Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Canada (suite)

Le Canada n’a qu’une petite flotte marchande (2,5 millions de tonneaux), mais ses premiers ports ont une importance mondiale. Vancouver (33,3 Mt) a récemment devancé Montréal (20,1 Mt), ce qui illustre l’importance que prend le Pacifique dans l’économie canadienne. Sept-Iles (20,3 Mt) et Port-Cartier (10 Mt) sont les premiers ports exportateurs de minerai de fer (vers l’Europe et la côte atlantique des États-Unis).

La balance commerciale est régulièrement positive, celle des services, négative. Les entrées de capitaux à long terme excèdent toujours les sorties. Avec les États-Unis en particulier, la balance des comptes, déficitaire, contraint le Canada à accepter des investissements dont les revenus augmenteront à leur tour le déficit. À moins d’accroître ses exportations, le Canada verra se renforcer sa dépendance à l’égard des États-Unis.


Les problèmes régionaux

Un des problèmes les plus importants aujourd’hui est celui des disparités de revenus et de niveau de vie entre les provinces ou groupes de provinces et à l’intérieur même des provinces. On présente souvent les provinces laurentiennes comme un bloc, sous prétexte qu’elles rassemblent près des deux tiers de la population du Canada et qu’elles concentrent 80 p. 100 de la production industrielle, 50 p. 100 de la production minière et 45 p. 100 de la production agricole. En fait, il existe une disparité très marquée entre le Québec et l’Ontario, cette dernière province ayant l’avantage de la population et la supériorité de la production industrielle (la moitié de celle du Canada), agricole et minière. Le revenu moyen par habitant au Québec n’atteint pas 80 p. 100 de celui de l’Ontario (2 627 dollars canadiens contre 3 369 dollars en 1970). Si l’on considère que la région de Montréal connaît à peu près les normes ontariennes, on mesure l’écart réel entre les autres régions du Québec et l’Ontario.

Les disparités ne sont pas moindres en effet à l’intérieur du Québec. Si l’on retient les sept critères de pauvreté de l’ARDA (mortalité infantile, bas salaires urbains, bas niveau d’instruction, chômage, faibles revenus des familles rurales, bas salaires ruraux non agricoles, fermes à faible revenu), seules la plaine et la région de Montréal ainsi que la partie ouest des Cantons de l’Est ne répondent à aucun d’entre eux. Au contraire, ils s’appliquent tous au « Bas du Fleuve » et à la Gaspésie. La proportion de salariés ruraux non agricoles ayant gagné moins de 2 000 dollars (salaire annuel de misère selon les normes nord-américaines) dépasse en 1961 50 p. 100 dans la plus grande partie du Québec, exception faite de la vallée du Saint-Laurent entre Québec et Montréal.

Les provinces atlantiques ont le revenu par tête le plus bas du Canada avec une moyenne de 2 033 dollars canadiens (moyenne nationale : 2 913). Terre-Neuve cumule tous les critères de pauvreté, tandis que plusieurs critères, pas toujours les mêmes, frappent nombre de régions des autres provinces.

Les Prairies sont confrontées à des problèmes particuliers en rapport avec la monoculture du blé. L’un d’entre eux ne peut recevoir de solution appropriée : c’est celui des aléas climatiques ; les précipitations, peu abondantes, sont surtout irrégulières : il y a des années arides et des années trop pluvieuses ; la saison thermique de végétation est également très variable selon les années. Certains pensent que la culture du blé est marginale dans ces conditions climatiques et que la mise en valeur des Prairies sous cette forme représentait la solution de facilité pour des colons exploitant des terres vierges et disposant, avec les chemins de fer, de possibilités de transport massif. La reconversion vers l’élevage a été mentionnée précédemment. L’abandon de la monoculture du blé sera accéléré à brève échéance, car, d’une part, nombre de voies ferrées sont supprimées ou le seront incessamment dans la zone du blé, et, d’autre part, les mines, l’industrie et les activités urbaines attirent de plus en plus la population des régions rurales. Ce déplacement se fait au profit de Winnipeg et de l’Alberta (surtout entre Calgary et Edmonton).

La Colombie britannique offre l’exemple d’une organisation nouvelle de l’espace géographique comparable à celle que connaissent d’autres pays blancs du Pacifique, l’Australie et surtout la Californie. La majeure partie de la population tend à se rassembler dans un unique foyer urbain (Victoria-Vancouver) dominé par l’industrie et les services et au profit duquel est aménagé le territoire environnant, peu peuplé, chargé de l’approvisionner en vivres (vallées fruitières), en énergie (Columbia, Fraser, rivière de la Paix) et en matières premières (forêts, régions minières). La pêche, la conserverie du saumon, le sciage du bois, jadis actifs sur tout le littoral de la province, se sont progressivement concentrés à Vancouver-Victoria ou à proximité de ce tandem urbain. Une société prospère est fondée sur cette organisation du territoire ; la Colombie a un revenu par habitant très proche de celui de l’Ontario.

L’immense Nord a aussi ses problèmes ; ceux-ci sont différents dans le Subarctique et dans l’Arctique. Dans le Subarctique, qui correspond à peu près à la forêt boréale, les villes minières comme Schefferville, Gagnon, Chibougamau, Thompson, Flin Flon, Yellowknife ont le caractère incertain et provisoire de ce qui repose sur une activité unique et soumise aux variations de la conjoncture. Seul l’attrait de hauts salaires fixe momentanément une population rendue instable par l’atmosphère déprimante de ces oasis isolées les unes des autres.

Une frange pionnière de colonisation rurale s’est établie à la lisière du Subarctique : périphérie de la cuvette du lac Saint-Jean, Abitibi-Témiscamingue, Clay Belt du nord de l’Ontario, colonies ouvertes dans la forêt boréale au nord du Parc des Prairies ; on peut adjoindre à cette frange les établissements des Laurentides du Québec et de l’Ontario. Dans cette dernière, la plupart des fermes sont marginales, car le climat n’est pas favorable à l’agriculture : la période sans gelées, d’une durée moyenne de 85 jours à Cochrane ou à Kapuskasing (Clay Belt d’Ontario), peut se réduire à 15 jours ou à 3 semaines. Cette frange pionnière, particulièrement celle du nord des Prairies, appartient au domaine de la pauvreté : faible revenu agricole, bas niveau d’instruction, mortalité infantile élevée.