Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Flandre (suite)

Les villes flamandes se sont établies sur deux lignes ouest-est qui jalonnent les deux axes de circulation. La ligne méridionale est au contact entre la craie du Bassin parisien et les sables et argiles tertiaires ; c’est la ligne, non entièrement flamande, de Saint-Omer - Douai - Lille - Valenciennes ; la ligne septentrionale est au contact entre les sables et argiles tertiaires et les plaines maritimes et aussi la mer ; c’est la ligne Bruges - Gand (qui a eu la préférence au Moyen Âge).


Les campagnes

Ce qui marque le plus le paysage est la conséquence de l’importance des densités rurales ; la campagne a souvent un « aspect urbain ». Cela tient au caractère intensif de l’agriculture, aux industries disséminées et au fait que beaucoup de personnes travaillant dans les villes habitent la campagne ; cela tient aussi à ce que les constructions sont le plus souvent récentes.

Les fermes se dispersent sans ordre, tandis que les autres habitations se groupent en de très gros bourgs atteignant souvent plusieurs milliers d’habitants. Deux variantes : dans la plaine maritime, les fermes sont dispersées en ordre, le long des canaux ou des digues ; à l’est, les bourgs ont une forme linéaire. Les bâtiments des fermes entourent une cour, toutefois ils ne sont pas jointifs.

Les parcelles labourables ne sont pas encloses, mais les fermes sont entourées de quelques parcelles en herbe qui, elles, sont encloses par des haies, légèrement arborées, qui ferment le paysage. Au nord-est, dans le pays de Waes, le paysage est coupé de grands rideaux d’arbres.

L’exploitation a un caractère intensif ; la Flandre est, depuis le Moyen Âge, une des régions agricoles les plus riches du monde. En moyenne, l’herbe occupe 40 p. 100 des terres cultivées ; les céréales (blé, orge), le tiers ; des plantes industrielles (betterave et lin), 15 p. 100 ; s’y ajoutent des légumes, des fleurs, des endives, du houblon, des cultures sous verre. Au nord, la Flandre sablonneuse se distingue par l’importance plus grande des bois et de l’herbe ; par contre, il y a moins de plantes industrielles ou de céréales. Le faire-valoir indirect prédomine. Les exploitations sont petites (en 1960, les exploitations de moins de 5 ha occupaient encore plus de la moitié des terres cultivées), ce qui pose des problèmes de réadaptation.

Cette région, qui fut l’une des plus prospères du monde, parfois la plus riche depuis le Moyen Âge, a connu, depuis quelques années, des difficultés diverses selon les sous-régions. Elle trouve aujourd’hui de nouvelles orientations dans tous les États et se prépare à jouer de nouveau un rôle important dans l’Europe du Nord-Ouest.

A. G.


L’histoire


Les origines

Habité sans doute dès le Magdalénien, le futur comté de Flandre se peuple progressivement au Néolithique (cités lacustres des bas champs, mégalithes de Cambrai). Occupé finalement par les tribus belges des Ménapiens et des Morins — regroupées respectivement autour de Cassel et de Thérouanne —, le pays est conquis par César entre 57 et 54 av. J.-C. et incorporé successivement aux provinces de Belgique au ier s. av. J.-C. et de Belgique Seconde à la fin du iiie s. apr. J.-C. La contrée est ensuite occupée vers 430 par les Francs Saliens, qui en font la base de leur expansion territoriale en Gaule. En partie ruinée, traversée par la frontière linguistique romano-germanique selon le tracé Boulogne-Tournai-Meuse, la Flandre est évangélisée aux vie et viie s. par saint Bertin, saint Winoc, saint Amand, fondateurs des abbayes de Saint-Omer, de Bergues et de Saint-Amand. Elle retrouve alors une certaine prospérité agricole (multiplication des petites exploitations indépendantes et artisanales, ateliers monétaires à Thérouanne, Cambrai et Tournai). Cette prospérité est d’ailleurs stimulée du viie au xe s. par la reprise de la navigation en mer du Nord. Quentowic est alors très fréquenté par les marchands frisons et saxons. Mais, au ixe s., les pillages dano-normands entraînent leur repli vers Montreuil-sur-Mer et Saint-Omer, dont l’essor se situe au xe et au xie s.


Constitution et évolution territoriale du comté

Face à ce danger, les comtes et les abbés entreprennent de fortifier les agglomérations, notamment Tournai et Saint-Omer, qui résistent à une incursion normande en 892. En même temps, Charles II le Chauve constitue la région en marche au profit de son gendre Baudouin Ier Bras-de-Fer (879), considéré habituellement comme le premier comte de Flandre, du nom d’un comté carolingien, le « pagus Flandrensis », localisé entre l’actuelle ville de Bruges et l’embouchure de l’Yser, et qui depuis 843 fait partie de la Francia occidentalis.

Son fils Baudouin II le Chauve (879-918) annexe après 892 le Ternois, le Boulonnais et le Tournaisis, sans Tournai, et à une date incertaine les comtés de Gand et de Waes à la faveur des luttes intestines opposant Charles III le Simple à Eudes. Adversaire des Robertiens et des Normands, Arnould Ier le Grand (918-965), fils de Baudouin II, occupe l’Artois en 932, Montreuil-sur-Mer en 948, l’Ostrevent au plus tard en 952. À sa mort, en 965, ces dernières conquêtes passent directement ou indirectement dans la main du roi, à l’exception de la côte au nord de l’estuaire de la Canche. Dès lors, le sud de la principauté se désintègre jusqu’au milieu du xie s. en plusieurs comtés (Boulogne, Ternois) et seigneuries haut-justicières (Béthune, Lens, Aubigny, Lillers).

En recul au sud, la principauté s’étend par contre vers l’est aux dépens du Lothier sous l’impulsion de Baudouin IV le Barbu (988-1035) et de Baudouin V le Pieux (1035-1067). Débordant les limites du royaume de France, ceux-ci annexent les terres brabançonnes entre Escaut et Dendre, Walcheren et les îles de la Zélande occidentale, enfin les Quatre-Mestiers, en voie d’exondation.

Ainsi se constitue une Flandre impériale, dont ses maîtres doivent reconnaître en 1056 qu’ils la tiennent en fiel de l’empereur Henri IV, à l’heure même où ils la concèdent à leur tour à des vassaux dont les principaux sont les seigneurs de Bornem, de Termonde et d’Alost.