Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bourges (suite)

La cathédrale gothique semble avoir été édifiée en deux campagnes : l’une concerne la crypte et le chœur (1195-1214) ; l’autre intéresse la nef et la façade (1225-1255). L’élévation intérieure à cinq étages et l’évasement du vaisseau central vers le rond-point, auquel correspond la disposition inverse des bas-côtés, donnent à la cathédrale de Bourges un caractère exceptionnel. Par ses voûtes sexpartites qui font alterner piles fortes et piles faibles, c’est un édifice de transition entre les cathédrales à tribunes et à double bas-côté du type de Notre-Dame de Paris et celles de Reims ou d’Amiens. Les vitraux des xiiie, xve et xviie s. constituent un merveilleux musée de la peinture sur verre. Des déplorables travaux du xviiie s., qui supprimèrent le jubé et tout le mobilier du chœur pour les remplacer par une décoration rocaille de Michel-Ange Slodtz*, il ne reste presque rien.

La façade occidentale est percée de cinq portes surmontées de gables et entourées de profondes archivoltes : les portes Saint-Ursin et Saint-Étienne datent de 1250 ; celle du centre, où figure un admirable Jugement dernier, est de 1265 ; la porte de la Vierge a été complétée au xvie s. ; la porte Saint-Guillaume a été reconstruite après l’écroulement de la tour nord en 1506. Le centre de la façade est occupé par une énorme fenêtre, le « Grand Housteau », due aux libéralités de Jean de Berry* et exécutée sous la direction de Gui de Dammartin vers 1390.

L’architecture civile

Du palais élevé à Bourges par le duc Jean, il ne subsiste qu’une belle salle ; la Sainte-Chapelle, œuvre de Drouet de Dammartin, qui a été détruite en 1757, abritait le tombeau du mécène, commandé par Charles VII à Jean de Cambrai entre 1422 et 1438 (restes conservés dans la crypte de la cathédrale).

Le xve s. est représenté à Bourges par un des plus beaux édifices civils gothiques qui soient parvenus jusqu’à nous : l’hôtel Jacques-Cœur, achevé en 1453, au moment même de la disgrâce du grand argentier. Sa façade occidentale, de caractère militaire, contraste avec la cour d’honneur, entourée de portiques, et avec la décoration raffinée de l’ensemble. L’ancien hôtel de ville, devenu le petit lycée, est de peu postérieur : on y retrouve les guetteurs figurés se penchant à l’appui de fausses fenêtres.

La Renaissance berrichonne a enrichi la ville de l’hôtel Cujas (construit par l’architecte Guillaume Pelvoysin vers 1515), qui abrite le musée gallo-romain et les collections de peinture, et de l’hôtel Lallement, où se voient des ensembles mobiliers des xviie et xviiie s.

Enfin, le xviie s. a marqué de son empreinte un peu lourde le couvent des Augustins, la maison des Ursulines, le grand séminaire, devenu la caserne Condé, et le palais de l’Archevêché, transformé en hôtel de ville.

M. B.

 G. Hardy et A. Gandilhon, Bourges et les abbayes et châteaux du Berry (Laurens, 1912). / A. Boinet, la Cathédrale de Bourges (Laurens, 1954). / R. Branner, la Cathédrale de Bourges et sa place dans l’architecture gothique (Tardy, 1963).

➙ Berry / Centre / Cher (département du) / Cœur (Jacques).

Bourgogne

Région économique constituée par les départements de la Côte-d’Or, de la Nièvre, de Saône-et-Loire et de l’Yonne ; 31 600 km2 ; 1 571 163 hab. (Bourguignons).



La formation de la région

La Bourgogne a toujours constitué une province prestigieuse ; dans le domaine religieux, dans le domaine artistique, elle a marqué de manière décisive le génie national français. Ses vins ont fait connaître son nom dans le monde entier.

La Région est, après le Limousin, l’ensemble le moins densément occupé de France : il y a une opposition curieuse entre la richesse de l’histoire et la faiblesse actuelle de l’emprise humaine. Dijon n’a pas une dimension suffisante pour équilibrer l’attraction de Lyon au sud, de Paris à l’ouest et au nord-ouest. Les zones de peuplement urbain et industriel sont peu étendues. La difficulté des liaisons entre Dijon et le Nivernais renforce les tendances centrifuges manifestes dans cet espace.

Tous les territoires de l’actuelle Région de programme ont été, à des époques diverses, intégrés dans la construction bourguignonne. Mais les hésitations de l’histoire montrent la difficulté qu’il y avait là à construire un ensemble fortement cohérent. La Bourgogne s’est bâtie autour d’une série de seuils : passages entre la Saône et la Marne, la Saône et la Seine au nord (mais la Bourgogne ne les contrôle que partiellement), routes faciles de la Saône à la Loire à travers les collines de l’Autunois, du Mâconnais et du Charolais. Les voies enjambaient les basses terres, et les couloirs de vallée, qui semblent faciliter encore le passage, n’ont pris d’importance qu’avec la construction des canaux, puis celle des chemins de fer. Les vallées sont orientées d’ailleurs du nord-est au sud-ouest, alors que les échanges les plus actifs se nouent, depuis toujours, du sud-est au nord-ouest.

La province de Bourgogne, esquissée après les invasions, a tiré sa force de son rôle d’étape, de relais entre les pays mosans, mosellans et les plaines du Rhône, entre le Bassin parisien et les passages alpins et l’Italie. La multiplicité des itinéraires incitait à la dispersion de la vie urbaine. Cluny, à l’écart des grandes routes, semble-t-il, a été un des foyers majeurs de la chrétienté. Autun, Charolles, dans les parties hautes, eurent longtemps autant d’importance que les villes de plaine ou de vallée : Chalon, Beaune, Dijon à l’est ; Auxerre, Tonnerre, Avallon, Paray-le-Monial à l’ouest.

Il fut un moment, entre le xie et le xiiie s., où la Bourgogne se trouva au cœur de tous les courants de relation de l’Occident : la splendeur des églises romanes (Vézelay, Paray-le-Monial, Tournus, Cluny, pour ce qui en subsiste) et l’importance des foyers de vie monastique, avec Cluny, mais aussi Cîteaux et, tout proche, quoique en terre champenoise, Clairvaux, témoignent de cette période faste.