Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

États-Unis (suite)

Cette inflexion s’inscrit sans doute dans le cadre des négociations poursuivies avec les Soviétiques et qui aboutiront au traité de non-prolifération des armes nucléaires (1968) et surtout aux conversations sur la limitation des armements stratégiques. Les négociations Salt, menées à Helsinki et à Vienne de 1969 à 1972, sont conclues par le traité américano-soviétique signé à Moscou le 26 mai 1972, qui limite les armements stratégiques défensifs et offensifs des deux pays.

Toutefois, de 1965 à 1973, le problème qui a dominé la politique de défense des États-Unis a été celui de leur engagement au Viêt-nam*, où les effectifs américains passèrent de 100 000 hommes au début de 1965 à 540 000 en 1969. Cet effort considérable, qui entraîna une véritable mobilisation, fut de plus en plus contesté aux États-Unis, où il donna lieu à des manifestations pacifistes en constante progression. Il provoqua en outre une crise morale sérieuse dans l’armée américaine. Déjà le président Johnson avait amorcé la désescalade en arrêtant les bombardements sur le Viêt-nam du Nord (1968). Son successeur remplaça progressivement les forces américaines par des unités sud-vietnamiennes, ce qui permit de ramener les effectifs américains au Viêt-nam en 1971 à 317 000 hommes, puis au cours de l’été de 1972 à moins de 40 000 hommes, bénéficiant, il est vrai, d’un puissant soutien aérien et naval (VIIe flotte). En 1973, l’accord de cessez-le-feu prélude au retrait des forces américaines au Viêt-nam, si bien qu’à la fin de l’année l’effectif des militaires américains servant outre-mer était ramené à 480 000 hommes, dont 280 000 en Europe. Ce désengagement au Viêt-nam ne constituait qu’un aspect de la doctrine Nixon, qui attache un grand prix à la concertation avec l’U. R. S. S. Cette dernière s’inscrit dans le cadre des négociations SALT qui tentent périodiquement de réajuster entre Américains et Soviétiques l’équilibre stratégique. Mais la politique américaine demeure ferme ; pour dissuader l’U. R. S. S. de toute intervention militaire au Moyen-Orient à l’occasion de la 4e guerre israélo-arabe, Nixon n’hésite pas à mettre en alerte les forces nucléaires stratégiques américaines.

À la suite de l’éviction brutale de toute présence américaine au Viêt-nam comme au Cambodge (avr. 1975), Washington s’efforce de rassurer ses Alliés. Pour montrer la continuité de ses vues avec la déclaration des nations membres du Pacte atlantique, signée par Nixon à Bruxelles en 1974 et qui réaffirmait l’importance de la présence des troupes américaines en Europe, le président Ford tient à venir lui-même diriger, en mai 1975, la séance du Conseil atlantique à Bruxelles.

Au moment où s’achève l’administration républicaine, le nouveau président démocrate Carter adresse un message au conseil de l’O. T. A. N. réuni en décembre 1976 : il y affirme sa volonté de renforcer l’Alliance atlantique en laquelle il voit « un instrument essentiel de la sécurité des États-Unis ».

B. de B.

➙ Asie du Sud-Est (Organisation du traité de l’) / Atlantique Nord (traité de l’) / Défense / Désarmement / Europe / Missile / Sous-marin / Stratégie / U. R. S. S.


La littérature américaine

« Ce pays doit se distinguer par sa supériorité littéraire comme il l’a déjà fait par la libéralité de ses institutions civiles et religieuses. » Ainsi parlait le lexicographe américain N. Webster en 1820. Mais, en 1820, quarante ans après l’indépendance, deux siècles après l’arrivée du Mayflower, trois siècles après Christophe Colomb, l’Amérique n’avait pas de littérature. La littérature américaine commence au xixe s. Son histoire est d’abord celle de ses difficultés. Pendant plus d’un siècle, les treize colonies anglaises de la côte est n’eurent pas de conscience nationale. On était carolinien ou virginien avant d’être américain. La dispersion des colons et leur mentalité, plus que l’analphabétisme et les difficultés d’existence, contribuent au retard culturel. Dans le Nord, où tous savent lire parce que la lecture de la Bible est un devoir, le puritanisme condamne tout livre non religieux. Dans le Sud, plus riche, les planteurs, en aristocrates britanniques, font instruire leurs fils à Oxford et ne lisent que des livres importés. Enfin, l’absence de copyright international entrave la naissance d’une littérature américaine : un éditeur préfère pirater les succès anglais que prendre des risques avec des inconnus américains. « Dans les lettres comme dans la politique, nous avons besoin d’une déclaration d’indépendance », écrit Edgar Poe en 1840. Dans ce pays, qui n’était plus une colonie et pas encore une nation, la littérature s’importait ou copiait l’Europe.


La période coloniale

Les premiers écrits américains sont des récits d’exploration, des traités d’économie et d’agriculture, des manuels religieux ou politiques. Mais, derrière les exposés techniques, on devine le rêve d’un Nouveau Monde plus juste, plus beau, plus libre, où l’homme retrouverait un paradis perdu dont la Prairie est le symbole. John Smith (1579-1631) publie à Londres en 1608 une description de la Virginie, suivie d’une Description of New England en 1616. Ainsi, chacune des colonies inspire un livre, souvent financé par une compagnie coloniale : Daniel Denton décrit le New York en 1670, William Penn la Pennsylvanie en 1681, Ashe la Caroline en 1682.

À l’économie se mêlent bientôt la politique et le religieux, étroitement liés pour les puritains. William Bradford (v. 1590-1657), débarqué en Nouvelle-Angleterre en 1620, dans son History of Plymouth, rompt avec l’anglicanisme. « Séparatiste », il affirme en style biblique que la rupture avec l’Angleterre est un exode vers la Terre promise, qui aura des conséquences religieuses et politiques. Plus radical encore, Roger Williams (v. 1603-1683) prêche dans ses pamphlets (1643-1652) la tolérance et la démocratie. La littérature américaine gardera ce caractère engagé et « protestant ». Dans cette masse de tracts et de sermons, on distingue Cotton Mather (v. 1663-1728), dont les 459 ouvrages traitent de politique et de morale, de botanique et de sorcellerie. Sa somme, Magnalia Christi Americana, est l’encyclopédie puritaine du Nouveau Monde.