Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Congo (république populaire du) (suite)

L’économie

L’agriculture de subsistance, encore omniprésente, comporte défrichement et brûlis. Dans le sol, travaillé au plus à la houe, on bouture manioc et patates douces sur des buttes ou des plates-bandes, on plante et on sème arachides, ignames, taros, courges, pois de terre, etc. Localement, les haricots et la banane plantain prennent davantage d’importance, ainsi que le maïs. La culture mélangée, qui échelonne les récoltes, est une pratique générale. Après deux ou trois ans, la parcelle est laissée en jachère. Certains groupes utilisent cependant des méthodes moins élémentaires : enfouissage en vert, écobuage. Cueillette, chasse, pêche complètent la ration quotidienne, qui semble partout suffisante. La pêche a même pris une importance particulière sur le Congo et l’Oubangui, sous la pression de la demande urbaine en poisson fumé.

L’économie commerciale, introduite par la voie de la traite, aujourd’hui moribonde (copal, palmistes), est représentée par les cultures d’exportation, dont se chargent surtout les hommes en milieu traditionnel. Ils établissent de petites plantations familiales, à faible rendement, qui fournissent des tonnages réduits de cacao (1 300 t), de café (2 000 t), de tabac (750 t). Les résultats sont meilleurs pour l’arachide, qui pâtit cependant des difficultés de la collecte. Les plantations industrielles de palmiers à huile, reprises par l’État, végètent (2 600 t d’huile). La seule grande réussite est venue de la canne à sucre, qui pousse dans le Niari (1 000 000 de t de cannes sur 20 000 ha), mais des difficultés récentes ont entraîné la nationalisation de la plantation. On veut relancer la banane dans le Mayombe, implanter le coton près de Loudima. L’élevage des bovins est pratiqué dans quelques grands ranches du Niari (30 000 têtes), tandis que la pêche maritime, limitée par l’étroitesse du marché, s’est tournée en partie vers la capture des thons. L’exploitation la plus active est celle du bois, dont plus de 770 000 m3 sont abattus désormais chaque année (okoumé et limba surtout) ; elle puise maintenant dans les réserves de la zone II, mais il reste la forêt du Nord, malheureusement très éloignée de la côte et plus difficilement accessible.

Si le potentiel hydro-électrique du Congo est considérable, les espoirs d’équipement ne se sont pas encore concrétisés (barrage de Sounda, sur le Kouilou). L’exploitation du gisement sous-marin « Emeraude » a permis à la production de pétrole d’approcher 2 Mt en 1973. La minéralisation du sous-sol est fréquente, mais les réserves sont faibles (or, plomb, zinc, étain) ou difficilement exploitables (fer, phosphate). Cependant, 300 000 t de potasse sont sorties en 1970 des mines de Saint-Paul et de Holle, près de Pointe-Noire, et le calcaire à chaux et ciment est abondant. Les industries sont assez variées. Elles transforment une partie de la production agricole : huileries de palme et d’arachides, savonneries, sucreries (130 000 t), scieries et usines de déroulage (60 000 m3), manufacture de tabac et de cigarettes. D’autres font face aux besoins croissants de la vie quotidienne : brasseries, fabriques d’eau gazeuse et de sodas, cimenterie (80 000 t), entreprises de réparation et de construction métallique, clouterie, cartoucherie, usine de liquéfaction de gaz industriels, fabrique de peinture, moulages de plastique, etc. Une bouteillerie, un grand complexe textile (tissage et impression) ont été achevés récemment. Nombre de ces établissements trouvent une clientèle dans les pays voisins.

Le chemin de fer Congo-Océan (C. F. C. O.), auquel se rattachent la voie d’évacuation du manganèse gabonais et un réseau routier afférent, est l’axe vital de la vie économique. Le nord du pays, en partie accessible par la seule voie d’eau, est moins bien desservi. La situation géographique du Congo lui donne un rôle important de transitaire ; ce rôle explique en partie le trafic des ports de Brazzaville (300 000 t) et de Pointe-Noire (3 Mt). Le commerce extérieur est très déficitaire malgré l’appoint artificiel de la réexportation de diamants, s’ajoutant aux grosses sorties de bois et, depuis peu, de sucre, de ciment et de pétrole. L’ensemble ne compense pas les entrées de produits alimentaires et de biens d’équipement.

P. V.


L’histoire

Le pays se constitua autour de la rive droite du Stanley Pool, cédée en 1880 à la France par le Makoko Ilo, roi des Tékés. Au sein du Congo français, créé en 1891, puis de l’A.-E. F. définitivement élaborée en 1910, il forma la colonie du Moyen-Congo (à l’exclusion du littoral méridional, resté gabonais jusqu’en 1922).

Les populations riveraines du Congo avaient, jusqu’alors, vécu du grand commerce congolais grâce à l’organisation de tribus courtières (Kongos jusqu’au Pool, Boubanguis en amont) qui assuraient l’échange entre les produits d’amont (esclaves, puis bois de teinture, ivoire et caoutchouc) et les marchandises européennes. La pénétration européenne fut lente, traduisant surtout le souci d’atteindre, soit par la Sangha, soit par l’Oubangui, le Tchad et le haut Nil. En brousse, le programme général d’occupation fut lancé en 1909 par le gouverneur général Merlin. Mais l’administration restait rudimentaire, sauf à Brazzaville, devenue capitale de la fédération d’A.-E. F. en 1910 : une centaine de fonctionnaires, dont la moitié étaient des militaires, administraient le pays à la veille de la Première Guerre mondiale.

Les commerçants européens, d’abord étrangers (Compagnie hollandaise Nieuw-Afrikaans-Handelsvennootschap [NAHV], Société anonyme belge pour le commerce et l’industrie), dominaient le commerce de traite. Cherchant à mettre le pays en valeur aux moindres frais, l’État, sous la pression des hommes du parti colonial soucieux d’imiter le système léopoldien, inaugura en 1899, pour trente ans, un système d’exploitation concessionnaire de l’Afrique équatoriale. La plupart des 40 sociétés furent un fiasco ; elles se contentèrent, au nom de leur monopole, de « geler » le territoire interdit au « commerce libre ». Toutes pratiquèrent une économie de pillage fondée sur le travail forcé, imposé par le biais d’un impôt de capitation, payé en nature dans un pays qui ignorait encore le numéraire. Au Moyen-Congo, la seule qui réussit, de façon toute relative, fut la Compagnie française du Haut-Congo (C. F. H. C.), dirigée par les cinq frères Tréchot dans le « pays des Rivières » (Likouala-Mossaka). La compagnie, qui avait d’abord vécu chichement de la cueillette, de l’ivoire et du caoutchouc, s’affirma après la Première Guerre mondiale grâce à l’exploitation de l’huile de palme, dont elle resta (sous le nom de Compagnie française du Haut et Bas-Congo [C. F. H. B. C.] après l’expiration de sa concession) quasiment le seul exportateur entre les deux guerres mondiales. Mais l’exploitation de la population et la médiocrité de l’équipement ne permirent pas au pays de sortir de son dénuement ; les restes de l’affaire devaient être finalement repris par l’État congolais en 1965.