Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Clementi (Muzio)

Compositeur et pianiste d’origine italienne (Rome 1752 - Evesham 1832).


C’est dans sa ville natale que Clementi fait ses études musicales, sous la direction d’abord de l’organiste Antonio Buroni (ou Boroni) pour le solfège, le clavecin, l’orgue et l’accompagnement, puis du sopraniste Giuseppe Santarelli pour le chant, enfin de Gaetano Carpani pour le contrepoint et la fugue. À neuf ans, après un brillant concours, il se voit attribuer un poste d’organiste ; à treize ans, il peut se dire un musicien accompli. C’est alors qu’un gentilhomme anglais, sir Peter Beckford, ayant remarqué ses dons, l’emmène en Angleterre pour lui permettre d’achever sa formation générale. Il s’y fixera aussitôt après avoir remporté ses premiers succès de pianiste et de compositeur. Il y mourra — n’ayant revu qu’une fois son pays natal — à quatre-vingts ans, couvert de gloire... et d’or ! En effet, grâce à ses innombrables tournées (à Paris, en Europe centrale, en Suisse et surtout à Vienne, où il joua devant Mozart et l’empereur Joseph II), à son inlassable activité de pédagogue (Johann Baptist Cramer, John Field, Friedrich Kalkbrenner et Ignaz Moscheles comptèrent parmi ses élèves), d’éditeur de musique (il exhuma de nombreuses pièces d’orgue ou de clavecin) et de facteur de pianos (sa firme, fondée en 1799, connut un remarquable succès et une renommée mondiale), il était devenu multimillionnaire.

Publiées à partir de 1770, les sonates de clavier constituent l’essentiel de son abondant catalogue. Les premières hésitent entre le clavecin et le pianoforte. Mais Clementi adoptera très tôt ce nouvel instrument. Il en définira et en illustrera la technique dans ses ouvrages didactiques (Gradus ad Parnassum [1817-1826]) et l’esthétique par un élargissement maximum du compas sonore, le recours aux octaves — parfois avec tierces —, non plus seulement comme renforcement mélodique de la main droite ou harmonique de la main gauche, mais comme source de formules mélodiques à la fois originales et heureuses. Une génération entière de pianistes lui sera redevable de cet apport immense et décisif. Au dire de ses amis, Beethoven sut toujours reconnaître ce qu’il devait à Clementi. D’après A. Schindler, il prisait plus spécialement la sonate en fa dièse mineur (opus 26, no 2), dont l’adagio prouve que son auteur connaissait Bach. Mozart — qui avait parlé de Clementi en termes peu flatteurs — n’hésitera pas à bâtir le fugato de l’ouverture de la Flûte enchantée sur le premier thème de l’allégro initial de la sonate en si bémol opus 47, no 2. Quelques sonates de Clementi (sol mineur opus 32, no 2) sont des réductions de symphonies presque toutes perdues. D’où leur ampleur de proportions insolite, d’où la liberté de construction, qui n’aura jamais été poussée aussi loin que dans la sonate en si mineur opus 40, no 2, antérieure aux sonates opus 2 de Beethoven. Après vingt ans de silence, Clementi reprendra la plume, subissant à son tour l’influence indéniable de son cadet, comme en témoignent les Caprices opus 47 et surtout les trois dernières sonates opus 50 dédiées à Cherubini (1821), contemporaines de l’opus 109 de Beethoven. L’importance des développements donne l’impression d’un polythématisme d’une richesse extrême. Dans le final de la deuxième sonate en mineur, le rondo — pratiqué naguère avec bonheur — est abandonné en faveur de l’allégro de sonate classique. L’adoption, pour les mouvements liminaires, d’un même cadre produit une heureuse impression de symétrie. Le langage harmonique, plus riche que jamais, n’y est pas, cependant, poussé aussi loin que dans les variations sur Au clair de la lune, où le thème, immuable, était accompagné tour à tour en majeur, au relatif et en accords chromatiques. Ces originalités rachètent largement les pages par trop scolastiques de ce talentueux trait d’union entre Mozart et Beethoven.

F. R.

 G. Frojo, Muzio Clementi, la sua vita, le sue opere (Milan, 1876). / G. C. Paribeni, Muzio Clementi, nella vita e nell’arte (Milan, 1919). / E. di Laura, L’Estetica nell’arte di M. Clementi (Rome, 1934). / R. Allorto, le Sonate per pianoforte di Muzio Clementi (Florence, 1959).

Cléopâtre VII

(Alexandrie 69 av. J.-C. - id. 30 av. J.-C.), reine d’Égypte (51-30 av. J.-C.).


Dernière représentante de la dynastie des Lagides, fille aînée de Ptolémée XIII Aulète, Cléopâtre partagera le pouvoir successivement avec ses deux frères, Ptolémée XIV Dionysos (roi de 51 à 47), puis Ptolémée XV l’Enfant (roi de 47 à 44), qu’elle épousera l’un et l’autre selon l’usage ; elle régnera ensuite seule.

En 48, elle se brouille avec son frère Ptolémée XIV ; mais des familiers du roi, Pothin, Achillas, Théodotos, excitent le peuple contre elle et l’obligent à s’enfuir en Syrie, où elle se constitue une armée.


César

Cléopâtre est prête à affronter les troupes de son frère, quand débarque à Alexandrie le vainqueur de Pharsale, César*, qui a reçu en présent la tête de Pompée, envoyée par Ptolémée XIV. César s’institue en arbitre entre le roi et la reine. Cléopâtre disperse ses troupes et revient secrètement à Alexandrie sur l’invitation de César : selon Plutarque, elle se serait introduite en fraude, roulée dans une couverture de voyage, et l’aurait ainsi séduit.

César se déclare en faveur de son retour au pouvoir et associe au trône les deux souverains. Mais les partisans de Ptolémée XIV se révoltent. Avec l’appui de Mithridate de Pergame, César l’emporte : le roi égyptien est vaincu et périt noyé à la bataille du Nil (27 mars 47).

Cléopâtre épouse son autre frère, Ptolémée XV l’Enfant, qui n’a guère plus de dix ans et qui mourra en 44, on ne sait trop comment. César demeure en Égypte et, en compagnie de Cléopâtre, remonte le Nil sur un navire somptueux : voyage d’amoureux (telle est l’opinion traditionnelle) ou simple inspection d’un pays qui était en train de tomber au pouvoir de Rome ? Tout porte à conclure à une attitude digne de la part de Cléopâtre face à un César à la tête froide. Celui-ci quitte l’Égypte, et, peu après, Cléopâtre donnera le jour à un fils, nommé Césarion et qu’il est reçu de considérer comme le fils de César. J. Carcopino a émis des doutes, qui paraissent très justifiés, au sujet de cette paternité : le petit Césarion serait né à Rome et serait le fils d’Antoine.