Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Équateur (suite)

La vie économique

L’Équateur reste, avant tout, un pays agricole. L’agriculture est fondée sur l’opposition de la grande propriété, consacrée aux cultures d’exportation, et d’une toute petite propriété individuelle ou communautaire. La petite propriété individuelle est due à la colonisation récente, la petite propriété communautaire à la survivance d’anciennes communautés indiennes. Un recensement effectué dans les montagnes équatoriennes a révélé l’existence de 900 communautés traditionnelles.

La plaine côtière reçut les premières plantations de cacao, dont l’Équateur fut le premier exportateur mondial jusqu’au début du xxe s. Ensuite, les cultures se diversifièrent : une partie des plantations de cacao fut transformée en plantations de banane avec la pénétration des compagnies américaines, et en particulier de l’United Fruit Company. On trouve aussi des cultures de canne à sucre et de riz. Les compagnies américaines tendent actuellement à revendre leurs plantations aux grands propriétaires équatoriens et se contentent de contrôler la commercialisation de la banane. La culture du café, qui se pratique sur le piémont andin, reste, contrairement aux autres cultures d’exportation, aux mains de petits propriétaires. Dans la montagne andine, ce sont les cultures vivrières qui prédominent. La diversité des conditions naturelles entraîne des différences considérables de mise en valeur et une variation de la combinaison agriculture-élevage. Le climat, très sec dans le Sud, rend l’irrigation nécessaire : cependant, l’encaissement des vallées permet, grâce à des températures assez élevées, la culture des fruits et de la canne à sucre quand les paysans peuvent utiliser l’eau des rivières pour l’irrigation. Dans le reste des Andes, les différents bassins constituent autant de zones de cultures variées où alternent le maïs, l’orge, le blé, la pomme de terre, l’élevage des bovins ou des moutons. De part et d’autre de ces bassins, les versants des deux sierras sont cultivés jusqu’à 3 400 ou 4 000 m d’altitude, zone dite « des páramos », où la végétation naturelle dominante, qui est la steppe, permet l’élevage, en particulier des moutons. La culture de l’orge et de la pomme de terre est encore possible malgré la rigueur des températures, grâce aux précipitations. Au-dessus de 4 000 m, le chaparro, qui s’intercale entre les páramos et la zone des neiges éternelles, ne permet plus les cultures. La plaine amazonienne ne fait pas l’objet d’une mise en valeur moderne. Les petits groupes qui ont participé à cette colonisation spontanée pratiquent l’autosubsistance et la cueillette des fruits de la forêt. La pêche entretient une activité non négligeable, l’océan Pacifique étant très poissonneux au large de l’Équateur. L’exploitation du pétrole s’est récemment beaucoup développée et, surtout, offre d’intéressantes perspectives (déjà 10 Mt en 1974).

L’Équateur est faiblement industrialisé. À la production de biens d’usage et de consommation (textiles, produits chimiques et pharmaceutiques), il faut ajouter quelques industries de valorisation des produits agricoles, en particulier de la canne à sucre. L’Équateur a conservé une spécialité semi-artisanale au moins dans ses formes traditionnelles, la production du chapeau de paille dit « panama ».

À l’opposition naturelle et économique de la montagne et de la plaine côtière correspond la dissociation des fonctions de capitale entre deux villes : Quito, dans les Andes, qui remplit les fonctions de capitale politique ; Guayaquil, dans la plaine côtière, qui remplit celles de capitale économique.

L’art en Équateur

L’art colonial, en Équateur, se réduit à celui de la capitale, Quito, qui fut aussi le centre principal de l’ancienne audiencia.

La fusion des traditions hispaniques et des modes italiennes caractérise avant tout l’art du xvie s. : le plus bel exemple architectural de cette époque est le couvent de San Francisco de Quito (commencé v. 1535), avec ses éléments pris à la Renaissance et au maniérisme italiens. Dans ses lignes générales, l’architecture du xviie s. est encore sous la dépendance des modèles gravés d’origine européenne, comme on le voit aux frontispices de la Capilla de Villasis de San Francisco de Quito (1659) et du collège des Jésuites (v. 1650), inspirés notamment de motifs du palais Farnèse de Caprarola. Mais les modèles ne sont pas tous italiens : ils viennent aussi de l’architecture espagnole, dont la tradition s’affirme avec ses toits mudéjars, ses cloîtres d’inspiration sévillane et des motifs de décoration intérieure comme on en trouve à Grenade. Toutefois, au xviiie s., l’influence italienne passe au premier plan sur la façade de l’église de la Compañía de Jesús, avec ses motifs issus du baroque des Pouilles. Dans l’ensemble, le caractère spécifique de l’architecture coloniale de Quito est le raffinement technique qu’y a apporté un artisanat hautement qualifié, propre à une cité métropolitaine.

Quant à la sculpture, elle est au xvie s. d’inspiration espagnole, bien que certains éléments décoratifs soient empruntés au maniérisme flamand. L’âge d’or se situe au xviie s., sous le signe de l’école de Séville, dont l’influence est manifeste dans toute l’imagerie dorée et polychrome ; le plus connu des sculpteurs de cette époque est le père Carlos, disciple de Juan de Mesa et de Juan Martínez Montañés. Au xviiie s., il faut citer notamment Bernardo Legarda, auteur de l’image renommée de la Vierge de l’Apocalypse (1734) à San Francisco de Quito.

Le couvent de San Francisco fut au xvie s. le foyer de l’école picturale de Quito, dont l’art s’alimente aux sources italiennes et flamandes ; les frères Pedro Bedón (v. 1556-1621) et Mateo Pérez de Alesio (1547-1628) sont les deux représentants de ce maniérisme tardif, sans compter le peintre indien Adrián Sánchez Galque. Deux figures se détachent au xviie s. : Miguel de Santiago et son élève Nicolás Javier de Goríbar, le premier influencé par les gravures flamandes et présentant une certaine affinité avec Murillo, alors que le second s’inspire du Parmesan, non sans influences complémentaires de Ribera, de J. de Valdés Leal et de Murillo. Enfin, les maîtres du xviiie s. se laissèrent influencer par les gravures allemandes des frères Klauber.