Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

alimentation (suite)

Néanmoins, la tendance à la concentration s’affirme. Très forte en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique, celle-ci s’effectue plus lentement en France. Les regroupements ne peuvent s’y opérer qu’autour d’un millier d’entreprises, qui, par leur chiffre d’affaires, se sont imposées sur le marché français. Le nombre d’accords entre les entreprises (fusions, accords contractuels, etc.) est passé de 34 à 93 par an de 1965 à 1968. De 1959 à 1969, on a assisté à une régression de plus de 50 p. 100 des huileries artisanales. On peut citer, à titre d’exemple, les concentrations qui se sont opérées dans le Champagne (Mercier avec Moët et Chandon), dans les produits laitiers (B. S. N.-Gervais-Danone) et dans les corps gras (Lesieur avec Unipol). La concentration est particulièrement importante dans la brasserie.

La concentration s’est accompagnée d’un souci de polyvalence : les industriels y ont vu la clef de leur expansion. L’industrie des pâtes alimentaires s’est adjointe celle des sauces et des plats cuisinés. La Compagnie Dubonnet-Cinzano-Byrrh s’occupe aussi bien de jus de fruits que de vodka. Quant au groupe Perrier, il englobe les activités les plus diverses : elles vont des boissons (eaux minérales, boissons gazeuses, jus de fruits) à l’industrie laitière (accords avec la S. A. P. I. E. M. et Genvrain) en passant par la confiserie (Dupont d’Isigny, chocolat Menier-Rozan).

L’industrie alimentaire française doit non seulement tenir compte des firmes européennes, avec lesquelles les rapprochements s’accentuent (notamment, depuis 1971, avec la Grande-Bretagne), mais aussi des filiales de firmes étrangères implantées en France, notamment Nestlé.

Alimentation et industrie au xixe s.

1806 Essor de l’industrie betteravière en France, privée de sucre par le Blocus continental. Elle devient, ainsi, le premier pays sucrier d’Europe.
Ce fut Benjamin Delessert (1773-1847) qui exploita industriellement le procédé d’extraction découvert, en 1796, par Franz Carl Achard (1753-1821).

1810 Nicolas Appert (1749 ou 1752-1841) publie le Livre de tous les ménages, l’art de conserver pendant plusieurs années toutes les substances animales ou végétales. L’« appertisation » est née.

1869 Découverte de la margarine par Hippolyte Mège-Mouriès (1817-1880).

1897 Pour la première fois, raffinage de l’huile de coprah, qui inaugure ainsi l’industrie de la graisse végétale.

L’importance des industries alimentaires

Dans l’Europe des Six, la rapide expansion des industries alimentaires coûte 7 milliards de francs d’investissements annuels, dont 2 en France ; leur chiffre d’affaires, au premier rang des activités industrielles, y était en 1967 de l’ordre de 200 milliards de francs, dont 60 pour la France, soit 15 p. 100 de l’activité de toutes les industries communautaires et 10 p. 100 de l’industrie alimentaire mondiale. Elles emploient 1,5 million de salariés, dont 400 000 en France, et font appel à des techniques avancées (appertisation, surgélation, etc.). Les agriculteurs, préoccupés par l’amélioration de leurs revenus, attachent une grande importance au développement de ces industries.

Dans les pays industrialisés, les entreprises alimentaires sont puissantes. Elles pratiquent une stratégie internationale en s’implantant dans de nombreux pays ; elles recherchent le maximum de profit par la rationalisation des échanges suivant les caractéristiques de leurs marchés et exercent un rôle d’orientation sur l’agriculture. En Europe, où la concentration des entreprises s’accélère, cette orientation par le marché, favorable à l’allégement des charges financières publiques, commence à s’imposer par suite du passage de l’économie de pénurie à l’économie d’abondance. Dans les pays en voie de développement, l’implantation d’entreprises modestes appliquant des techniques simples est favorable à la mobilisation des ressources humaines locales tout en permettant une amélioration des rations alimentaires.

R. V.


La distribution

Elle incombe à l’ensemble du commerce de l’alimentation, qui a pour tâche de faire passer le produit alimentaire du producteur au consommateur. La multiplicité des circuits, qui varient en fonction du produit et du lieu, nous interdit, ici, d’en faire la description détaillée. Il a paru intéressant d’envisager la distribution au stade du commerce de détail, en raison des rapports qu’il assume à la fois avec le fournisseur et avec le consommateur.


Où s’approvisionne le commerce de détail ?

• Les marchés. Ils fournissent le commerce de détail en denrées périssables. Leur réorganisation générale a été prévue en France, avec l’implantation de 21 marchés d’intérêt national (les M. I. N.), marchés de production (Saint-Pol-de-Léon, Cavaillon, Angers) chargés de rassembler et de conditionner les produits avant de les expédier, ou marchés de consommation (Rungis, Toulouse, Bordeaux, Lyon) chargés d’alimenter les grandes agglomérations. Cette décision a eu pour résultat, à Paris, l’éclatement des Halles centrales en deux grands marchés : celui de Paris-la-Villette, réservé aux viandes, aux volailles et au gibier, et celui de Paris-Rungis pour toutes les autres denrées. Les abattoirs et le marché de la viande qui leur est lié ont fonctionné pendant un certain temps à la Villette, tandis que des salles de vente ont été construites à Paris-Rungis, permettant ainsi la suppression du marché des viandes qui a été en exercice aux Halles jusqu’en 1973.

Paris-Rungis, ouvert depuis le 4 mars 1969, a été conçu avec le souci d’adapter les méthodes de distribution aux besoins d’une population qui sera de 12 millions d’habitants en 1990. Il occupe une superficie de 200 hectares, sans compter les services annexes. La rationalisation dans la manutention des marchandises et dans les circuits commerciaux caractérise ce marché moderne. Sa jonction directe avec la route et le rail permet d’amener les marchandises au lieu même de la vente sans rupture de charges. La simplification des circuits de vente a fait disparaître les différentes catégories juridiques qui exerçaient aux Halles (mandataires, commissionnaires, approvisionneurs, etc.) pour les confondre en une seule : celle des grossistes. La fixation des cours est facilitée par les renseignements, que diffuse un circuit de télévision intérieur, sur les quantités mises en vente et sur les cours des autres places européennes. Enfin, un ordinateur contrôle l’entrée des marchandises sur le marché.