Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Charente. 16 (suite)

Du seuil du Poitou aux confins girondins et des champagnes de la moyenne Charente au Limousin, le département associe des pays différents. À l’est, le Confolentais, c’est-à-dire à peu près les cantons de Confolens, de Chabanais et de Montemboeuf, est un fragment de Limousin. Sur ces plateaux cristallins, dont l’altitude croît vers l’est, les précipitations sont de 800 à 1 000 mm. L’herbe occupe la plus grande partie de ce pays bocager, ne laissant que de faibles surfaces aux cultures, du reste essentiellement destinées à l’élevage. Les paysans, qui vivent en majorité en hameaux ou dans des fermes isolées, tirent la plus grande part de leurs revenus de l’élevage pour la viande : bœufs de race limousine, dont un grand nombre sont vendus dans des foires toujours très fréquentées, et agneaux élevés en plein air. Le négoce des bêtes est la grande activité de petits bourgs tels que Saint-Claud et Montbron. À Chabanais et à Confolens (3 200 hab.) s’y ajoute une petite activité manufacturière.

Au nord, les campagnes de l’Angoumois, modelées dans les calcaires du Jurassique, n’offrent pas des paysages homogènes. Entre Angoulême et La Rochefoucauld, des failles individualisent des plateaux boisés (comme la forêt de la Braconne), troués de quelques clairières, et des fossés suivis par la Charente, le Bandiat et la Tardoire. Au nord de La Rochefoucauld et à l’est de Ruffec, dans la grande boucle que décrit la Charente vers le nord, de vastes épandages de sables tertiaires ont été conservés sur les calcaires : le pays est bocager, sinon boisé, à l’image du Poitou oriental, avec lequel la transition s’effectue insensiblement. À l’ouest de la Charente, le paysage est beaucoup plus ouvert sur les confins du Poitou méridional et de l’Aunis, domaine de la culture des céréales et des prairies pour l’élevage. Au milieu de cette région, la Charente coule dans une vallée vers laquelle convergent les vallons des petits affluents qui morcellent le plateau. Ruffec (4 669 hab.), petit centre agricole, est la seule ville de cette région.

Aussi variées sont les régions situées au sud de la Charente et du parallèle d’Angoulême, régions qu’une frange forestière, la Double saintongeaise, sépare du Bordelais. Sur les confins de la Dordogne, de part et d’autre de la vallée grossièrement méridienne de la Tude (suivie par la voie ferrée de Paris à Bordeaux), le Montmorélien est fortement boisé ; des fermes isolées s’égaillent au milieu de larges clairières, tournées vers la production de lait, dont une grande partie est collectée par la grosse usine de Baignes-Sainte-Radegonde. Plusieurs bourgs, dont Montmoreau, s’égrènent le long de cet axe de passage.

La région de Barbezieux est l’extrémité des Bois saintongeais : d’une altitude voisine de 100 m, le pays est profondément disséqué par les petits affluents de la moyenne Charente et se termine face au nord par une cuesta au profil adouci dominant la Grande Champagne. Les petits villages de quelques centaines d’habitants alternent avec la foule des fermes isolées, parmi lesquelles on note l’existence d’un certain nombre de grands domaines. Dans cette région où les bois accrochent de tous côtés le regard, la vigne tient une place de plus en plus grande vers le nord : on est ici dans le domaine d’une des meilleures appellations de cognac (la Petite Champagne). Barbezieux-Saint-Hilaire (5 516 hab.) est un actif centre de négoce du cognac.

Entre la Né et la Charente, de Châteauneuf-sur-Charente à l’est à Cognac à l’ouest, la Grande Champagne est le cœur du vignoble charentais. C’est une ample dépression creusée dans les calcaires santoniens et parcourue par de toutes petites rivières, alors que la Charente évite cette dépression, notamment entre Jarnac et Cognac, en s’enfonçant dans une gorge étroite et pittoresque. La Champagne est toute tapissée de vignes, alignées autour de fermes opulentes ou de gros bourgs, tels Segonzac et Châteauneuf. Les sols, dérivés des calcaires santoniens, permettent d’obtenir le vin donnant la meilleure eau-de-vie ; de là, la promptitude mise à reconstituer le vignoble après le désastre phylloxérique. La viticulture et la distillation marquent les villes de la Charente par la présence des grands chais en bordure de la rivière, par laquelle se faisaient autrefois les expéditions : Jarnac (5 091 hab.) et plus encore Cognac (22 612 hab.).

S. L.

➙ Angoulême / Cognac / Poitou-Charentes.

Charente-Maritime. 17

Départ. de la Région Poitou-Charentes ; 6848 km2 ; 497 859 hab. Ch.-l. La Rochelle. S.-préf. Jonzac, Rochefort, Saintes et Saint-Jean d’Angély.


Le département de la Charente-Maritime a été formé par la réunion d’une partie de l’Aunis (au nord) et de la Saintonge (de part et d’autre de la moyenne Charente et dans le sud du département). La Charente-Maritime a un peu plus d’habitants qu’il y a un siècle (481 000 en 1861). En effet, si la dépopulation a été vigoureuse jusqu’au lendemain de la Première Guerre mondiale (418 000 hab. en 1921), les effectifs se sont stabilisés pendant un quart de siècle (416 000 hab. en 1946) pour croître ensuite rapidement. Environ la moitié des habitants vivent dans des communes rurales. Les agriculteurs, dont le nombre a diminué plus que de moitié depuis 1901, représentaient en 1968 28 p. 100 du total de la population active, tout comme les ouvriers de l’industrie, dont le nombre est légèrement inférieur à celui de 1901 ; 44 p. 100 des actifs étaient employés dans le secteur tertiaire.

Au nord, l’Aunis et la plaine saintongeaise s’identifient à peu près avec les plaines de calcaire jurassique, où les rivières, telle la Boutonne, coulent au fond de vallées tourbeuses faiblement creusées. La présence de limons et, sur de plus vastes espaces, d’un sol rougeâtre — la terre de groie — donne à cette région une réputation de fertilité non usurpée. Le climat est relativement sec et ensoleillé : les précipitations, qui excèdent 800 mm à l’est du méridien de Saint-Jean-d’Angély, diminuent vers la côte. Les hommes vivent en gros villages proches les uns des autres, au milieu d’un paysage ouvert ; le remembrement, presque achevé, a substitué dans ces campagnes les grandes parcelles trapues aux champs en forme de lanières. Pour satisfaire les exportations par La Rochelle, l’Aunis fut, aux xviiie et xixe s., un grand pays viticole. Ruinés par le phylloxéra, les paysans ne replantèrent que de très petites surfaces en vignes, dont une faible part seulement de la production est destinée à la distillation (et donne une eau-de-vie de qualité moyenne). L’Aunis a retrouvé une vocation fromentale et s’est aussi tourné vers l’élevage laitier fondé sur les prairies naturelles et artificielles et organisé selon le système coopératif. L’Aunis est un grand fournisseur de beurre de qualité. En Saintonge, Saint-Jean-d’Angély (10 317 hab.) est un marché agricole faiblement industrialisé.