Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Côte-d’Ivoire (suite)

D’abord, un domaine subéquatorial est établi au sud du parallèle 7° 30′ avec un climat dit « attiéen » (pluies abondantes : de 1,50 à 2 m par an ; deux maximums pluviométriques, séparés par une « grande saison sèche » de trois à quatre mois, sans rigueur, tempérée par la brise de mer et une humidité atmosphérique presque constante, et par une « petite saison sèche », simple rémission dans les grandes pluies, au mois d’août). Les températures sont élevées et constantes (moyennes mensuelles à Abidjan : maximum [avr.] 28 °C ; minimum [août] 24 °C).

Cette zone méridionale est le domaine de la forêt dense, dont les limites dépassent cependant vers le nord la limite climatique à l’ouest (grâce au relief, qui augmente la pluviosité) et à l’est (grâce aux sols argileux résultant de la décomposition des schistes, qui retiennent mieux l’humidité), couvrant ainsi 120 000 km2, le tiers du pays. La limite de la forêt dessine de ce fait un V. Une zone de savanes littorales sépare la grande forêt de la mer.

Ensuite, un domaine intermédiaire correspond au pays baoulé et est compris dans les limites du « V » dessiné par la bordure septentrionale de la forêt dense. Le total pluviométrique est plus faible (1,1 m à Bouaké) ; le souffle de l’harmattan desséchant se fait sentir pendant une partie de la grande saison sèche (la petite saison sèche tend à disparaître). C’est un « golfe » de savanes qui s’enfonce ici comme un coin dans la région forestière. La disparition de la forêt s’explique moins par la faiblesse de la pluviométrie (elle n’est pas plus élevée à l’est) que par la structure des sols, arènes granitiques peu favorables à la rétention de l’eau.

Enfin, dans le domaine soudanien, au nord, s’opposent plus nettement une saison sèche centrée sur l’hiver, où le souffle de l’harmattan abaisse à un taux très faible le degré hygrométrique de l’air, et une saison des pluies centrée sur l’été. Le total annuel des pluies tombe parfois au-dessous de 1 m (sauf au nord-ouest, plus arrosé grâce à son relief). Les températures restent élevées (moyennes mensuelles à Ferkessédougou : maximum [avr.] 29 °C ; minimum [janv.] 25 °C), mais les variations diurnes sont plus marquées (minimums moyens de janvier à Ferkessédougou 12 °C, contre 18 °C à Abidjan au mois d’août, le moins chaud). La forêt claire sèche (avec arbres à feuilles caduques se dépouillant durant la saison sèche), dont il subsiste des vestiges, a été altérée en savane par l’homme (feux de brousse détruisant les espèces arbustives fragiles et favorisant l’extension des plantes annuelles herbeuses).


Le peuplement

La population est caractérisée par une grande diversité, un grand émiettement ethnique (une soixantaine de groupes ethniques différents). On peut cependant y distinguer trois ensembles (un au nord, deux au sud), présentant certains caractères communs et comptant chacun approximativement 1 100 000 individus (auxquels il faut ajouter 1 million environ d’Africains d’origine étrangère, presque tous installés dans le Sud).

Au nord, dans la zone des savanes (deux tiers du territoire), des agriculteurs vivent de la culture annuelle des céréales (riz, mil) : Malinkés* au nord-ouest, Sénoufos* au centre, Koulangos et Lobis* à l’est. Les Lobis vivaient encore à l’époque de la conquête coloniale en petites unités patriarcales dispersées, sans autorité politique, fidèles à la quasi-nudité et aux cultes animistes ; les Malinkés, au contraire, héritiers de l’antique civilisation du Mali, avaient une société hiérarchisée et organisée en État, islamisée, dominée par une couche supérieure de guerriers et de commerçants ; sous le nom de Dioulas, ils avaient, dès le xviiie s., imposé leur autorité aux Sénoufos.

Au sud, l’agriculture pratiquée dans les clairières était fondée sur la culture des tubercules (ignames, manioc), de la banane plantain (farineuse et consommée cuite) et, accessoirement, du riz (à l’ouest). C’était avant tout une agriculture de plantations pérennes.

Le deuxième bloc, à l’ouest de la Bandama, est constitué par les Krous, Bétés, Yacoubas, Gouros, Gagous, qui ne connaissaient aucune autorité politique permanente au-dessus de l’unité patriarcale ou villageoise.

Le troisième bloc, le plus réduit territorialement, à l’est de la Bandama, comprend les populations du groupe akan (agni-baoulé) et les populations « lagunaires » au sud. Les premières étaient organisées en chefferies et en royaumes. Leurs artisans travaillaient le bronze et l’or (masques, poids à peser l’or). Elles ont adopté de bonne heure l’économie moderne de plantation (café, cacao), et c’est ici que s’est constituée dès avant la Seconde Guerre mondiale la bourgeoisie rurale, qui est devenue la classe dirigeante de la Côte-d’Ivoire.

C’est surtout dans cette région du Sud-Est et entre Bandama et Sassandra que se regroupent les immigrés (Mossis de Haute-Volta, Maliens, Nigériens), qui représentent un quart de la population et 40 p. 100 des salariés.

L’ensemble du Sud, naguère animiste, a été plus ou moins largement gagné au christianisme, catholique ou protestant.

La Côte-d’Ivoire est le seul pays d’Afrique de l’Ouest où le nombre des non-Africains se soit accru depuis l’indépendance (50 000, dont environ 40 000 Européens [en majorité à Abidjan] et 10 000 Libano-Syriens).

Aujourd’hui, la population urbaine représente près du tiers de la population totale. Celle-ci, comprenant plus de 40 p. 100 de moins de vingt ans, s’accroît à un rythme annuel de 2,3 p. 100.


L’économie

Le café et le cacao, cultivés par les petits et moyens planteurs africains dans le Sud (à l’est de la Sassandra), fournissent à eux seuls 52 p. 100 en valeur des exportations ivoiriennes (34 p. 100 pour le café, 18 p. 100 pour le cacao). Implantées entre les deux guerres mondiales, c’est depuis 1946 que ces cultures ont vu leur progression s’accélérer. La même région fournit les bois tropicaux (24 p. 100 en valeur des exportations). Il s’y ajoute d’autres ressources : plantations de bananes, d’ananas, d’hévéas (essentiellement européennes) et, dans le secteur africain, de colas (exportés vers les zones de savanes), de palmiers à huile et de cocotiers (avec des plantations modernes à haut rendement, créées sur initiative gouvernementale). Le déficit vivrier du Sud est comblé par l’apport du Nord et de l’Ouest (riz), le Nord n’ayant pas de production exportable, sauf le coton. En revanche, l’élevage pratiqué au centre et au nord ne couvre pas les besoins du pays, qui importe (de Haute-Volta, du Mali, du Niger) le complément nécessaire. La pêche est aussi une activité du Sud, et sa production (surtout celle de la pêche maritime moderne) a doublé en dix ans : elle ne suffit pas à la consommation et est complétée par l’importation de poissons séchés du fleuve Niger, en provenance du Mali.

L’industrie s’est développée rapidement depuis 1952 (850 entreprises, dont 95 p. 100 appartenant à des non-Ivoiriens), mais elle est presque exclusivement concentrée à Abidjan* et Bouaké (textile, tabac).