Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Florence (suite)

Les fonctions tertiaires l’emportent donc très nettement. Cependant, le tourisme n’y joue pas le rôle prédominant qu’on lui suppose. Il y a plus d’un million de touristes chaque année, dont la moitié d’étrangers, mais leur séjour est court (3 jours en moyenne), et moins de 2 p. 100 des Florentins vivent du tourisme. Florence est davantage une ville commerciale et administrative. Sur le plan commercial, la ville dessert toute la région, et les marchands commandent tout un réseau de productions à domicile destinées à l’exportation. Sur le plan administratif, la ville rassemble nombre de fonctionnaires, mais aussi des juristes, des notaires... Il y a également l’université, flanquée de riches bibliothèques (dont la Nazionale centrale) et de collections d’art. Cela a attiré des éditeurs importants. Un puissant journal régional, La Nazione, y a son siège.

Ces fonctions sont inséparables de l’activité générale du « bassin de Florence ». Un ensemble de 9 communes, dont Sesto Fiorentino, gravitent directement autour de Florence. Malgré certaines rivalités, la ville l’emporte sur ses voisines immédiates, comme Pistoia et surtout Prato (140 000 hab.), grand centre industriel de la laine. Mais Florence tend, en outre, à s’ériger en véritable métropole régionale. Par ses commerces de luxe, la gamme étendue des services du « tertiaire supérieur », elle est le principal foyer d’une région d’un million d’habitants. Son rayonnement culturel, ses maisons de haute couture, sa renommée touristique lui confèrent une audience internationale. Toutefois, elle n’est pas un centre de décision économique à l’échelon national et contrôle peu les entreprises industrielles toscanes. Un renforcement de son économie lui permettrait de devenir la métropole dont le besoin se fait sentir dans l’Italie centrale.

E. D.

➙ Toscane.


L’histoire de Florence


Les origines antiques

Le site est peuplé du xe au viiie s. av. J.-C. par des Indo-Européens, les Italiotes. Abandonné du vie au iie s. av. J.-C. par les Étrusques, qui s’établissent à Faesulae (Fiesole), il est réoccupé par une agglomération que détruit Sulla à l’issue de la révolte de 82 av. J.-C. Peu après, les vétérans de César y fondent au confluent de l’Arno et du Mugnone, sans doute au printemps de 59 av. J.-C., au temps des ludi Florales, une colonie qui leur doit son nom : Florentia, la « florissante ». Tout entière située sur la rive droite, la colonie romaine est construite sur le modèle d’un castrum militaire ceint de deux kilomètres de murailles précédées de fossés.

De plan presque carré, la ville, d’une superficie de 20 ha, est d’ailleurs parfaitement orientée, car elle est dotée d’un decumanus est-ouest et d’un cardo maximus nord-sud qui, par-delà la porte du Midi, se prolonge jusqu’à un pont situé à quelques mètres de l’actuel Ponte Vecchio, mais qui ne devient permanent qu’au ier s. apr. J.-C. Au croisement à angle droit de ces deux axes s’élargit le forum (actuelle piazza della Repubblica).

Carrefour routier important, accessible depuis la mer par voie d’eau, Florence accueille alors avec faveur, sans doute par le relais de Pise, les commerçants orientaux et leurs produits, leurs idées et leurs religions (culte d’Isis au ier s. apr. J.-C. ; christianisme au iie s. apr. J.-C.). La ville enrichie, débordant hors de son enceinte, comprend sans doute à la fin du iie s. apr. J.-C. environ 10 000 habitants.


Le temps des crises (iiie-viiie s.)

Cette prospérité se trouve rapidement ébranlée par la crise religieuse du iiie s., qui repousse jusqu’au début du ive s. la désignation du premier évêque connu de la ville, Félix, et jusqu’en 393 la consécration par saint Ambroise de la première cathédrale : San Lorenzo, sise hors les murs. En partie détruite en 552 par l’Ostrogoth Totila, qui a submergé l’enceinte byzantine édifiée en 541-544, la ville est annexée par les Lombards après 570 et dotée par eux, après leur conversion au viie s., de deux sanctuaires, l’un dédié à saint Michel, patron des occupants, l’autre à saint Jean-Baptiste. Mais éclipsée économiquement par Pise et administrativement par Lucques, Florence décline jusqu’au viiie s.


Le temps de l’émancipation (ixe-xiie s.)

Capitale du comté et de l’évêché carolingiens de Florence, la ville ne revit qu’au ixe s., lorsque Lothaire Ier en fait le centre d’un nouveau comté de Florence. Ce contado s’étend de la crête de l’Apennin jusqu’aux abords immédiats de Sienne et est de ce fait le plus vaste de toute la Toscane ; il reste dans la main du marquis de Toscane, qui se fait représenter dans son chef-lieu par un vicomte. Bénéficiant d’un important apport humain de contadini, fuyant les invasions hongroises au xe s., Florence doit être alors pourvue d’une troisième enceinte, englobant le faubourg, qui se développe au sud de l’Arno. Aussi le marquis Hugues (Ugo) décide-t-il d’y transférer sa résidence, jusque-là fixée à Lucques. Capitale administrative de la Toscane, Florence en devient le principal centre religieux et artistique.

Archevêque de cette ville de 1046 à 1059, le futur Nicolas II y accueille le concile réformateur de 1055, que préside le pape Victor II. L’effort de réformation est interrompu par l’épiscopat d’un Lombard simoniaque, Pietro Mezzabarba (1061-1069), mais il reprend sous la direction de Mathilde, fille de Béatrice de Toscane et épouse de Godefroi le Bossu. Restée seule marquise de Toscane en 1076, celle-ci apporte son soutien au pape Grégoire VII (1073-1085), dont elle favorise la réconciliation avec l’empereur Henri IV dans son château de Canossa en 1077. Le souverain allemand, qui ne lui pardonne pas son humiliation, la dépose solennellement en 1081, la contraignant à se réfugier dans le palais qu’elle possède hors des murs de Florence. Privilégiée par elle, cette ville résiste d’ailleurs victorieusement à Henri IV, qui l’assiège en juillet 1082.

Ainsi, le peuple de Florence, qui a imposé la réforme de l’Église, affirme sa puissance au sein de la communauté urbaine.