Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

alpinisme (suite)

Elles tiennent :
— à l’éloignement. Il faut prévoir un déplacement de plusieurs mois, une marche d’approche de plusieurs semaines dans un terrain inconnu ou mal connu, ainsi que le séjour autour d’un camp de base situé à 3 000, 4 000 ou 5 000 m, qu’on essaie de rendre aussi confortable que possible, mais qui n’est jamais qu’un mauvais campement ;
— à la mise en œuvre d’un matériel et d’un équipement importants, transportés généralement à dos d’homme par une troupe atteignant souvent plusieurs centaines de coolies, avec toutes les conséquences de ravitaillement, d’organisation et de commandement que cela représente ;
— à l’altitude inhabituelle où se déroulent les expéditions. Déjà dans les Alpes, au-dessus de 4 000 m, bien des personnes, voire des alpinistes, ressentent les effets du mal des montagnes. Au-delà, il faut une longue acclimatation : l’organisme doit s’adapter aux exigences de l’altitude. L’altitude de 7 000 m est considérée comme la limite de l’acclimatation, c’est-à-dire qu’au-dessus de cette altitude les facteurs d’agression (particulièrement la raréfaction de l’oxygène) l’emportent sur les processus d’adaptation ; l’organisme va se détériorant, et cela d’autant plus qu’on prolonge le séjour. Ainsi tout effort prolongé reste pénible pour devenir littéralement harassant, même avec l’emploi de l’oxygène, au-dessus de 7 000 m. De plus, la forte altitude confère à la montagne des défenses supplémentaires : froid excessif, neige profonde, violence du vent, tempêtes et tourmentes, sans compter le danger à peu près constant des avalanches pour des neiges qui ne se soudent pas ;
— à l’immensité des versants, qui, pour l’Himālaya, sont à l’échelle 2 ou 3 par rapport aux Alpes, ce qui impose l’échelonnement de camps successifs, les navettes fréquentes pour les transports de vivres et de matériel, et l’obligation de relayer souvent l’équipe de tête.

L’accès aux plus hautes des montagnes ne peut être que le résultat des efforts de toute une équipe. L’esprit de solidarité semble être un des aspects les plus permanents de l’alpinisme, qui, en apparence, met en relief les qualités individuelles.

J. F.

 R. L. G. Irving, The Romance of Mountaineering (Londres, 1935 ; trad. fr. la Conquête de la montagne, Payot, 1936). / J. R. Ullman, High Conquest (Londres, 1942 ; trad. fr. la Grande Conquête, Arthaud, 1948). / C. Gos, l’Épopée alpestre. Histoire de la montagne et de l’alpinisme de l’Antiquité à nos jours (Attinger, Neuchâtel, 1946). / C. E. Engel, Histoire de l’alpinisme (éd. Je sers, Neuchâtel, 1951). / M. Herzog (sous la dir. de), la Montagne (Larousse, 1956). / H. de Ségogne et J. Couzy (sous la dir. de), les Alpinistes célèbres (Mazenod, 1956). / E. Shipton, Mountain Conquest (New York, 1966 ; trad. fr. la Conquête des sommets, éd. R. S. T., 1967). / P. Bessière, l’Alpinisme (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1967). / G. Rebuffat, Glace, neige et roc (Hachette, 1970) ; les Horizons gagnés (Denoël, 1975).

Alsace

Région économique de l’est de la France, sur le Rhin, correspondant administrativement aux départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ; 1 517 530 hab. (Alsaciens). Capit. Strasbourg.
Venant de l’ouest, le voyageur franchissant les Vosges découvre, par temps clair, un ensemble de paysages bien différents de ceux de la Lorraine voisine. Coincée entre les Vosges et le Rhin, l’Alsace est un ruban de terres fertiles où la vie agricole, urbaine et industrielle a été, comme dans le reste des pays rhénans, très précoce. Ce « beau jardin », selon l’expression de Louis XIV, par son peuplement, ses traditions, sa situation frontalière, présente une grande originalité. Le dialecte alémanique est encore parlé par plus des deux tiers de la population. Mais de région périphérique, par rapport à l’espace économique français, l’Alsace devient centrale par rapport à l’ensemble des pays de la C. E. E. Le Rhin est devenu, ainsi, une artère au lieu d’une frontière.


Géographie


Les paysages naturels

Sur le plan morphologique, l’Alsace constitue un élément de l’ensemble du fossé rhénan, qui s’individualisa au Tertiaire, déterminant d’ouest en est trois types principaux de paysages aux nuances multiples.

La montagne vosgienne présente deux aspects. Le soulèvement, plus accentué au sud, a amené l’affleurement du socle cristallin, qui, érodé par les cours d’eau, se présente sous forme de ballons (ballons d’Alsace, de Guebwiller). La couverture gréseuse a été conservée dans la partie moyenne : elle caractérise les Vosges du nord, beaucoup plus basses. Les cols sont nombreux, mais relativement élevés par rapport aux altitudes générales.

Les collines sous-vosgiennes sont les restes des couches basculées vers le centre de la plaine. Un réseau de failles les hache littéralement, amenant, sur peu de distance, une très grande variété de roches. Par leur exposition vers l’est, les collines sous-vosgiennes présentent, en plus d’une pédologie favorable des glacis quaternaires, des conditions propices à la viticulture. Il semble que la subsidence ne soit pas achevée. On a pu dater du Quaternaire quelques failles de cette région.

La plaine, au sens large, se compose d’au moins trois éléments : l’Ackerland (pays des labours), le Kochersberg et l’Unterland. Le premier correspond à la partie la plus basse, recouverte de lœss. Les dénivellations sont faibles, voire insignifiantes : c’est l’image classique de la plaine d’Alsace. Le Kochersberg correspond à une zone de collines, entre la Zorn et la Bruche, résultant du saupoudrage par du lœss sur les horsts de roches secondaires. Le lœss peut atteindre plusieurs mètres d’épaisseur et détermine, plus que le substratum, le paysage agricole. L’Unterland (appelé aussi Outre-Forêt, à cause de sa localisation au nord de la forêt de Haguenau) ressemble plutôt au Kochersberg qu’à l’Ackerland. Les sédiments tertiaires affleurent de temps à autre, mais sont généralement recouverts de lœss. Région naturellement riche, l’Unterland a longtemps souffert de sa situation isolée à l’extrémité de la France. Le Sundgau, dans le sud, est un élément du Jura au contact du fossé rhénan. Le Ried et la Hardt ont été déterminés par le Rhin. Le premier correspond à la plaine d’inondation du Rhin, qui, avant les travaux de régularisation entrepris au xixe s., était un milieu amphibie, peu favorable à la vie agricole, infesté de moustiques et fréquenté avec prédilection par les cigognes, qui trouvaient dans les eaux stagnantes une nourriture abondante et variée. La Hardt succède au Ried, vers l’amont. Elle est formée de terrasses graveleuses, édifiées par le Rhin au Quaternaire. Les arbres y dominent, et la Hardt est souvent synonyme de forêt. Quant à l’Alsace bossue (région de Sarre-Union), c’est déjà un coin de Lorraine, rattaché administrativement à l’Alsace en 1789 du fait de la prédominance du protestantisme, qui était plus important en Alsace qu’en Lorraine.