Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

développement et différenciation (suite)

Le développement holométabole, enfin, caractérisant les formes les plus évoluées de la classe des Insectes, se termine par une métamorphose* profonde, qui, pour s’accomplir, nécessite deux mues successives et l’intermue qui les sépare (stade nymphal). La larve et l’adulte ont dans ce cas une morphologie complètement différente et le plus souvent un mode de vie qui n’a rien de commun.

Ajoutons que le développement des Insectes présente assez fréquemment une ou plusieurs périodes d’interruption, les diapauses. Celles-ci correspondent à une nécessité absolue pendant la mauvaise saison, où ne se trouvent ni les conditions de température favorables, ni surtout l’alimentation nécessaire au maintien de l’activité. Elles diffèrent d’un simple état de vie ralentie, contrôlé directement par les conditions du milieu extérieur : une Grenouille engourdie par le froid rétablit le niveau de son métabolisme dès qu’on la réchauffe. Au contraire, la diapause ne peut être rompue que par un stimulus spécifique, variable d’une espèce à l’autre (telle valeur de la photopériode ; une durée déterminée d’exposition à une température donnée suivie d’un réchauffement brusque...) ; elle est, de plus, contrôlée par un mécanisme physiologique interne faisant intervenir des actions endocriniennes.


Un aspect du développement postembryonnaire chez les Mammifères : la crise pubertaire

Même dans les groupes qui ne présentent pas de métamorphose au cours de leur développement postembryonnaire, les processus de développement ne sont pas absents après l’éclosion ou la naissance. Pour ne prendre qu’un exemple, l’acquisition de la maturité sexuelle chez les Mammifères est éloquente à cet égard. Initialement bivalents, leur première organogenèse étant commune aux deux sexes, les organes génitaux se différencient dans le sens du sexe génétique pendant le cours du développement embryonnaire (entre la 7e semaine et le 3e mois chez l’Homme). Cette différenciation est régie par des substances chimiques morphogènes primaires qui dirigent les gonades vers le type testiculaire ou le type ovarien, puis, celles-ci différenciées, des substances morphogènes secondaires, ou hormones embryonnaires, orientent l’évolution des tractus génitaux, des glandes annexes et des organes génitaux externes. À la naissance, cependant, la physiologie sexuelle n’est pas établie, non plus pour la plupart des caractères sexuels secondaires. Ce n’est qu’après un temps assez long et au cours d’une véritable crise du développement que sont acquises les caractéristiques particulières, morphologiques, mais surtout physiologiques et comportementales, qui rendent possible le rapprochement des sexes et la reproduction. Cette période de crise, la puberté, peut, dans l’espèce humaine, durer plusieurs mois, voire plusieurs années, pendant lesquelles des poils poussent au niveau du pubis, les seins se développent, les cycles sexuels et la menstruation s’installent chez la jeune fille, alors que la voix se fêle et devient grave, et que les organes génitaux externes accélèrent leur croissance chez le jeune garçon. Pendant cette période, le rythme de la croissance globale est nettement affecté, de même que le métabolisme cellulaire. Le contrôle de l’acquisition des capacités génésiques, puis du fonctionnement équilibré des systèmes génitaux est également sous la dépendance de glandes endocrines, dont l’activité complexe est maintenant bien comprise. Par contre, on ignore si ce sont les mêmes hormones qui interviennent chez l’embryon.

Quoi qu’il en soit, ce sont, une fois encore, des substances chimiques à activité spécifique qui sont les agents régulateurs pour cette étape particulière du développement.


Les voies actuelles de la recherche


Transplantation de noyaux

« La différenciation cellulaire va-t-elle de pair avec une différenciation des noyaux, au cours du développement ? » est une des premières questions auxquelles les embryologistes ont eu à répondre. La technique mise au point par Robert William Briggs et King, améliorée depuis par J. B. Gurdon (1962), consiste à remplacer le noyau de l’œuf par le noyau d’une cellule prélevée dans un organe différencié d’un embryon évolué. Le nombre de développements abortifs est considérable, mais les embryons qui dépassent le stade blastula donnent des larves normales, dont quelques-unes vont jusqu’à l’état adulte. Il semble que les échecs soient dus aux difficultés d’une technique qui lèse souvent les noyaux ; aussi conclut-on à la possibilité pour les noyaux, qui restent indifférenciés, de reconquérir l’ensemble des propriétés constructives du génome de l’espèce considérée. L’Algue siphonée unicellulaire Acetabularia se prête aussi à la substitution de noyaux entre individus d’espèces différentes. La combinaison « cytoplasme de A. mediterranea + noyau de A. wettsteinii » donne naissance à un végétal ayant toutes les caractéristiques morphologiques et physiologiques de A. wettsteinii. Des expériences faites sur d’autres espèces et même entre deux genres différents, Acetabularia et Acicularia, confirment le fait que la différenciation du végétal chimère est fondamentalement conforme au type de noyau, sans dénier, toutefois, que le cytoplasme puisse conserver pendant un certain temps les caractères de sa propre espèce, qu’il détient d’un premier noyau, sous la forme de substances morphogènes, A. R. N., protéines soufrées, qui peuvent être utilisées par la cellule pendant les premiers temps de l’observation.

L’influence du cytoplasme sur l’activité nucléaire a été prouvée de manière tout aussi démonstrative par la greffe de noyaux de cellules différenciées, nerveuses par exemple, qui ne présentent jamais de mitoses dans un œuf mûr. Les noyaux greffés dans le cytoplasme d’une cellule prête à se diviser entrent en division.

Les caractères de l’espèce sont donc commandés par le noyau, qui fournit l’information au cytoplasme qui l’entoure, mais il reste à comprendre pourquoi un noyau totipotent dirige la différenciation dans un sens déterminé. Il semble que les interactions entre les différents tissus composant un organe soient déterminantes à cet égard, ainsi que le montrent les cultures de cellules in vitro.