Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Carpe

Poisson Téléostéen des eaux douces, recherchant les eaux calmes et chaudes, omnivore et faisant l’objet d’un élevage intensif (carpiculture ou cypriniculture).


La Carpe peut être choisie comme type de la famille des Cyprinidés (« Poissons blancs » de nos rivières) et de l’ordre des Cypriniformes (anciens Ostariophysaires), qui groupe plus de 5 000 espèces.


Description

La Carpe (Cyprinus carpio) montre un grand nombre de caractères primitifs pour un Poisson osseux. Les nageoires pelviennes sont en position abdominales ; les rayons des nageoires sont toujours segmentés et mous (type malacoptérygien), bien que certains d’entre eux puissent s’ossifier secondairement ; la vessie natatoire est reliée à l’œsophage par un canal pneumatique (disposition physostome). Un caractère hautement spécialisé propre aux animaux de cet ordre est la présence, entre la vessie natatoire et le labyrinthe de l’oreille, d’une chaîne de cinq osselets de Weber, empruntés aux quatre premières vertèbres troncales ankylosées. Cet appareil est un amplificateur des sons qui ont fait résonner la paroi vésicale antérieure.

Outre ces caractères généraux, présents chez tous les Cypriniformes, la Carpe présente une forme ovale allongée et porte des écailles grandes et lisses (cycloïdes) ; la bouche, terminale, est munie de quatre barbillons labiaux ; les nageoires dorsale et anale sont précédées d’un fort rayon ossifié denté ; les arcs branchiaux portent des dents pharyngiennes puissantes ; la coloration du type sauvage est d’un brun doré sur le dos, passant progressivement à un blanc jaunâtre sur le ventre.


Biologie

La Carpe est un Poisson d’eaux calmes, chaudes et riches en végétation aquatique, capable de supporter jusqu’à 25 °C. La reproduction a lieu au printemps, dans des eaux de 17 à 20 °C. Les mâles sont souvent plus jeunes et plus petits que les femelles ; l’intersexualité protandrique n’est pas rare et explique que les Carpes de grande taille soient presque toujours des femelles. La ponte peut comporter jusqu’à un million d’œufs, qui adhèrent d’eux-mêmes aux plantes aquatiques. L’incubation dure une semaine. Les alevins à l’éclosion mesurent 5 mm environ et résorbent leur vésicule vitelline en quatre jours. La croissance est assez rapide : la Carpe peut vivre douze à vingt ans (les Carpes centenaires sont une légende), et son poids maximal atteint une quinzaine de kilogrammes.

La Carpe est omnivore, mais se nourrit principalement du plancton et des Invertébrés présents sur le fond : Vers, larves, Mollusques divers. On accélère sa croissance dans des parcs d’élevage où on lui fournit un plancton animal abondant. Les mâles sont matures à deux ans, les femelles à trois ans. Originaire d’Europe orientale et d’Asie Mineure, introduite en France vraisemblablement depuis l’époque gallo-romaine, la Carpe a fourni de nombreuses races d’élevage : Carpe cuir, Carpe miroir, Carpe bossue sont des races sélectionnées pour l’augmentation de la musculature aux dépens du squelette et des écailles ; à la fin du xixe s., on a introduit en outre la Carpe dorée, obtenue en Extrême-Orient.


Autres Cyprinidés

La France abrite de nombreuses autres espèces de la famille des Cyprinidés : le Carassin, dont le Poisson rouge est la forme d’élevage, les Barbeaux, le Goujon, la Tanche, le Hotu et la Soiffe, la Brème, le Gardon et le Rotengle, la Bouvière (qui dépose ses œufs dans la cavité palléale d’une Moule dulcicole), le Spirlin, l’Ablette, les Chevaines, l’Ide (avec l’Orfe comme variété d’élevage) et le Vairon en sont les principales formes. Tous les Cyprinidés sont cosmopolites et ne manquent qu’en Amérique du Sud, en Australie, en Polynésie et à Madagascar. On les a introduits et acclimatés dans de nombreuses régions. L’hybridation interspécifique et intergénérique est fréquente et donne souvent des hybrides féconds, comme la Carpe de Kollar, obtenue en croisant un Carassius mâle et un Cyprinus femelle.


Autres Cypriniformes

Les Poissons voisins de la Carpe sont répartis en quatre sous-ordres. Les Characoïdes sont des Poissons des eaux douces d’Afrique et d’Amérique du Sud, parmi lesquels de redoutables prédateurs comme le « Chien » du Congo ou le Piranha* d’Amazonie. Les Gymnotoïdes se rencontrent en Amérique du Sud ; l’espèce principale, Electrophorus electricus, porte de redoutables organes électriques (v. Gymnote). Les Cyprinoïdes comprennent, outre les Cyprins, dont la Carpe est le type, les Loches (Cobitidés), remarquables par leur respiration intestinale, et les Homaloptères, adaptés aux eaux torrentielles. Les Siluroïdes, enfin, ou Poissons-Chats, constituent un groupe très abondant en espèces. (V. Silure.)

R. B.

 L. Bertin et C. Arambourg, « Systématique des Poissons » dans Traité de zoologie sous la dir. de P.-P. Grassé, t. XIII, fasc. 3 (Masson, 1957). / C. J. Spillmann, Faune de France. Poissons d’eau douce (Lechevallier, 1961).

Carpeaux (Jean-Baptiste)

Sculpteur et peintre français (Valenciennes 1827 - Courbevoie 1875).


La vie et l’œuvre de Carpeaux sont à l’image de l’homme : « Une nature de nervosité, d’emportement, d’exaltation » (Journal des Goncourt, 3 sept. 1865). Né dans une famille modeste, il parvient, par la conscience exigeante de sa vocation, à franchir tous les obstacles, d’abord aidé dans cette ascension par le si remarquable milieu valenciennois d’artistes et d’amateurs d’art. À Paris, où sa famille s’est transportée, il entre, après diverses vicissitudes, à l’École des beaux-arts (1844) et bientôt dans l’atelier de Rude*, puis, par souci de réussite académique, dans celui de Francisque Duret. En 1854, il obtient enfin le prix de Rome.

À la villa Médicis, il dessine autant qu’il sculpte, surtout attiré par le spectacle de l’Italie moderne. En prenant, avec le Pêcheur napolitain à la coquille (Louvre), un « sujet tiré de la nature », il ne rend pas seulement hommage à son premier maître, mais prend ses distances avec l’enseignement de l’école. Mais c’est avec Ugolin (1858-1860, Louvre) qu’il s’affirme. Carpeaux choisit là un sujet qui contrevient au règlement et s’attaque au difficile problème d’un groupe de cinq personnages, dépassant ainsi le Laocoon hellénistique. Il veut à la fois « exprimer les passions les plus violentes et y attacher la tendresse la plus délicate par la science de la forme » (lettre à Dutouquet, 2 mars 1861). C’était, pour le disciple réaliste de Rude, se poser comme le véritable héritier de l’école romantique, tout en s’inscrivant, par le nu, dans la tradition héroïque. Une telle recherche du contraste, un sentiment si dramatique pouvaient faire penser à Michel-Ange.