Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

budget (suite)

• L’accélération de la discussion de la loi budgétaire. Sous la IIIe République, aucun délai n’était imparti au Parlement pour voter le budget ; les limitations prévues par la Constitution de 1946 n’étant pas assorties de sanctions, elles se sont révélées inefficaces. La législation actuelle impose donc des délais stricts pour le vote de la loi de finances. Tout d’abord, le projet de budget doit être déposé sur le bureau de l’Assemblée au plus tard le premier mardi d’octobre ; le Parlement dispose alors, pour se prononcer, d’un délai global de 70 jours. L’Assemblée doit statuer en première lecture dans un délai de 40 jours ; cette période écoulée, elle est éventuellement dessaisie, et le projet est transmis au Sénat, qui dispose à son tour d’un délai de 15 jours. Il reste, dans le cadre du délai global, une quinzaine de jours pour les navettes budgétaires, celles-ci pouvant d’ailleurs être limitées à une seule par le procédé de la commission mixte paritaire.

Si, dans le délai de 70 jours, le Parlement ne s’est pas prononcé, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par voie d’ordonnance.

Lorsque le retard est imputable au gouvernement, qui n’a pas effectué le dépôt du projet en temps utile pour permettre le déroulement normal de la procédure, deux possibilités s’offrent à lui :
— soit, 10 jours avant la fin de la session, demander à l’Assemblée nationale de se prononcer par vote séparé sur la première partie de la loi de finances et soumettre ce projet au Sénat selon la procédure d’urgence ;
— soit, 48 heures avant la clôture, déposer un projet de loi l’autorisant à percevoir les impôts existants jusqu’au vote définitif de la loi de finances.

Dès que l’une ou l’autre de ces autorisations a été acquise, le gouvernement promulgue des décrets portant répartition des crédits correspondant aux « services votés ».

Ainsi, la lenteur des Chambres est sanctionnée par la perte de leurs prérogatives, alors qu’au contraire le retard du gouvernement lui ouvre des possibilités particulières.

• La réduction du nombre des votes. C’est surtout pour les dépenses que la nécessité d’une limitation du nombre de votes s’est fait sentir. En effet, en France, l’autorisation n’est pas donnée en bloc, mais par catégorie de dépenses. Ces dépenses sont groupées par titres, les titres étant eux-mêmes divisés en parties, les parties en chapitres, les chapitres en articles, les articles en paragraphes.

Avec l’affirmation de son pouvoir, le Parlement est allé de plus en plus loin dans la voie de la spécialisation du vote ; aux termes de la loi du 15 septembre 1871, « le budget est voté par chapitre et aucun virement ne peut être fait d’un chapitre à un autre ». La notion de chapitre n’a jamais été précisée d’une façon nette ; il est admis qu’un chapitre ne doit concerner que « des services corrélatifs et de même nature » et ne jamais réunir des dépenses de personnel et de matériel. Mais, alors que le nombre de chapitres était inférieur à 300 à la veille de 1870, il approchait de 5 000 en 1952. Dès lors, le vote par chapitre enlevait toute signification au débat budgétaire. Un effort a donc été fait pour réduire le nombre de ces chapitres ; ce palliatif étant insuffisant, d’autres dispositions ont été adoptées qui établissent une distinction entre les « services votés » (crédits nécessaires pour faire fonctionner les services dans des conditions déjà approuvées précédemment) et les « mesures nouvelles » (dépenses dont le Parlement n’a pas encore approuvé le principe). Désormais, les « services votés » sont adoptés en bloc, les « mesures nouvelles » faisant seules l’objet d’un vote par titre et par ministère. Le chapitre reste l’unité budgétaire de base, l’unité de consommation de crédit, mais une seule autorisation concerne plusieurs chapitres. Actuellement, le nombre de votes est approximativement le suivant :
budget général
recettes : 1 vote ;
services votés : 1 vote ;
mesures nouvelles : 90 votes (environ).
budgets annexes
recettes : 9 votes ;
dépenses : 9 votes.
comptes spéciaux
recettes : 6 votes ;
dépenses : 6 votes.
soit, au total : 122 votes (environ).

Cet ensemble de mesures restrictives s’est avéré efficace, et le budget est actuellement adopté en temps utile ; toutefois, il est nécessaire de compléter les dispositions initiales par des mesures en cours d’exercice.


Les collectifs budgétaires

L’exécution du budget n’est jamais rigoureusement conforme aux prévisions : les évaluations primitives peuvent avoir été insuffisantes, des événements imprévus peuvent survenir. Le gouvernement est amené à demander aux Chambres de nouveaux crédits : ceux-ci sont accordés par les lois de finances rectificatives appelées « collectifs budgétaires ». Ces collectifs sont préparés et votés dans les mêmes conditions que les lois de finances ordinaires.


Portée de l’autorisation budgétaire

La sanction du Parlement donne au budget le caractère de loi, mais la loi de finances n’est pas une loi ordinaire, c’est-à-dire un acte-règle édictant des dispositions générales et impersonnelles ; c’est un acte-condition permettant l’accomplissement de certaines opérations.
— Pour les recettes, l’autorisation budgétaire implique l’obligation de les percevoir et de ne percevoir qu’elles.
— Pour les dépenses, l’autorisation budgétaire ne constitue qu’une faculté d’engager la dépense ; un crédit qui devient sans objet en cours d’exercice peut être annulé par décision du ministre des Finances avec l’accord du chef du département ministériel intéressé ; ainsi s’explique que, dans la loi de finances de 1970, aient été prévus des crédits « optionnels », c’est-à-dire des crédits à utiliser éventuellement en fonction de l’évolution économique. Par ailleurs, l’inscription d’un crédit, en dehors de toute autre disposition législative, ne saurait être constitutive d’un droit au profit d’un particulier, car, si le budget régit les rapports internes de l’Administration, il ne concerne pas les rapports entre l’Administration et les particuliers.