Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

développement et différenciation (suite)

Phénomènes biochimiques dans l’induction

La question s’est posée très tôt de savoir si l’inducteur n’agissait pas par l’intermédiaire d’une substance chimique qui activerait les cellules des territoires récepteurs. Il ne semble pas que l’inducteur soit spécifique. Une ligne primitive de Lapin (centre organisateur chez les Mammifères), greffée sur un disque embryonnaire de Poulet, induit la formation d’un second embryon de Poulet. La propriété d’induction se transmet par contact : un fragment d’épiblaste ou un morceau de gélose ayant séjourné à la place du centre organisateur acquièrent ses propriétés ; le centre organisateur tué par l’alcool ou la chaleur conserve ses propriétés, mais également un morceau d’ectoblaste tué devient inducteur. Dans tous les cas, cependant, il n’y a qu’un début d’induction sans grand avenir et surtout sans induction secondaire. Nous savons maintenant que les substances chimiques inductrices sont multiples : certains principes inducteurs sont thermolabiles, d’autres non ; certains sont des inducteurs de structures de la tête, d’autres de structures du tronc. Quelques-unes de leurs propriétés biochimiques sont connues, sans qu’on en ait encore déterminé la formule exacte, mais il semble à peu près certain, à l’heure actuelle, qu’il s’agit de substances protéiques. Il n’en reste pas moins que les mécanismes grâce auxquels l’œuf fécondé se développe pour devenir un organisme multicellulaire sont encore mystérieux.


Autres formes du développement

À l’éclosion de l’œuf ou à la parturition chez les animaux vivipares, l’organisme, qui s’est peu à peu constitué pendant la vie embryonnaire, n’est pas encore entièrement semblable à celui de l’adulte. Il n’est, en particulier, toujours pas apte à la reproduction. Dans certains cas même, l’organogenèse est bien loin d’être achevée, et à l’embryon succède une forme larvaire qui peut n’être que la première d’une longue série.


Le développement postembryonnaire chez les Anoures

Au moment de l’éclosion, l’organogenèse larvaire n’est pas terminée, bien que la jeune larve puisse déjà nager activement dans une direction. Les organes respiratoires, des branchies externes, sont progressivement recouverts par deux replis cutanés, les opercules, qui, prenant naissance latéralement en arrière de la région buccale, croissent d’une manière continue en direction de la partie postérieure du corps, se soudent enfin aux parois latérales et ventrales, et isolent une cavité branchiale. Ces branchies externes disparaissent vers le quatrième jour après l’éclosion et sont remplacées par des branchies internes. Pendant cette période, des bourgeons coniques, de plus en plus saillants, apparus à la base de la queue, se développent et constituent les membres postérieurs du têtard. Ce n’est qu’au bout de dix jours que la forme larvaire commence à s’alimenter, aux dépens de plantes aquatiques qu’elle broute à l’aide de son bec corné. Jusque-là, elle avait vécu, tout comme l’embryon, en utilisant le reste des réserves vitellines de l’œuf. Il n’y a donc pas de différence fondamentale, ici, entre ce que nous avons défini comme étant la période du développement embryonnaire et les premiers temps du développement larvaire. Il n’y a pas d’hiatus non plus entre les formes larvaires successives, qui, peu à peu, d’une façon continue, réalisent le têtard, dont les membres postérieurs, actifs et aux articulations fonctionnelles, précèdent de quelques jours l’apparition des membres antérieurs. C’est avec celle-ci qu’on fait traditionnellement débuter la métamorphose, crise profonde et spectaculaire, de laquelle émergera la Grenouille, dont le mode de vie, radicalement différent de celui du têtard, exige la perte totale ou partielle d’organes larvaires (bec, branchies, queue) [v. dédifférenciation], des remaniements importants au niveau de certains tissus ou au niveau de certains appareils (la peau s’épaissit, devient pluristratifiée ; l’intestin se raccourcit, et son équipement enzymatique, modifié, permet maintenant la nourriture carnée), la genèse d’organes nouveaux adaptés à la vie aérienne (poumons par exemple).

L’étude, classique, du déterminisme de la métamorphose chez les Amphibiens a démontré, depuis déjà un demi-siècle, le contrôle endocrine exercé par la thyroïde, placée elle-même sous la dépendance d’une hormone du lobe antérieur de l’hypophyse (hormone thyréotrope, ou T. S. H.). Enfin, le fonctionnement endocrine de l’hypophyse antérieure est commandé par des neurosécrétions d’origine hypothalamique. La production de T. S. H. provoque un hyperfonctionnement thyroïdien entraînant les modifications morphologiques de la métamorphose.


Le développement postembryonnaire des Insectes

Chez les Arthropodes et en particulier chez les Insectes, les étapes du développement postembryonnaire sont bien connues, puisque c’est sur elles que reposent les grandes lignes de la classification. De l’œuf à l’adulte (ou imago), le développement passe par un nombre déterminé d’étapes, séparées les unes des autres par des mues. Pendant l’intermue, la croissance en taille est généralement empêchée par la cuticule rigide qui enveloppe le corps de l’animal. Elle ne peut s’effectuer qu’au moment des crises de croissance, qui s’accompagnent de transformations morphologiques le plus souvent faibles. L’allure du développement postembryonnaire varie cependant beaucoup d’un ordre d’Insectes à l’autre.

Le développement amétabole réalise très progressivement la morphologie de l’adulte, toutes les mues étant équivalentes. Fréquemment, l’animal mue encore après l’acquisition de la maturité sexuelle.

Le développement hétérométabole compte un nombre de mues réduit, la dernière (ou mue imaginale) s’accompagnant de l’acquisition d’ailes fonctionnelles en même temps que de l’accession à la maturité sexuelle. Chez les Hémimétaboles (Odonates, etc.), des modifications plus importantes se produisent, en relation avec un changement complet du mode de vie : la larve est aquatique, alors que l’imago est aérien. On peut parler alors de crise métamorphique.