Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Cousin (les)

Artistes français du xvie s.



Jean Cousin père

Jean Cousin, dit le Père, peintre et sculpteur (Soucy-lès-Sens [?] v. 1490 - Paris [?] v. 1561), est traditionnellement considéré comme le plus célèbre peintre français de la Renaissance. Ses ouvrages théoriques, le Livre de perspective (1560) et le Livre de pourtraicture (celui-ci publié par son fils en 1571), eurent un succès immense. Il est cité à côté des plus grands maîtres dans les écrits de ses contemporains. Son style, malgré quelques réminiscences gothiques dans la sécheresse des drapés, s’apparente à celui de l’école de Fontainebleau* (allongement des personnages, décor de colonnes et de pilastres), mais avec un expressionnisme qui doit plus à Michel-Ange* qu’au Rosso* et une sensibilité très française du paysage. Son appartenance au milieu de la Réforme (il loge à Paris rue des Marais, dite « la Petite Genève » par Agrippa d’Aubigné) est sans doute cause de l’obscurité qui règne sur sa carrière : entourage peu connu, incertitude des dates de sa naissance et de sa mort.

Ses œuvres, rarement décrites par ses panégyristes, ont, pour la plupart, disparu. Mais les archives mentionnent d’importantes commandes :
— 1530, retable pour l’abbaye de Vauluisant (Yonne) ;
— 1540, peintures décoratives pour l’entrée à Paris de Charles Quint, auquel François Ier veut offrir un véritable manifeste de l’art français ;
— 1541, cartons de tapisseries : Vie de sainte Geneviève pour la confrérie de Sainte-Geneviève-du-Mont à Paris ;
— 1543, cartons de tapisseries : Vie de saint Mammès (maintenant au Louvre) pour le cardinal de Givry (Langres) ;
— 1549, toiles (Vie de saint Germain) pour Saint-Germain-l’Auxerrois et peintures décoratives pour l’entrée d’Henri II à Paris (Jean Goujon* est chargé des sculptures) ;
— 1550, dessins de chapes pour la cathédrale de Sens ;
— 1557, cartons de vitraux pour la chapelle des Orfèvres de Paris (architecte Philibert Delorme*, sculpteur Germain Pilon*).

Les activités et les dons de Cousin semblent ainsi avoir été multiples. La tradition lui attribue des verrières à Saint-Gervais de Paris, à Sens, à Moret, à Anet, etc. (un ton de rose employé pour les vitraux porte son nom), des tapisseries (Histoire de Diane pour Anet) et des sculptures : tombeau de Louis de Brézé (cathédrale de Rouen), statue funéraire de l’amiral Chabot (Louvre ; cette dernière œuvre lui est déjà donnée par un texte du Senonnais Taveau, en 1590 [archives de l’Yonne]). Le maniérisme bellifontain prend une vigueur austère dans ses dessins et ses gravures : Balaan et l’âne (Rennes), Martyre d’un saint (Bibliothèque nationale), le Serpent d’airain (gravé par Étienne Delaune [v. 1519-1583]). Deux tableaux illustrent son œuvre : l’Eva Prima Pandora du Louvre, premier nu de la peinture française, provient de sa famille ; la Charité du musée de Montpellier lui est attribuée en raison de ses affinités avec ses gravures. Des comparaisons historiques et stylistiques permettraient aussi d’évoquer Cousin à propos d’œuvres anonymes, comme les peintures du château d’Oiron ou le livre d’heures du connétable de Montmorency (musée de Chantilly).


Jean Cousin fils

Jean Cousin, dit le Fils (Sens [?] v. 1522 - Paris [?] v. 1594), l’un des huit enfants de Cousin le Père, reprit l’atelier de son père avec lequel il a été souvent confondu. En 1563, il est appelé à Sens pour organiser l’entrée de Charles IX. Il s’y trouve de nouveau en 1582 pour dessiner une autopsie, et peint vers cette époque des portraits pour la famille de sa sœur, Marie Bouvier. Il est l’auteur d’un ouvrage d’emblèmes, le Livre de fortune (1568), et a collaboré au Livre de la broderie de l’Italien D. de Sera. Le Jugement dernier provenant de l’église des Minimes à Vincennes (Louvre) lui est maintenant attribué, plutôt qu’à son père, par la critique, qui a également groupé autour de son nom un certain nombre de dessins dont le graphisme bouclé est assez caractéristique.

S. M.

 M. Roy, Artistes et monuments de la Renaissance en France (Champion, 1929).

Coustou (les)

Famille de sculpteurs français, qui comprend Nicolas (Lyon 1658 - Paris 1733), son frère Guillaume (Lyon 1677 - Paris 1746) et Guillaume II (Paris 1716 - id. 1777), fils du précédent.


Ayant travaillé aux principaux chantiers royaux — Versailles, Marly, les Invalides —, académiciens, les Coustou représentent les tendances de la sculpture décorative classique et son évolution pendant près d’une centaine d’années.

Nicolas et Guillaume étaient fils d’un menuisier et sculpteur sur bois lyonnais, François Coustou († 1690), beau-frère du sculpteur Antoine Coysevox (1640-1720), Lyonnais également, avec qui ses neveux travaillèrent jusqu’à sa mort. Les deux frères remportèrent tous deux le prix de Rome, firent tous deux le voyage d’Italie et furent ensuite nommés à l’Académie, dont Guillaume fut directeur.

Il est parfois difficile, dans l’état actuel des recherches, de délimiter ce qui appartient en propre à chacun des deux frères, tant fut étroite leur collaboration. De 1705 à 1709, les Coustou travaillèrent à Versailles* à des sujets variés : le baldaquin du groupe des bains d’Apollon, les corniches de l’appartement du roi à Trianon. Leur participation fut importante aux travaux de la chapelle — sculptures de plomb sur les combles, bas-reliefs intérieurs —, qui ont plus de mouvement que les œuvres de la première équipe versaillaise (dont Coysevox était la personnalité la plus puissante).

C’est du parc de Marly que proviennent les sculptures les plus célèbres des Coustou. À la fin de la vie de Louis XIV, la partie centrale des jardins fut ornée de bassins, au centre desquels se dressaient des statues de déesses chasseresses — Diane, Hippomène, Daphné — dues à Guillaume. Apollon et Daphné, le groupe de la Seine et la Marne (aujourd’hui aux Tuileries) seraient les œuvres de Nicolas. Après 1715, Marly connut un moment d’abandon, mais les travaux reprirent une vingtaine d’années plus tard. Guillaume donna un autre groupe, l’Océan et la Méditerranée, et surtout les fameux Chevaux de Marly (1740-1745) — aujourd’hui place de la Concorde, où ils font face aux statues équestres de Mercure et de la Renommée de Coysevox, qu’ils avaient remplacées à Marly. De proportions plus importantes, les Chevaux sont aussi d’esprit très différent, traduisant la fougue et l’indépendance de caractère de Guillaume.

Les travaux des Coustou aux Invalides se situent surtout entre 1709 et 1715 (Louis XIV entre la Justice et la Prudence). Le chœur de Notre-Dame de Paris reçut en 1714 une décoration rappelant le vœu de Louis XIII ; une Pietà due à Nicolas Coustou y est entourée des statues de Louis XIII par Guillaume Coustou et de Louis XIV par Coysevox.