gallicanisme (suite)
Le second, se référant au concile œcuménique de Constance, proclamait la supériorité du concile général sur le pape. Le troisième fondait sur les traditions et les constitutions particulières au royaume de France l’autonomie et l’originalité de cette Église face au pouvoir pontifical. Le quatrième ne faisait que tirer des conséquences pratiques de la théorie conciliaire énoncée dans le deuxième article.
En fait, la Déclaration de 1682 ne présentait aucune innovation par rapport à l’avis doctrinal de la Sorbonne de 1663. Elle prenait une importance particulière du fait d’être présentée officiellement, car un édit royal l’érigeait en loi le 22 mars 1682.
Que penser de la sincérité de cette déclaration ? Il semble peu douteux, selon les meilleurs historiens, que, laissés à eux-mêmes, les prélats eussent préféré garder le silence, ne serait-ce que par opportunité. Quant au fond doctrinal, nombreux étaient-ils, même parmi ceux qui n’étaient pas partisans de sa proclamation, qui le croyaient vrai.
L’unanimité se fit sur le premier article ; les répugnances eurent pour objet les trois derniers, envers lesquels les critiques furent nombreuses. Personne, par contre, ne mit en doute l’absolue indépendance du roi dans les affaires temporelles. La Sorbonne, également, parfaitement d’accord sur le premier article, enregistra difficilement la déclaration parce qu’elle mesurait au chef de l’Église l’autorité dans le domaine spirituel.
Rome, par prudence, réagit fermement mais sans violence. Innocent XI condamna les décisions prises à propos de la régale. De plus, il rédigea un bref, proclamant la nullité de la Déclaration de 1682. Il fut publié par son successeur, Alexandre VIII (1689-1691). Sous le pontificat d’Innocent XII (1691-1700), la pression des événements politiques (guerres contre l’Europe) amena Louis XIV à assouplir sa position et les évêques à se rétracter, au moins pour la forme.
La doctrine gallicane subsista cependant en France jusqu’au xixe s., soutenue principalement au xviiie s. par le parlement ; elle culmina avec la Constitution civile du clergé, au moment de la Révolution, et avec les articles organiques annexés, par la volonté de Bonaparte, au Concordat de 1801. Paradoxalement, en asservissant les libertés de l’Église de France à l’absolutisme gouvernemental, le Concordat permit à la papauté de reprendre, sur le plan doctrinal et disciplinaire, le contrôle du clergé, contrôle qui fut définitivement assuré lorsque la séparation de l’Église et de l’État (1905) fit éclater les restes d’un gallicanisme depuis longtemps touché à mort par un ultramontanisme dont l’expression la plus éclatante avait été la proclamation du dogme de l’infaillibilité pontificale en 1872.
P. P. et P. R.
➙ Bossuet / Catholicisme / Concile / Église catholique ou romaine / France / Louis XIV.
V. Martin, les Origines du gallicanisme (Bloud et Gay, 1939 ; 2 vol.). / J. Orcibal, Louis XIV contre Innocent XI. Les appels au futur concile de 1688 (Vrin, 1949). / A. G. Martimort, le Gallicanisme de Bossuet (Éd. du Cerf, 1953). / P. Blet, le Clergé de France et la monarchie. Études sur les assemblées générales du clergé de 1615 à 1666 (Presses de l’Université grégorienne, Rome, 1960 ; 2 vol.). / R. Taveneaux, Jansénisme et politique (A. Colin, coll. « U », 1965).
