Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Cœlentérés (suite)

Si une alternance régulière se rencontre chez un certain nombre de Cnidaires, comme Obelia, elle subit dans bien des cas une altération plus ou moins profonde par réduction ou disparition totale d’une des phases. Dans le groupe des Scyphozoaires, la phase Méduse prédomine, au moins par la taille ; la phase fixée correspond à une sorte de Polype, appelée scyphistome, qui se segmente transversalement (strobilation) et libère autant de jeunes Méduses que de segments. Chez Pelagia ainsi que chez les Trachyméduses, la phase Polype a disparu.

À l’opposé, la phase Méduse peut régresser ; chez des Hydraires côtiers, les Méduses ne se détachent pas de la colonie. Très souvent, cette phase disparaît complètement, et les animaux ne sont connus que sous forme Polype : c’est le cas pour les Hydres et l’ensemble des Anthozoaires.

Les sexes sont séparés dans la plupart des cas ; mais on connaît quelques cas d’hermaphrodisme : l’Hydre verte (mais pas l’Hydre brune) et la Méduse de Chrysaora par exemple ; les colonies du Corail rouge sont hermaphrodites, mais les individus sont unisexués.

L’ovoviviparité a été observée chez certaines Anémones de mer ainsi que chez l’Hydre. Parfois, il s’agit d’une véritable incubation dans des cavités ou des formations spéciales, comme les corbules d’Aglaophenia ou les chambres de quelques Actinies arctiques. Dans le genre Cumina, on cite le cas d’embryons vivant en parasites aux dépens de la Méduse maternelle. Enfin, le développement d’Hydraires comme Tubularia n’aboutit pas à une larve planula, mais à une actinule, sorte de petit Polype entièrement couvert de tentacules.


Polypier et autres formations de soutien

Les Cnidaires solitaires (Méduses, Hydres, Actinies) ne possèdent généralement pas de squelette ni de revêtement protecteur. On connaît cependant des Madrépores isolés, comme Fungia, dont la base produit un polypier calcaire à cloisons rayonnantes. Le tube gélatineux dans lequel vit le Cérianthe est une production épidermique ; amené à le quitter, l’animal peut en fabriquer un autre.

Dans le cas d’animaux coloniaux fixés, les éléments de soutien prennent une importance considérable et peuvent avoir une origine variée. On donne le nom de polypier au squelette rigide, calcifié ou corné, qu’on rencontre chez un grand nombre de formes. Chez les Madrépores, il a un aspect massif ou ramifié ; il est formé par des cellules ectodermiques, les calicoblastes, qui se chargent d’argonite, une des variétés cristallisées de carbonate de calcium ; il est donc externe par rapport aux animaux de la colonie, alors que, chez le Corail rouge, il est entièrement recouvert par les éléments vivants et résulte de la fusion de spicules. Tubipora doit son nom usuel d’Orgue de mer aux tubes parallèles de son squelette, formés également de spicules associés, mais ceux-ci prennent naissance à l’intérieur de la mésoglée. Chez les Gorgones, le polypier prend l’aspect d’un éventail ramifié, où domine une substance cornée, parfois accompagnée de calcaire ; celui des Antipathaires lui ressemble, mais les branches sont couvertes d’épines.

D’autres formations de soutien et de protection ne méritent pas le nom de polypier, soit parce que leur consistance est molle (mésoglée épaisse et parsemée de spicules isolés d’Alcyonium), soit parce que les colonies sont de petite taille, d’aspect ténu et fragile (périsarc chitineux de l’axe et des logettes chez les Hydraires comme Obelia).


Les Cnidaires dans leur milieu

Tous les Cnidaires sont aquatiques, mais bien peu vivent en eau douce : citons les Hydres (Hydre verte, ou Chlorohydra viridissima ; Hydre brune ou Pelmatohydra oligactis = Hydra fusca), fréquentes dans les eaux calmes ; une Méduse de Craspedacusta a été trouvée dans des cours d’eau.

Sur le littoral, dans la zone de balancement des marées, abondent les Anémones de mer, les Hydraires coloniaux, fixés aux rochers, aux Algues ou aux coquilles. À quelque distance de la côte, les fonds vaseux hébergent les Cérianthes, les « Plumes de mer » (Veretillum, Pennatula, Ptéroïdes), fichées dans le substrat ; les Virgulaires, dont les colonies, effilées, atteignent 1 m de haut, couvrent certains fonds marins d’une véritable prairie. Les Gorgones, ou Eventails de mer, vivent fixées à quelques dizaines de mètres de profondeur et sont fréquentes en Méditerranée, où se rencontre également le Corail rouge. Des conditions écologiques déterminées permettent l’installation de récifs de coraux.

Les principaux Cnidaires pélagiques sont les grandes Méduses et les Siphonophores. Les uns et les autres sont entraînés par les courants, auxquels les mouvements propres des cloches natatoires sont incapables de résister ; les Méduses constituent souvent des bancs qui peuvent être rejetés à la côte. Des déplacements verticaux les font descendre le jour et remonter en surface la nuit. Quant aux Méduses de petite taille, qui alternent avec une phase fixée, elles ne s’éloignent guère des côtes.

Les grandes profondeurs révèlent des animaux fixés comme Galatheanthemum hadale, Actinie de la fosse des Philippines, Aglaophenia galathœa (Hydraire) et certaines Gorgones trouvées à plus de 5 000 m. Des Méduses ont été reconnues à des profondeurs comparables.


Commensalisme, parasitisme, symbiose

Les Cnidaires réalisent des associations originales avec d’autres êtres, en particulier avec des Protistes, des Crustacés et des Poissons.

L’Hydre verte doit sa couleur à la présence d’Algues vertes (Zoochlorelles) dans les cellules de son endoderme. Chez certaines Actinies (Anemonia sulcata) et surtout chez les Cnidaires qui participent à l’édification de récifs, l’endoderme contient des Zooxanthelles symbiotiques. Ces Algues font bénéficier les hôtes de leur activité photosynthétique et expliquent les exigences qu’ils manifestent en matière d’éclairement.

Hydractinia ne se fixe que sur des coquilles habitées par des Bernard-l’Ermite. Deux Anémones de mer en font autant : Sagartia parasitica et Adamsia palliata ; cette dernière réalise une véritable symbiose avec Eupagurus Prideauxi. Un Crabe récifal, du genre Melia, porte dans ses pinces deux petites Anémones de mer (Bunodopsis) qui le protègent et lui facilitent la capture des proies.

Jouissant d’une immunité étonnante à l’égard du venin de leurs compagnons, quelques Poissons vivent en commensaux de redoutables Cnidaires, tels Amphiprion, qui vient nourrir l’Actinie Stoichactis des récifs coralliens, ou Nomeus, qui se réfugie au milieu des filaments pêcheurs de la Physalie.

On connaît quelques Cœlentérés parasites : Hydrichthys vit sur certains Poissons, et Polypodium sur les œufs de l’Esturgeon. Les jeunes Méduses de Cunoctantha puisent leur nourriture sur une autre Méduse du genre Turritopsis.