Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

conjonctif (tissu) (suite)

• La substance fondamentale conjonctive occupe l’espace situé entre les fibres et les cellules ; elle constitue en fait le véritable « milieu intérieur ». Elle renferme des corps organiques complexes composés en partie de sucres : les mucopolysaccharides, dont les principaux sont l’acide hyaluronique et l’acide chondroïtine-sulfurique, liés à des protéines. La composition de la substance fondamentale comprend en outre de l’eau et des sels minéraux.

La composition du tissu conjonctif varie avec l’âge ; les variations se font dans le sens d’une diminution des fibres élastiques, d’un épaississement des fibres de collagène et d’une déshydratation progressive de la substance fondamentale.


Rôle du tissu conjonctif

Il est double.

• Rôle de soutien. Il est assuré essentiellement par les fibres de collagène en association étroite avec la substance fondamentale. La résistance du tissu conjonctif est en effet fonction de la richesse en fibres collagènes et de leur orientation (ainsi, la résistance des tendons est liée au parallélisme des fibres). Elle est également fonction de l’état de la substance fondamentale : la cristallisation de la substance fondamentale le long des fibres collagènes assure à l’os sa résistance. La résistance dépend en outre des interactions fibres-substance fondamentale : une interaction étroite donne au cartilage sa structure rigide. À la résistance du tissu conjonctif s’ajoute son élasticité, qui dépend en grande partie de la richesse en fibres élastiques.

• Rôle métabolique. Le tissu conjonctif, capable de retenir l’eau et différents sels, est un lieu d’échanges métaboliques du fait de ses connexions étroites avec les capillaires sanguins et lymphatiques.


Pathologie

Des circonstances pathologiques, c’est-à-dire anormales, peuvent modifier le tissu conjonctif. Certaines sont héréditaires : ainsi, des affections génétiques comme la maladie de Marfan (lésions cardiaques et oculaires, dystrophie osseuse de croissance) ou l’ostéogenèse imparfaite (fragilité osseuse) s’accompagnent d’altérations importantes du tissu conjonctif.

D’autres sont acquises : le tissu conjonctif participe à chaque phase des processus de l’inflammation secondaire à une agression physique, chimique ou biologique ; il intervient dans les processus de réparation des pertes de substance et dans les phénomènes de cicatrisation des plaies ; il est le siège des états œdémateux au cours desquels les structures conjonctives sont envahies par un liquide plus ou moins riche en protéines issu du sang. Enfin, au cours des états de fibrose (ou sclérose), il existe un accroissement anormal des éléments fibrillaires, surtout collagènes. Ces altérations sont le plus souvent localisées, mais, dans certaines circonstances, c’est l’ensemble du tissu conjonctif de l’organisme tout entier qui est menacé. Cela est particulièrement net au cours des affections appelées collagénoses (ou connectivites).


Collagénoses

Ces maladies que sont le lupus érythémateux disséminé, la sclérodermie, la dermatomyosite et la périartérite noueuse se distinguent par le caractère systémique des lésions anatomiques, c’est-à-dire leur grande diffusion dans l’organisme, et par des modifications de structure du tissu conjonctif : perte de l’aspect fibrillaire de la trame conjonctive, qui prend l’aspect de la fibrine (nécrose fibrinoïde), et altération de la substance fondamentale. La cause de ces maladies demeure inconnue ; on invoque volontiers dans leur genèse un mécanisme immunologique. Le rhumatisme articulaire aigu et la polyarthrite rhumatoïde sont parfois intégrés dans ce groupe des collagénoses.

• Le lupus érythémateux disséminé (L. E. D.) atteint surtout la jeune fille et la femme jeune. Il doit son nom à l’éruption du visage qui marque souvent le début de l’affection, éruption rosée qui prédomine aux pommettes et à la racine du nez, dessinant la forme d’un « loup ». Les signes cutanés, parfois révélés par une exposition au soleil, peuvent être plus discrets ou localisés à la paume des mains, à la sertissure des ongles ou aux pulpes des doigts ; ils disparaissent quelquefois spontanément en peu de jours sans laisser de traces. La constatation d’une perte anormale des cheveux (alopécie) est fréquente. Des signes articulaires sont très souvent notés : par leur caractère aigu (polyarthrite aiguë), ils peuvent ressembler à ceux du rhumatisme articulaire aigu ; ailleurs, ils sont chroniques et simulent une polyarthrite rhumatoïde ; mais plus fréquentes encore sont les douleurs articulaires et musculaires sans gonflement des articulations. De la fièvre et un mauvais état général sont habituels. D’autres manifestations peuvent survenir, témoignant de la dissémination des lésions du tissu conjonctif ; elles sont parfois inaugurales ; ailleurs, elles ne surviennent qu’après des mois ou des années d’évolution. L’atteinte pleuro-pulmonaire se traduit par des pleurésies ou des infections pulmonaires aiguës récidivantes. Les lésions rénales se révèlent par une hématurie microscopique (sang dans les urines) ou une albuminurie. Les lésions du système nerveux central peuvent être responsables de troubles psychiques ou de crises d’épilepsie ; celles du cœur peuvent atteindre les trois tuniques (péricarde, myocarde, endocarde) avec une prédilection pour le péricarde (péricardite). Les ganglions et la rate sont parfois augmentés de volume. Chaque signe, y compris les localisations cutanées, étant inconstant, le diagnostic de cette affection est particulièrement difficile, et l’appoint des examens complémentaires est indispensable. Parmi ceux-ci vient en tête la découverte, sur les frottis de globules sanguins, de cellules appelées cellules de Hargraves ou cellules L. E. (lupus érythémateux). La cellule L. E. est un globule blanc qui contient dans la concavité de son noyau une volumineuse inclusion représentant de la substance nucléaire modifiée. Les cellules L. E. n’existent que très exceptionnellement dans l’organisme des malades atteints de L. E. D., mais se constituent in vitro, après incubation. La cellule de Hargraves est le résultat de l’action d’anticorps contenus dans le sérum des malades atteints de L. E. D., anticorps dirigés contre certains constituants du noyau cellulaire. Les autres examens biologiques offrent moins d’intérêt : certains témoignent d’un état inflammatoire (accélération de la vitesse de sédimentation), d’autres peuvent orienter le diagnostic, comme la diminution du nombre des globules blancs (leucopénie). L’évolution du L. E. D. est très variable, tous les intermédiaires existent entre les formes suraiguës mortelles en quelques semaines et les formes peu évolutives, à poussées espacées, bien contrôlées pendant des années par le traitement. C’est au cours des poussées évolutives, favorisées par le surmenage, l’exposition solaire, les chocs affectifs, la grossesse ou l’interruption brutale du traitement, que se manifestent les localisations viscérales, une signification péjorative s’attachant à la survenue d’une atteinte rénale. Le traitement comporte essentiellement des dérivés de la cortisone et des antipaludéens de synthèse.