Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

habeas corpus [ad subjiciendum] (suite)

Les grandes étapes de la protection des libertés individuelles en Angleterre

Première étape

1215

la Grande Charte

v. 1302

apparition du writ d’habeas corpus

1627

l’affaire Darnel

Deuxième étape

1628

la Pétition des droits limite la prérogative royale

1629-1640

renvoi du Parlement par Charles Ier : « la longue tyrannie »

1649

exécution de Charles Ier

1649-1679

lutte de Charles II pour rétablir l’absolutisme royal

1679

l’Habeas Corpus Act

1689

Bill of Rights

Troisième étape

1816

deuxième Habeas Corpus Act

1914-1915

Defence of the Realm Acts

1939

Emergency Powers Defence Act

Quatrième étape

1960

Administration of Justice Act

habillement

Ensemble des vêtements et des accessoires qui les accompagnent.



Du vertugadin à la tournure

Engendré par la nécessité de se protéger des intempéries, l’habillement ne garda pas longtemps ce caractère strictement utilitaire. Devenu parure, il prit valeur de signe : l’histoire de son évolution (v. costume) n’est que le reflet des conventions morales ou sociales et du niveau économique des sociétés dont il est issu. À ce titre, il fait partie intégrante de la culture d’une époque.

C’est au nom de la morale, en accord avec une certaine vision du christianisme, que l’Église médiévale condamna le port de vêtements qu’elle jugeait incompatibles avec la décence et, surtout, avec l’image de la femme, inspirée de celle de la Vierge, qu’elle voulait imposer. Là, comme ailleurs, il fallait prévenir l’influence du Malin ; les vastes échancrures largement ouvertes aux flancs des surcots sur une cotte moulante ne pouvaient être que les « fenêtres de l’enfer », et la longue pointe des poulaines que « l’ergot du diable », difformité « imaginée en dérision de Dieu et de la Sainte Église ». Les chemises brodées mises en valeur sous la cotte largement découpée, elle-même recouverte d’un simple manteau, valurent à leurs fabricants les imprécations du futur cardinal Jacques de Vitry. Les prédicateurs restèrent indifférents à la grâce ailée des hennins, tel le frère Thomas Couette, cité par Enguerrand de Monstrelet, qui « blasmoit et diffamoit très fort les femmes de noble lignée et aultres, de quelque estat qu’elles fussent, portant sur leurs testes haults atours ».

Insensibles aux foudres de l’Église, les femmes tirèrent parti du vêtement au profit de leur silhouette, ce qui explique sans doute la permanence dans le costume féminin, dès qu’il se différencie de celui de l’homme, de ce qu’on pourrait appeler la « ligne amphore », et cela du xive s., moment où la taille commence à se creuser, jusqu’aux années 1920, où la robe tube de la garçonne libérera la femme de l’étranglement du corset et de l’encombrement de la tournure. Celle-ci représentait l’ultime phase des divers artifices inventés pour accentuer la rondeur des hanches, depuis le vertugadin en passant par la robe à paniers et la crinoline, tandis que la basquine, puis le corps piqué en pointe et le corps à baleines, ancêtre du corset, faisaient ressortir la finesse de la taille.

La mode masculine n’était pas davantage à l’abri des traits de l’Église, qui veillait à lui conserver, selon les canons d’alors, son caractère viril. Ces canons varièrent avec le temps : alors qu’en 1100 l’Église avait protesté contre l’allongement du costume masculin, signe de mollesse à ses yeux, en 1356 elle s’oppose aux « gens de robe courte », qui, en dépit des anathèmes lancés contre eux, finissent par l’emporter sur les « gens de robe longue ».

Le costume servit, également, le souci de hiérarchisation sociale. Codifié dans ses moindres détails, il permit de distinguer le clerc du laïque, le militaire du civil et, de façon plus libre mais plus subtile, d’étaler aux yeux de tous le rang social. Dès le Moyen Âge, les seigneurs décidèrent de faire figurer leurs armoiries sur leurs vêtements et, au fur et à mesure de l’évolution de la mode, la somptuosité des étoffes et la richesse de l’ornementation servirent un luxe ostentatoire. La tentation fut grande d’afficher un rang supérieur au sien, et de folles dépenses furent engagées à cet effet tant à la Cour que dans la bourgeoisie. Le pouvoir royal dut s’interposer pour éviter de tels abus et endiguer le flot des dépenses : l’histoire de la monarchie française est jalonnée d’édits somptuaires dont le but était de réglementer l’habillement en fonction de la condition sociale, mais qui restèrent, pour la plupart, lettre morte. L’édit somptuaire du 17 décembre 1485, signé par Charles VIII, précise que les draps d’or et de soie sont interdits à tous, les soieries permises aux gentilshommes justifiant d’un revenu déterminé, et le velours réservé aux écuyers. Les rois étaient les premiers à enfreindre les lois, ce qui amènera Montaigne à écrire : « Que les rois commencent à quitter ces dépenses... nous irons tous aprèz. » Au xviie s., sous Louis XIV, on ira jusqu’à fixer la longueur des traînes en fonction de la qualité de celle qui la porte.

Le souci de hiérarchie sociale, doublé de celui de respectabilité, incitera les femmes de la bonne société à se démarquer des courtisanes par certains détails vestimentaires : ainsi, le port de la ceinture dorée fut interdit, au xve s., aux courtisanes, et, au début du xxe s., le sac à main fut plutôt réservé aux femmes de mœurs légères, les autres se contentant, alors, d’un simple porte-cartes.

Les contacts avec l’étranger, entraînés par les guerres, contribuèrent à renouveler l’habillement français : les Anglaises, qui accompagnent les troupes de la guerre de Cent Ans, font découvrir aux Françaises le corset fendu ; les guerres d’Italie révèlent la somptuosité des soieries et des velours italiens et amènent les Français à délaisser la robe pour le pourpoint serré à la taille, ce qui ne laisse pas d’inquiéter Jean Marot :
De s’accoustrer ainsi qu’une Lucrèce
À la Lombarde ou à la façon de Grèce
Il m’est advis qu’il ne se peut bien faire
Honnestement.
Les élégantes du premier Empire feront revivre, avec leurs robes aux longs plis flottants, les tuniques de l’Antiquité ; on s’habillera « à la russe » en 1817, et, en 1819, on arborera le chapeau « à la Bolívar ».