Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

embryonnaire (état) (suite)

Les cellules embryonnaires

On appelle ainsi les cellules qui, non encore spécialisées, conservent des potentialités entières : elles peuvent se différencier dans l’une quelconque des catégories cellulaires issues des trois feuillets fondamentaux chez un Métazoaire triblastique par exemple. L’œuf fécondé est, bien entendu, la première des cellules embryonnaires et l’illustration parfaite de la totipotence de ce matériel : de lui dérivera chacune des cellules de l’organisme définitif, si différentes les unes des autres que celles-ci puissent être lorsque le développement sera achevé.

Par extension, et parce qu’elles présentent des caractéristiques cytologiques et physiologiques équivalentes ainsi que des potentialités, sinon totales, du moins considérables par rapport aux cellules différenciées, certaines cellules des organismes adultes sont également qualifiées de cellules embryonnaires (ou de cellules jeunes). Toutes ont un aspect comparable : forme relativement sphérique (ou cellules isodiamétriques chez les végétaux), un noyau volumineux, pourvu d’un ou de plusieurs gros nucléoles au centre d’un cytoplasme assez homo gène, riche en ribonucléoprotéines et dépourvu, dans le cas des cellules végétales, des grandes vacuoles caractéristiques ; celles-ci sont nombreuses, petites et réparties dans toute la cellule, ainsi qu’on peut le montrer grâce à des colorants spécifiques ; pas de réserves importantes, mais des mitochondries abondantes fournissent l’énergie nécessaire aux réactions de synthèse : synthèse de protéines, de ribonucléoprotéines, mais aussi d’acide désoxyribonucléique (A.D.N.). Les cellules embryonnaires, en effet, ont encore la possibilité de se diviser, la mitose assurant dans les cellules filles la répartition de deux stocks homologues de chromosomes, c’est-à-dire, en dernière analyse, de molécules d’A.D.N. rigoureusement identiques en quantité et en qualité. La synthèse de l’A.D.N. se fait, préalablement à toute division, pendant l’interphase, et son mécanisme (la réplication) permet de comprendre que les cellules filles héritent d’un génome rigoureusement homologue à celui de la cellule mère ; elles ont, comme elle, des potentialités considérables. Seule, l’éventuelle évolution vers une spécialisation déterminée (différenciation) inhibera certaines de ces potentialités pour ne conserver que celles qui sont spécifiques de la catégorie cellulaire à laquelle aboutissent les processus de développement.

Certaines cellules, cependant, conservent leur jeunesse la vie durant. C’est, par exemple, le cas des cellules de régénération des Planaires (Vers plats du groupe des Plathelminthes Turbellariés). Situées dans les mailles d’un réseau constitué par des cellules de soutien, les cellules de régénération peuvent, après amputation d’une partie quelconque du corps, régénérer la partie manquante ; celles qui sont voisines de la plaie émigrent vers celle-ci, s’y multiplient et constituent un bourgeon de régénération ; elles se différencient ensuite et peuvent former du tégument, des cellules musculaires, des cellules visuelles..., n’importe quelle catégorie cellulaire somatique ou de la lignée germinale.

Plus fréquentes chez les Métazoaires inférieurs que chez les animaux plus évolués, les cellules embryonnaires ne sont, cependant, pas absentes chez ces derniers. Entre autres, les cellules germinales, ou cellules sexuelles, restent indéfiniment à l’état embryonnaire. D’autres types cellulaires, également, bien qu’à l’état dormant dans l’organisme normal, peuvent, à la suite d’un stimulus convenable, traumatisme par exemple, se porter à la relève des cellules atteintes et les remplacer (cellules embryonnaires de remplacement).

Chez les végétaux, l’embryologie indéfinie des méristèmes s’explique par l’état embryonnaire des cellules qui les constituent. Il est d’ailleurs remarquable de noter que, si les méristèmes primaires sont primitivement constitués de cellules indifférenciées, il n’en est pas ainsi des méristèmes secondaires : les cellules qui leur donnent naissance sont, au départ, des cellules spécialisées qui réacquièrent secondairement par dédifférenciation* des potentialités de cellules jeunes et un état voisin de l’état embryonnaire. Cela prouve que la totipotence ne disparaît pas des cellules différenciées, mais y demeure à l’état latent.

R. M.

 R. M. May, les Cellules embryonnaires (Gallimard, 1938).

Emerson (Ralph Waldo)

Écrivain américain (Boston 1803 - Concord, Massachusetts, 1882).


Si l’Amérique avait un philosophe, ce serait Emerson. Il ne compose pas de système, comme Kant ou Hegel. Mais, à la fois pragmatique et mystique, c’est un moraliste poétique, qui, à partir d’une intuition individuelle de nature religieuse, réagit passionnément aux problèmes de son temps et de son pays. Autour de lui se groupent les transcendantalistes, qui n’ont en commun qu’une volonté de réforme radicale et quelques principes : la poésie est engagement moral ; l’idéalisme doit vaincre le déterminisme matérialiste ; l’individu porte cet espoir ; l’Amérique est la terre promise où l’individu peut s’épanouir s’il sait contester la tradition au nom de l’idéal. Emerson est l’un de ces esprits à la fois religieux et contestataires, poétiques et moraux, individualistes et fraternels, si caractéristiques du xixe s.

Descendant d’une lignée de pasteurs, après des études de théologie à Harvard, il est nommé pasteur d’une église unitarienne de Boston en 1829. Il se marie la même année avec Ellen Tucker, qui meurt deux ans plus tard. Frappé par ce deuil, assailli de doutes spirituels sur le problème de la communion, il renonce au sacerdoce en 1832. Il voyage en Europe, rencontre S. T. Coleridge et T. Carlyle, se frotte au kantisme et à l’idéalisme allemand. En 1835, remarié, il s’installe dans le village de Concord, qui va devenir le centre de la renaissance intellectuelle de la Nouvelle-Angleterre. Il y cultive ses légumes, lit tout, de Platon à Swedenborg, et tient un Journal quotidien, d’où il tire ses essais, conférences et poèmes. Sa réputation de conférencier s’étend de Boston à New York, puis en Californie et jusqu’en Europe.