Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bourges (suite)

La ville et ses fonctions

Historiquement brillante, la position de Bourges n’est pourtant pas, géographiquement, sans faiblesses. Victime de la centralisation capétienne, qui ôtait progressivement, au profit de Paris, leur primauté aux vieux courants de relation interprovinciaux, laissée à l’écart des grandes communications modernes par la route au xviiie s., par le chemin de fer au xixe (Paris-Toulouse à l’ouest par Vierzon, Paris-Clermont-Ferrand à l’est par Nevers), privée, par la réforme administrative de 1790, de son hinterland bas-berrichon, qui constituait le département de l’Indre, Bourges, qui avait pu compter 40 000 habitants aux premiers siècles de notre ère, n’en avait plus que 12 000 à la fin du xviiie s.

Sa fonction régionale ne s’exerce guère aujourd’hui que dans le cadre d’un département peu peuplé (316 000 hab. ; 44 hab. au km2). L’animation d’une foire-exposition suivie, l’essor d’une banque locale, la diffusion d’un quotidien, l’exploitation par le tourisme d’un riche et prestigieux patrimoine monumental et artistique, son audience juridique (cour d’appel) et ecclésiastique (archevêché) rehaussent son appareil tertiaire, sans le sortir fondamentalement d’un rôle d’exécution courante (17 500 emplois sur 37 000, soit 47 p. 100).

Mais Bourges devait trouver dans l’industrie, aux xixe et xxe s., les éléments d’un profond renouveau. Héritière de vieilles activités rurales (forges dispersées sur les concrétions ferrugineuses des plateaux, travail de la laine alimenté par l’élevage du mouton), elle voyait s’installer en 1847, avec la concentration des entreprises, une importante fonderie, et dans les années 1850 des ateliers de confection et de lingerie. Servie par sa position à l’écart des frontières du pays, elle obtenait de l’État, entre 1861 et 1870, l’implantation d’établissements de fabrications militaires (arsenal d’artillerie, École centrale de pyrotechnie, expérimentation du matériel) destinés à remplacer des fonderies vétustés ou exposées (Toulouse, Strasbourg, Douai) et auxquels s’adjoignait en 1946, transférée de Fontainebleau, l’École supérieure d’application du matériel. L’effort de décentralisation poursuivi en France entre les deux guerres y amenait en 1932 l’installation d’une usine parisienne d’aéronautique spécialisée dans la fabrication d’avions, d’avions-cargos, de voilures et, depuis 1958, d’engins téléguidés. Bourges accueillait en 1953, sur sa commune limitrophe de Saint-Doulchard, une grosse usine de pneumatiques (Michelin). Avec ses autres activités industrielles, bâtiment, chaudronnerie, décolletage, appareils de chauffage, robinetterie, électronique, fraises dentaires, imprimerie, engrais, huilerie, biscuiterie, confiserie, liqueurs, elle emploie dans son secteur secondaire 51 p. 100 de sa population active, l’une des plus fortes proportions de la région.

Les ambitions de Bourges vont plus loin. Soucieuse d’affermir sa position régionale, elle s’efforce de développer ses activités culturelles. Après la création d’une École nationale des beaux-arts (1881), d’une École nationale de musique (1921), d’un Conservatoire national des arts et métiers (1959), d’une École de droit (1961), elle se distinguait en 1961 par celle d’un Centre dramatique national, la « Comédie de Bourges », en 1964 par celle d’une Maison de la culture, la première fondée en France ; elle aspire aujourd’hui à un rôle universitaire. Mal à l’aise, face à Orléans et à Tours, dans une région de programme (Région Centre) où elle assistait, impuissante, en 1960, au partage des instances supra-départementales entre ses deux voisines, elle envisagerait volontiers un nouveau découpage territorial où, son département grossi de ceux de la Nièvre et de l’Allier dans le cadre d’une communauté d’intérêts Berry-Nivernais-Bourbonnais, elle pèserait d’un meilleur poids. Elle mise sur l’établissement d’un grand itinéraire international ouest-est, Atlantique-Suisse, qui, brisant la puissance des courants centralisateurs parisiens, ferait d’elle une importante étape routière, ferroviaire, voire fluviale (projet de liaison à grand gabarit Nantes-Saône par la Loire et le Cher).

La ville s’étend. Tout autour de la cité ancienne, ville-musée où reste concentré le commerce et que ceinture, à l’emplacement d’un rempart du xiie s., une ligne de boulevards ombragés, se développent depuis un siècle des quartiers modernes. Vers le sud-est, Bourges s’ouvre de plain-pied sur le plateau (établissements militaires prolongés sur 32 km par le camp d’Avord, quartier de Gionne, où, sur 35 ha, s’érigent 1 400 logements). Vers le nord, derrière la gare, se sont installés, débordant sur Saint-Doulchard, usines et zone industrielle (52 ha), lotissements et grands ensembles (Chancellerie-Gibjoncs : 5 000 logements), établissements d’enseignement. Vers l’est et vers l’ouest, de part et d’autre des routes de La Charité-sur-Loire et de Marmagne, deux autres zones industrielles sont en cours d’aménagement. Autant de signes d’une évolution nouvelle, propre à effacer les effets d’un destin longtemps capricieux.

Y. B.

Bourges, ville d’art

La ville a conservé la majeure partie de ses remparts du ive s. ; par ailleurs, les riches collections gallo-romaines du musée permettent d’évoquer la vie publique et privée dans la cité des Bituriges.

La ville du Moyen Âge s’est étendue autour de l’oppidum, protégée par l’enceinte de Philippe Auguste, dont il ne reste que deux tours. De l’église Saint-Aoustrille et du sanctuaire dédié à saint Ursin, il subsiste une porte du xie s. et un tympan du xiie, signé Giraldus.

La cathédrale

Sous les deuxième et troisième travées du chœur de la cathédrale se trouve une salle perpendiculaire à l’axe de l’édifice par laquelle on parvient au petit caveau dit « des archevêques ». Cet ensemble est antérieur à l’église romane, dont les meilleurs témoins sont les deux belles portes latérales abritées sous des porches de la fin du xiiie s.