Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Flandre (suite)

Mais la Flandre n’est pas un « pays d’argile » : le sous-sol est recouvert de dépôts superficiels, épais de 3 à 7 m, qui ont partiellement fossilisé le relief lors des glaciations. Ces dépôts évoluent du nord au sud : plus grossiers, sableux au nord (où, de plus, le sous-sol est aussi plus sableux), ils sont limono-sableux au sud d’une ligne Bruges-Gand pour devenir ensuite limoneux. Aussi la fertilité augmente-t-elle du nord au sud. La Vallée flamande résulte du comblement d’une « vallée » creusée à – 10-15 m entre les deux glaciations Riss et Würm.


La population

Près de 4 millions de personnes vivent sur un peu plus de 9 000 km2 (densité moyenne de 420 ; densités rurales presque toujours supérieures à 100). Au Moyen Âge, déjà, c’était la région la plus peuplée du monde. Pays de forte natalité, elle devient un foyer d’émigration quand l’activité économique ralentit. Dans le Flamand cohabitent deux personnages : l’un est rationnel, il a le sens des affaires, de la discipline, éprouve de la joie à bâtir ce qui est rentable ; l’autre est celui qui explose dans les kermesses, se déchaîne dans le baroque et le surréalisme.


Le carrefour

Le moteur de la richesse, c’est la circulation : les routes terrestres s’avancent sur les collines jusqu’aux bras de mer qui pénétraient dans ces collines, tels le Zwyn (ou Zwin) au Moyen Âge ou l’Escaut occidental plus tard. Là convergeaient les routes venant du nord (la route hanséatique), d’Autriche, de France vers une mer qui est la plus fréquentée du monde depuis le xiie s. La principale route terrestre est celle qui, allant de la mer à Cologne, court-circuite par un tracé méridional la boucle que dessinent la Meuse et le Rhin : « La Flandre, c’est essentiellement ce court-circuitage. »

La grande période fut celle où Bruges était, grâce à ce trajet, du xiiie au xve s., le premier port du monde. À partir du xve s., la géographie, la technique et l’histoire provoquent un déclin : la mer recule, le tonnage des bateaux augmente, l’Empire soutient Anvers, les routes ouest-est empruntent des tracés plus septentrionaux, enfin les Pays-Bas indépendants vont prendre la partie riveraine de l’Escaut, ne laissant à la Flandre qu’une portion congrue de littoral.

Les réactions vont venir peu à peu. Très tôt, la partie française établit son port : Dunkerque. Gand réussit à passer à travers les Pays-Bas grâce au canal de Terneuzen ; au début du xxe s., Bruges crée un avant-port : Zeebrugge. Mais ce n’est que vers 1955-1965 que s’opère le vrai réveil : partie méridionale du delta du Rhin, la Flandre réalise qu’elle est remarquablement bien placée pour accueillir les navires de grand tonnage : Zeebrugge a des projets pour accueillir les 125 000 t, Dunkerque est devenu aujourd’hui accessible aux 300 000 t. La Flandre tente d’attirer la circulation ouest-est et s’affirme porte d’entrée de l’Europe. Généralement bien pourvues de voies ferrées, les régions flamandes ont pris beaucoup de retard dans l’aménagement des voies d’eau et des autoroutes. Valorisant la base de leur vocation géographique, elles s’efforcent de rattraper ce grave retard.

La mer et ses plages de sable, c’est aussi le tourisme, la principale richesse pour la côte de la Flandre belge, qui bénéficie de près de 15 millions de nuitées.


Les industries

La circulation, une main-d’œuvre rurale abondante firent de la Flandre le grand foyer lainier du Moyen Âge, et elle est restée le principal centre textile du monde. La laine s’est concentrée à Roubaix-Tourcoing et dans la partie belge limitrophe ; le coton, à Lille et à Gand, notamment ; le lin, le long de la Lys. De nombreuses autres industries se disséminent partout, plus concentrées toutefois le long des vallées : industries alimentaires, industries mécaniques, meubles, etc.

Au xixe s., un bassin houiller a favorisé la partie sud, et, comme cette partie est française, elle profite, à l’abri de la frontière, d’une foule d’avantages, attire les ouvriers de la Flandre belge, qui commencent par émigrer, puis se contentent de passer la frontière chaque jour (ce sont les frontaliers). En Belgique, le charbon se trouve en Wallonie et, un peu plus tard, il est exploité en Campine ; l’économie de la Flandre belge connaît un palier, et sa population n’est pas seulement attirée par la France, mais aussi par la Wallonie, puis, de plus en plus, par l’axe Anvers-Bruxelles, qui la borde à l’est. Quant à la Flandre zélandaise, enclavée entre la Belgique et l’Escaut, son développement est plus réduit.

Dans la seconde moitié du xxe s., une nouvelle période industrielle commence. En une décennie, trois transformations ont lieu. Ce sont d’abord les Belges qui créent de nombreux pôles de développement. C’est ensuite dans le Sud, français, la récession houillère et la nécessité d’une reconversion. La troisième transformation est le phénomène de l’industrialisation portuaire. En France, Usinor s’installe à Dunkerque, mais la véritable industrialisation se fait attendre, semblant amorcée enfin en 1970. En Belgique, il faudra préserver le tourisme : la Flandre belge n’a pratiquement pas de côte non occupée par le tourisme. Par contre, la Flandre zélandaise développe autour de Terneuzen une puissante zone industrielle. Ainsi, l’industrie flamande est en pleine mutation et connaît un développement très important. Mais le textile et le charbon reculent devant de nouvelles activités.


Les villes

Un des traits fondamentaux de la Flandre réside dans son haut degré d’urbanisation, mais aussi dans l’originalité de ses villes. Celles-ci sont nombreuses et donc assez proches les unes des autres (10 à 20 km). Chacune a aussi un riche passé historique et une tradition de liberté communale. Le niveau d’équipement est généralement élevé (du moins en Belgique). C’est une structure polynucléaire (très différente de la structure urbaine du reste de la France) et qui se rapproche, mais avec des densités plus faibles, de la structure du Randstad Holland. Le tissu urbain est plus serré en France à cause de la frontière et du charbon, alors que la Flandre belge subissait la concurrence de Bruxelles et d’Anvers.