Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Côte-d’Ivoire (suite)

Il s’agit d’industries de transformation, les unes destinées à fournir le marché intérieur ou africain (tabacs, allumettes, huileries, savonneries, textiles, chaussures, brasseries, moulins, industries métallurgiques et mécaniques [tréfilerie et clouterie, constructions métalliques, montage de véhicules], chimiques [raffinage du pétrole, peintures], etc.), les autres à valoriser les exportations par une première transformation (conserveries de poisson, d’ananas, jus de fruits, conditionnement du café et du cacao, fabrication de café soluble, beurre de cacao, scieries).

La production électrique, une des plus élevées d’Afrique de l’Ouest (0,7 TWh), est alimentée par les centrales thermiques d’Abidjan-Vridi, par les centrales hydro-électriques du barrage de la Bia (Ayamé I et II), auxquelles s’ajoute aujourd’hui celle de Kossou, sur la Bandama.

Les industries minières, en revanche, ne fournissent qu’un apport limité : or, diamant (en régression) ; l’exploitation du manganèse de Grand-Lahou (179 000 t en 1965) a cessé depuis 1970. L’exploitation du fer de Bangolo (région de Man) n’est qu’un projet. La recherche pétrolière dans la région littorale n’a pas abouti jusqu’ici.

La Côte-d’Ivoire a un bon réseau de communications modernes : une voie ferrée (Abidjan-Ouagadougou : 600 km sur 1 173 en territoire ivoirien) et 12 000 km de routes permanentes, dont plus de 1 000 km bitumés (32 000 km avec les pistes carrossables). Mais le commerce extérieur de la Côte-d’Ivoire, longtemps freiné par l’insuffisance de l’infrastructure portuaire (de simples wharfs), n’a pris son essor qu’avec l’ouverture, en 1950, du canal de Vridi, perçant le cordon littoral et permettant la création d’un port en eau profonde à Abidjan, dans la lagune Ebrié. Abidjan assure l’essentiel du commerce extérieur du pays et un important transit au bénéfice des pays de l’hinterland (Haute-Volta, Mali).

Des travaux sont en cours pour construire à San Pedro (entre Tabou et Sassandra) un second port en eau profonde, qui permettrait de mettre en valeur le sud-ouest du pays, encore presque vierge et à peu près vide d’habitants.

Le commerce extérieur est largement bénéficiaire. Il se fait principalement avec la France, avec, toutefois, une tendance à la réduction de la part française au bénéfice des États-Unis et des autres pays du Marché commun. Le taux de croissance de 1960 à 1970 a atteint 9,8 p. 100 par an en moyenne, malgré un fléchissement à partir de 1965. Le revenu individuel annuel moyen s’élève environ à 50 000 francs CFA (1 000 NF par an), record de l’Afrique francophone après le Gabon. La modernisation, tant du paysage rural que du paysage urbain (case traditionnelle remplacée par la maison en « dur » à toit de tôle), est spectaculaire et oppose la Côte-d’Ivoire aux pays voisins, plus pauvres, surtout ceux de l’intérieur. Dès 1958, on estimait à 72 p. 100 la part du revenu moyen obtenu sous forme monétaire, taux très élevé dans une Afrique où l’autoconsommation paysanne reste, ailleurs, essentielle.

Cette prospérité et cette croissance économique exceptionnelle, fruits de conditions naturelles particulièrement favorables (richesse de la zone forestière, initialement peu peuplée et ne présentant pas d’obstacles sociaux à la mise en valeur) et d’une politique résolument libérale, assurant la sécurité et le libre rapatriement des capitaux et des bénéfices aux investisseurs étrangers, ne comportent pas, cependant, que des aspects positifs.

La mise en valeur « extensive » de la zone forestière approche de ses limites, et le taux de croissance fléchit. Le rôle prédominant de l’initiative privée étrangère, qui contrôle le grand commerce, l’industrie et une part non négligeable du secteur primaire (près d’un quart en incluant la pêche et l’exploitation forestière), tend à subordonner le développement du pays à des besoins extérieurs ; les déséquilibres régionaux s’accentuent (Nord retardataire), et plus encore les déséquilibres internes (7 p. 100 de la population consomment 33 p. 100 des biens commercialisés ; le revenu moyen à Abidjan est onze fois supérieur à celui des populations du Nord ; le revenu moyen du non-Africain est onze fois supérieur à celui de l’Africain). La bourgeoisie et les cadres ivoiriens s’impatientent du retard dans l’africanisation de l’économie et des cadres ; le taux considérable d’étrangers africains parmi les salariés face à un important chômage favorise les tensions entre nationaux et non-Ivoiriens. Le taux de scolarisation (45 p. 100) place la Côte-d’Ivoire au sixième rang seulement des quatorze États africains et malgache de l’ancienne Communauté française. Toutefois, l’université d’Abidjan est la plus ancienne et la plus importante des universités de l’Afrique noire continentale d’expression française, après celle de Dakar.

Structures économiques et sociales (1965)

• Revenu des grandes entreprises industrielles et commerciales (principalement européennes) : 25 milliards de francs CFA, dont 5 milliards pour les plus importantes (une trentaine).

• Part des Européens dans le secteur primaire (agriculture, forêts, pêche) : 23 p. 100, mais 9 p. 100 dans l’agriculture seule (0,7 p. 100 de la production du café, mais plus de deux tiers de la production des bananes).

• 20 000 planteurs africains ont un revenu supérieur à 250 000 F CFA par an (dont 5 000 ayant un revenu supérieur à 500 000 F CFA).

• Structure moyenne de l’exploitation rurale : pour un planteur chef de famille, neuf dépendants familiaux, un à deux manœuvres étrangers (salariés ou métayers).

• 250 000 salariés, dont 40 p. 100 de non-Ivoiriens et 32 000 salariés de l’industrie. Les entreprises européennes emploient 14 p. 100 de la main-d’œuvre salariée. Les salariés européens (7 200) absorbent plus du tiers de la masse salariale.

J. S.-C.

➙ Abidjan / Afrique noire.