Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Corée (suite)

Cette situation devait durer jusqu’au milieu du xive s. : à cette date, on assista à l’effondrement des Mongols, et Ko-ryŏ récupéra alors les territoires occupés. Ce ne sera qu’un sursaut. La formation de factions soit promongoles, soit prochinoises (ces dernières désireuses de faire acte d’allégeance aux Ming, qui chassaient les Mongols de Chine) et enfin une troisième tendance qui réclamait l’indépendance complète n’allaient pas favoriser l’évolution du pays.

Les Ming ayant, à leur tour, revendiqué une portion du territoire coréen, il fut décidé de leur opposer une armée, forte de 38 000 hommes, conduite par Li Sŏng-gye (1355-1408). Celui-ci, favorable aux Ming, refusa de pénétrer sur le territoire chinois, revint sans tarder à Kä-sŏng (ou Kae-song), la capitale, et opposa ses troupes à ses rivaux. Le roi Kong-yang (1389-1392) remit le trône à Li Sŏng-gye (1392) : une nouvelle dynastie commençait.


La dynastie Li (ou I) [1392-1910]

Li Sŏng-gye, qui avait pris le titre de Tä-cŏ (« grand ancêtre »), se montra peu enclin à la bienveillance envers ses anciens ennemis. Après avoir éliminé nombre d’entre eux, soit en les faisant mettre à mort, soit en les exilant, il déplaça sa capitale de Kä-sŏng à Han-yang (l’actuelle Séoul) et réorganisa l’administration sur le modèle chinois.

Le roi fut assisté d’un ministère des Affaires générales (eui-čong pu), dirigé par un Premier ministre secondé par un ministre de gauche et un ministre de droite. L’administration proprement dite fut répartie en six départements (čo) : fonctionnaires, finances, rites, armée, travaux publics et justice. Le territoire fut, quant à lui, divisé en huit provinces (to) dirigées par des gouverneurs, représentants du gouvernement central, assistés de fonctionnaires locaux. L’administration fut, comme auparavant, exercée par la classe des yang-ban. Deux autres classes existaient également : celle des hommes libres (yang-in), constituée par les paysans, les artisans et les commerçants ; celle des humbles (č’ŏn-in), comprenant tous les gens exerçant des professions comme celles de chanteur, devin, sorcier, ainsi que les serfs et esclaves.

La nouvelle dynastie adopta le confucianisme comme base des principes de l’action gouvernementale. Le bouddhisme, dont on craignait l’influence et la puissance économique qu’il représentait, fut rapidement interdit. On doit noter cependant que certains rois eurent une attitude bienveillante à l’égard du bouddhisme et que celui-ci garda une grande influence au sein du peuple.

Si, dès les premières années de la dynastie, on assista à la formation de nouvelles factions désireuses de s’assurer des postes importants, l’adoption du confucianisme, ou plus exactement du néo-confucianisme tel que l’avait défini le lettré chinois Zhu Xi (Tchou Hi) au xiie s., suscita la formation d’écoles ; celle du Qi (K’i) et celle du Li ne tardèrent pas à s’affronter. Rapidement, les querelles doctrinales passèrent au second plan, et les membres desdites écoles, qui de plus en plus se regroupèrent par province d’origine, prirent fait et cause pour telle ou telle faction. L’histoire intérieure de la Corée n’est à ce moment qu’une succession de luttes intestines.

C’est dans ce contexte que se produisirent les invasions japonaises. Toyotomi Hideyoshi, qui venait de prendre le titre de shōgun, décida d’attaquer la Chine, et pour cela de faire transiter son armée de 200 000 hommes par la Corée. En avril 1592, cette armée débarquait à Pusan. La Corée, nullement préparée à repousser une telle attaque, demanda aide et assistance aux Ming. Réticents au début, les Chinois comprirent qu’il était de leur intérêt de rejeter à la mer ces ennemis qui traversaient la Corée avec une rapidité fulgurante. Après de durs combats, il ne restait plus, en septembre 1593, que quelques dizaines de soldats japonais dans le sud de la péninsule.

Pendant que les combats se déroulaient sur terre, l’amiral Li Sun-sin (1545-1598) détruisait la plus grande partie de la flotte japonaise. Cet amiral, à qui l’on doit l’invention du bateau cuirassé, est, de nos jours encore, considéré comme un des plus grands héros coréens. En 1597, les Japonais, désireux de prendre leur revanche, débarquèrent de nouveau en Corée. Les troupes chinoises et coréennes leur barrèrent le chemin et, en septembre 1598, apprenant la mort au Japon de Toyotomi Hideyoshi, les troupes japonaises préférèrent rebrousser chemin. Là encore, l’amiral Li Sun-sin se distingua. Mais blessé, il mourut alors qu’il poursuivait les derniers bateaux japonais.

Quelques années après, un nouveau danger se précisait sur la frontière septentrionale. Nurhaei, le chef d’une tribu djurtchet, étendait peu à peu son domaine en faisant passer les tribus voisines sous sa domination. En 1616, il fondait la dynastie des Kin postérieurs (Hou-Jin [Heou-Kin]), qui, rapidement, se heurta à celle des Ming. Ceux-ci, en 1618, demandèrent à la Corée d’envoyer des troupes afin de lutter contre ce nouvel État qui les attaquait ; 13 000 soldats coréens vinrent renforcer l’armée chinoise. Battus au printemps 1619, les survivants s’enfuirent et passèrent à l’ennemi. Nurhaci, qui avait eu une attitude bienveillante à l’égard de la Corée, mourut en 1626. Son fils, beaucoup plus belliqueux, décida de soumettre la péninsule coréenne.

Au début de l’année 1627, une expédition commandée par le prince Amin († 1640) pénétra en Corée et parvint jusqu’à P’yŏng-san (province de Hwang-hä), occupant toute la partie septentrionale. La Corée demanda la paix, qui lui fut accordée à condition que les deux pays aient des relations de « pays aîné à pays cadet ». Cinq ans plus tard, les Mandchous formulèrent de nouvelles exigences. Devant le refus coréen, un corps d’expédition passa à l’attaque, et, au début de l’année 1637, les Mandchous, qui venaient de prendre le nom de Qing (Ts’ing), accordèrent la paix à des conditions rigoureuses : Qing reconnus comme suzerains, otages coréens (princes, fils de ministres) à leur cour, ambassades régulières et lourd tribut, aide militaire si la demande en était faite.