies, notamment digestives (cirrhoses, polyposes), pour lesquelles le mécanisme de la modification n’apparaît pas clairement.

• Le faciès hippocratique est l’aspect que prend le visage dans les heures qui précèdent l’agonie et qu’Hippocrate avait bien décrit.

• La succussion hippocratique est le bruit entendu en secouant le thorax d’un sujet ayant un épanchement de liquide et de gaz (hydropneumothorax) et produit par le conflit entre le liquide et l’air : ce signe est toujours valable, mais il n’est plus que rarement observé de nos jours du fait du recul considérable de la tuberculose.

J.-C. Le P.

 R. Joly, Hippocrate, médecine grecque (Gallimard, 1964) ; le Niveau de la science hippocratique (Les Belles Lettres, 1966). / M. Martiny, Hippocrate et la médecine (Fayard, 1964). / R. Baccou, Hippocrate (Seghers, 1969).

Hirohito

(Tōkyō 1901), empereur du Japon (1926).



Introduction

L’empereur Hirohito est, selon la tradition historique japonaise, le 124e empereur descendant en ligne directe d’Amaterasu Ōmikami, la déesse shintō du Soleil. Bien qu’il ait renoncé en 1945 à son appartenance divine et qu’il l’ait annoncé publiquement le 1er janvier 1946, il n’en demeure pas moins, aux yeux de son peuple, comme l’autorité la plus sacrée du Japon.

Né le 29 avril 1901 (ce jour anniversaire est toujours célébré avec ferveur par le peuple japonais) et nommé tout d’abord prince Michi no Miya, il eut pour précepteurs le général K. M. Nogi (qui se suicida lors des funérailles de l’empereur Meiji, en 1912, pour ne pas survivre à son maître), puis l’amiral H. Tōgō, le vainqueur, en 1905, des Russes à Tsushima. Il fit ses études à l’école des Pairs, institut spécialement créé pour son éducation. En 1917, il se fiança à la fille aînée du prince impérial Kuni Kuniyoshi, Nagako, qu’il n’épousera que sept années plus tard, en 1924. Entre-temps, le prince héritier (son père, l’empereur Taishō, régnant depuis 1912) fit un voyage d’études de six mois en Europe (1921), visitant successivement le Royaume-Uni, la France, la Belgique, les Pays-Bas et l’Italie. À son retour au Japon, son père étant malade et ne pouvant plus assurer les charges de l’empire, il fut nommé régent.

En 1926, l’empereur Taishō étant décédé, Hirohito lui succéda sur le trône. L’empereur et son épouse (née en 1903) eurent sept enfants, cinq princesses et deux princes. Le prince héritier, Akihito (né le 23 décembre 1933), épousa en 1959 une jeune fille d’origine non noble, Michiko Shōda. Il se rendit de nombreuses fois à l’étranger.