Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

aléatoire (variable) (suite)

Variance

Sous réserve que les quantités indiquées aient un sens, la variance ou le moment centré d’ordre deux d’une variable aléatoire X est la quantité :
V(X) = Σ pi [xi – E(X)]2,
si X est discrète ;

si X est continue et de densité de probabilité f(x).
Dans les deux cas, la variance est une espérance mathématique, car
V(X) = E {[X – E (X)]2}.
Cette quantité n’est jamais négative ; sa racine carrée s’appelle l’écart type et est notée σ(X) ou σ. On démontre, en utilisant les propriétés de l’espérance énoncées ci-dessus, que
V(X) = E (X2) – [E (X)]2.
La quantité notée E (X2) est le moment non centré d’ordre deux. Elle est égale à Σ pi xi2, si X est discrète,

si X est continué.
Exemples.
1. Point amené par un dé. L’espérance est, dans ce cas,

De même

D’où

2. Dans le cas de la variable uniforme , on a

Propriétés de la variance.
V(hX) = E [hX – E(hX)]2 = E [hX – hE(X)]2 = E {h2 [X – E(X)]2} = h2E [X – E(X)2] = h2V(X) ; V(X + h) = V(X), car X – E(X) = X + h – [E(X) + h] et [X – E(X)]2 = [(X + h) – E(X + h)]2, ce qui entraîne V(X) = V(X + h).
V(X) = E(X2) – [E(X)]2, déjà signalée et qui permet le calcul de V(X) à partir de celui de E(X) et de E(X2).
V(X + Y) n’est égal à V(X) + V(Y) que si les variables X et Y sont indépendantes. Il suffit, pour se convaincre que l’égalité
V(X + Y) = V(X) + V(Y)
peut ne pas être valable si X et Y ne sont pas indépendantes, de prendre Y = X et de calculer : V(X + Y) = V(2X) = 4V(X), ce qui est exact, alors que V(X) + V(Y) = 2V(X), ce qui est faux.

Covariance de deux variables aléatoires X et Y. C’est le nombre réel noté Cov(X, Y) et défini par Cov(X, Y) = E{[X – E(X)] [Y – E(Y)]}. Si les variables aléatoires X et Y sont indépendantes, leur covariance est nulle. Mais, de façon générale, V(X + Y) = V(X) + V(Y) + 2 Cov (X, Y).

Inégalité de Bienaymé Tchebychev.
Elle donne un majorant de la probabilité pour qu’une variable aléatoire X d’espérance E(X) et d’écart type σ s’écarte, en valeur absolue, de sa moyenne, de plus d’une quantité ε > 0 :

Elle peut être utile, mais, dans bien des cas, elle est trop imprécise.
Par exemple, au jeu de dés à un dé,

Pour ε2 = 2 σ2 ou , ou pour

Or, l’événement est composé de deux éventualités : X = 1 et X = 6, de probabilité On voit l’imprécision de l’inégalité.


Exemples de lois de probabilité

1. Loi de Pascal. Une urne contient n1 boules blanches et n2 boules noires. Dans des tirages successifs avec remise, la probabilité de tirer une blanche est

et celle de tirer une noire est q = 1 – p. On s’intéresse à la probabilité d’obtention de k boules noires aux k premiers tirages et d’une boule blanche au (k + 1)ième tirage ; cette probabilité est qkp. La variable aléatoire X égale au nombre de boules noires tirées avant l’extraction d’une blanche est une variable de Pascal. On a :

2. Loi exponentielle. La variable aléatoire continue X suit la loi exponentielle si sa densité de probabilité est la fonction f telle que

E. S.

➙ Application / Binomiale / Combinatoire / Gauss (C. F.) / Poisson (D.) / Probabilité.

 G. Calot, Cours de calcul des probabilités (Dunod, 1963).

Aleijadinho (Antonio Francisco Lisboa, dit l’)

Sculpteur et architecte du Brésil colonial (Ouro Prêto 1730 - id. 1814).


Il était le fils naturel de Manuel Francisco Lisboa, architecte portugais, et d’Isabelle, une esclave mulâtre. Frappé en 1777 de la maladie qui devait faire de lui o Aleijadinho (« le Petit Estropié »), il perdit au milieu de souffrances épouvantables ses orteils, une partie de ses mains et dut se faire porter sur les chantiers, ses outils attachés aux poignets pour continuer à travailler. Génie universel, l’Aleijadinho a exercé son talent dans divers domaines, architecture, sculpture, décoration, avec un succès considérable, mais, à la fois arrogant et insouciant, il mourut dans la misère.


L’architecte

Initié à l’art de bâtir dans l’atelier de son père, il fut dès 1766 en concurrence avec lui pour la construction des deux plus riches églises de la ville d’Ouro Prêto* : Manuel Lisboa donnant les plans du sanctuaire du tiers ordre des Carmes, tandis que le génie précoce de son fils se manifestait à l’église São Francisco, dont les moindres détails sont traités avec un grand raffinement. On regrette que les projets pour São Francisco de São João del Rei aient été altérés par Francisco de Lima Cerqueira (1774).


L’entalhador (sculpteur décorateur sur bois)

Au moment où apparaît l’Aleijadinho s’effectue l’évolution qui entraîne le décor du baroque au rococo ; l’artiste la précipite au point d’en faire une révolution, se montrant suprêmement habile dans « les ornements irréguliers du meilleur goût français », ainsi qu’en témoigne le décor de la capelamor et de l’altarmor de São Francisco d’Ouro Prêto, qui fait chanter le mur dans une vibration colorée comparable à celle du lyrisme souabe ou bavarois.


Le sculpteur

L’artiste était à la tête d’un atelier, auquel il distribuait la tâche en se réservant certains morceaux ; à l’exception des travaux de São Francisco d’Ouro Prêto, chaque ensemble révèle plusieurs mains, mais on retrouve partout la vigueur du relief, les corps râblés, les muscles drus, les têtes viriles, la forte structure des mains et des pieds (églises des Carmes d’Ouro Prêto et de Sabará, frontispice de São Francisco de São João del Rei, etc.).

Le chef-d’œuvre de l’artiste a été conçu pour l’un des sommets spirituels de l’Amérique latine, le sanctuaire de Bom Jesus de Matosinhos à Congonhas do Campo, édifié sur une terrasse vers laquelle monte une voie sacrée bordée de six chapelles abritant des passos ou stations du Chemin de croix, ensembles de figures polychromes en bois de cèdre exécutées entre 1796 et 1799. Parmi ces soixante-six statues, les sept images du Christ se distinguent de tout le reste par un soin particulier de l’exécution. Par contre, certaines fautes anatomiques affectent les prophètes en pierre à savon qui, dominant la via Crucis, affirment encore la leçon apologétique de la concordance des deux Testaments conçue par le Moyen Âge et reprise par la Contre-Réforme. Ainsi, jusqu’aux premières années du xixe s., l’Aleijadinho perpétue l’expression d’un grand art chrétien, enrichi de ce que le climat et le goût du Nouveau Monde pouvaient y apporter de neuf.

M. B.

 G. Bazin, l’Architecture religieuse baroque au Brésil (Plon, 1956-1959 ; 2 vol.) ; Aleijadinho et la sculpture baroque au Brésil (le Temps, 1965).