Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Franchet d’Esperey (Louis Félix) (suite)

Nommé maréchal de France en 1921, d’Esperey assure de 1923 à 1931 l’inspection des forces françaises d’Afrique du Nord et se donne à la réalisation des grandes liaisons transsahariennes. En quittant Gabès le 19 mars 1933 pour inaugurer avec Louis Audouin-Dubreuil la grande rocade Gabès-Agadir, il est victime d’un grave accident d’auto qui le réduit désormais à une demi-inaction. Elu en 1934 au fauteuil de Lyautey à l’Académie française, il sera profondément affecté par la défaite de 1940, qui l’amènera à se retirer dans le Tarn pour ne pas subir l’occupation allemande.

P. R. et P. D.

➙ Guerre mondiale (Première) / Macédoine (compagne de).

 P. Azan, Franchet d’Esperey (Flammarion, 1949).

Franck (César)

Compositeur et organiste français (Liège 1822 - Paris 1890).


La première moitié du xixe s. en France est dominée par divers courants, au centre desquels vient s’insérer la personnalité d’un jeune étranger qui fera peu à peu son chemin et forgera son art au temps du romantisme, quitte à devenir chef de file dans les dix dernières années de sa vie.

Parmi ces courants, dont il a peu ou prou subi l’influence, notons d’abord celui de l’art dramatique, qui, par l’intermédiaire de l’opéra ou de l’opéra-comique, est encore aux mains des Italiens et parfois des Allemands. Voici, non loin, le curieux et farouche Hector Berlioz, qui étonne les Français par un art fulgurant et emprunte quelque peu à Gluck, Spontini, Gossec et Beethoven. Un troisième courant est celui qui se greffe sur un nouvel instrument, le pianoforte, que révèlent aux Français de transcendants virtuoses comme Czerny, Thalberg, Moscheles, Chopin et Liszt. Enfin, un modeste mouvement, d’un classicisme raffiné, commence à se faire jour : il est alimenté par ceux qui découvrent la musique polyphonique du xvie s., les clavecinistes du xviie et du xviiie s., l’œuvre de Haydn et celle de Mozart. Ces musiciens défendent le chant grégorien, les vieux modes, et reçoivent les leçons du cantor de Leipzig, dont ils découvrent les œuvres une à une ; ils ont des défenseurs tels qu’Alexandre Choron, le prince de la Moskova, Louis Niedermeyer, J.-B. Laurens, enfin Alexandre Boëly et finalement Saint-Saëns. Ils cultivent l’orgue, le piano, la musique de chambre et bientôt la symphonie d’esprit classique.

C’est au centre de ces différents cercles, qui parfois se heurtent et souvent s’ignorent, que César Franck est appelé à faire ses premières armes.


La vie

Le père de César est issu d’une famille de l’ancien duché de Limbourg qui est venue après 1815 s’installer à Liège. Il y épouse en 1820 une Allemande d’Aix-la-Chapelle. Dans ce ménage naîtront deux fils, dont le père voudrait faire deux virtuoses. César entre comme pianiste et élève d’harmonie au Conservatoire de Liège, que dirige Joseph Daussoigne, un neveu de Méhul. En 1835, il émigre à Paris pour travailler l’écriture avec Anton Reicha. Au Conservatoire de Paris, il aura pour professeur de piano Pierre Zimmermann et Aimé Leborne pour professeur de composition. Il obtient successivement le grand prix de piano en 1838, le prix de fugue en 1840 et un deuxième prix d’orgue dans la classe de François Benoist en 1841. Après une tournée de concerts entreprise comme jeune virtuose du piano à la demande de son père, il s’installe définitivement à Paris en 1843. Il obtient l’orgue de chœur de Notre-Dame-de-Lorette (église dans laquelle il épouse, au moment des barricades de 1848, Félicité Saillot-Desmousseaux, issue d’une famille d’acteurs), occupe la tribune de Saint-Jean-Saint-François de 1851 à 1858, avant de passer à la nouvelle église Sainte-Clotilde, où il exerce durant deux années les fonctions de maître de chapelle. Puis, titulaire du grand Cavaillé-Coll de cette église, il va joindre à cette fonction le poste de professeur d’orgue au Conservatoire de Paris (1872).

Après avoir été naturalisé français, il ne vivra désormais que pour les disciples qu’il a formés et pour l’œuvre qu’il sent monter en lui. Sa bonté, sa compréhension, sa haute spiritualité ont assuré pendant trente ans un extraordinaire rayonnement à son enseignement, au point qu’il doit être tenu, dans le dernier tiers du xixe s., comme le plus grand chef d’école dont s’honore alors la France. Bornons-nous à rappeler ici le nom des principaux disciples sur lesquels s’exerce son influence : Alexis de Castillon, Arthur Coquard, Henri Duparc, Vincent d’Indy, Charles Bordes, Pierre de Bréville, Ernest Chausson, Guillaume Lekeu, sans compter les tout derniers, qui furent organistes pour la plupart : Guy Ropartz, Gabriel Pierné, Dynam-Victor Fumet, Louis Vierne, Henri Libert, Charles Tournemire.

En marge de son enseignement officiel, César Franck donnait des leçons dans des institutions privées à Paris (collège de Vaugirard, Augustins de l’Assomption, Jésuites) ou bien il participait comme pianiste à certaines auditions de musique de chambre à Orléans.


L’œuvre

Hormis le cercle de ses élèves et disciples, qui comprenaient leur maître et connaissaient sa valeur, César Franck recueillit fort peu de succès à Paris et ne connut jamais la gloire de son vivant. On s’est peut-être trompé en le présentant toujours sous des dehors mystiques et séraphiques. Sa modestie, son oubli de lui-même cachaient pourtant une âme romantique et passionnée. Il est étonnant de constater que son œuvre décrit une courbe ascendante continuelle, César Franck ayant cherché sa voie entre le piano et l’orgue (tout autant que Boëly, dont il apparaît comme le véritable successeur), entre la musique de chambre et la musique symphonique, entre l’art dramatique et l’art vocal religieux (messe, motet, oratorio). En bref, Franck a touché à toutes sortes de musiques, mais avec un bonheur souvent inégal. En dépit des encouragements de Liszt, que lui valent en sa jeunesse ses trios, il a, semble-t-il, mis longtemps à trouver sa personnalité. Celle-ci s’est décantée dans les dix dernières années de sa vie au contact de l’orgue, du piano et des cordes, au contact également de ses premiers élèves, dont il sollicitait toujours suggestions et réflexions. S’il a échoué dans l’art dramatique, pour lequel il n’était pas fait, il a excellé partout ailleurs.