Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Behan (Brendan)

Auteur dramatique irlandais (Dublin 1923 - id. 1964).


Dès la naissance de Brendan Behan, son existence est placée sous le signe de l’amertume, de la révolte, de la violence et de la prison. Amertume de son père, incarcéré pour résistance politique quand son fils vient au monde, pendant la guerre civile. Révolte du fils, qu’on trouve à huit ans dans les scouts irlandais républicains, à quatorze ans dans l’I. R. A. (Irish Republican Army). Révolte qui l’entraîne dans un cercle de violences et de prisons aboutissant de façon inéluctable à de nouvelles amertumes. À vingt-trois ans, il a déjà passé près de huit années de sa jeunesse dans divers établissements pénitentiaires anglais (Borstal Boy, 1957 ; Confessions of an Irish Rebel, 1963). Il a connu aussi la pire douleur pour un catholique résistant irlandais : l’excommunication. Il dira le poids de cette peine, la « solitude en exil de la seule Église que j’aie jamais connue ou prise au sérieux, l’Église de mon peuple, de mes ancêtres chassés dans les montagnes... ».

On pourrait être tenté de chercher dans ce contexte psychologique l’explication non seulement de son incapacité d’adaptation sociale, mais aussi d’une forme de recherche d’oubli dans l’alcool, et peut-être encore, par un certain biais, de sa vocation littéraire (The Scarperer [l’Escarpeur], 1953). Pourtant, Behan s’en défend avec vigueur. Ce non-conformiste qui, à l’instar de Sean O’Casey, son frère en révolte et en littérature, n’hésite pas à s’interroger sur la légitimité et l’efficacité de la violence (The Hostage [Un otage], 1958) semble devoir sa vocation littéraire plus à un tempérament qui déborde de vitalité, à une personnalité étonnante, au sens primitif du terme, qu’à sa vie mouvementée de terroriste ou à l’expérience douloureuse des geôles. Le don d’écrire lui apparaît comme puisant sa force aux sources de son être et pas ailleurs. « Si vraiment je suis quelque chose, je suis un homme de lettres, écrit-il... Je ne me suis jamais envisagé comme autre chose... » Il ne se prend pas pour autant au sérieux. Sans parler de ses frasques ou de ses extravagances, on peut noter une certaine indifférence à l’égard de ses œuvres, en tout cas au plan matériel. Il n’en finit pas de traduire The Hostage du gaélique en anglais, et il semble se soucier assez peu qu’on change le titre de The Twisting of Another People en The Quare Fellow, ou qu’on modifie même certaines parties de ses dialogues. Il ne paraît pas davantage que Behan se soit essentiellement attaché à faire le procès des institutions, à souligner l’absurdité des systèmes pénaux, à s’opposer aux idéaux guerriers quand ils conduisent à la haine et à la violence, ou à proposer comme Beckett une philosophie ou un art dramatique. The Quare Fellow (le Client du matin, 1955) et The Hostage, ses deux œuvres majeures, deux succès internationaux, proposent moitié inconsciemment, moitié volontairement, plutôt qu’un message, un art de vivre. Sur ce point précis, il a des idées très arrêtées : « Je place la tendresse envers l’être humain avant toute chose, puis la tendresse envers les animaux. J’ai un manque total de respect pour tout ce qui a trait à la société, excepté ce qui fait les routes plus sûres, la bière plus forte, la nourriture meilleur marché, et que les vieillards sont plus au chaud l’hiver et plus heureux l’été. » Ce personnage énorme a en effet un cœur tendre et déborde d’une charité qui se refuse à juger. Sous l’élément « farcesque » de ses pièces entrecoupées de danses et de chants (The Hostage), à travers sa peinture des bas-fonds de Dublin décrits avec un humour qui n’est pas sans rappeler celui de Dickens (Brendan Behan’s Island [Mon Dublin], 1962), sourd une compassion sincère pour l’homme. S’il a de la haine pour l’injustice, la morale puritaine traditionnelle et la politique, objet de division et d’asservissement, « ... pour les gens, même si ces gens sont les instruments de forces politiques antagonistes, il a seulement de l’amour et de la compréhension ».

Il est regrettable que le théâtre ait perdu si tôt un écrivain qui, en dehors d’un talent vigoureux, a apporté à l’Irlande une conception originale de l’art dramatique. Comme l’écrit un critique à propos de The Quare Fellow, Behan « fit marquer un point à ceux qui en Irlande croient que, à moins que le théâtre irlandais n’abandonne son esprit de clocher, il est voué à périr d’un excès de repliement sur lui-même ».

D. S.-F.

 D. Behan, My Brother Brendan (Londres, 1965). / R. Jeffs, Brendan Behan : Man and Showman (Londres, 1966).

béhaviorisme

Conception de la psychologie née aux États-Unis sous l’impulsion de John B. Watson et qui définit le comportement comme le seul objet d’étude possible d’une psychologie scientifique (de l’amér. behavior, « comportement » ; orthogr. angl. behaviour).



Le béhaviorisme de Watson


Objet et méthode

Voulant promouvoir la psychologie au statut de science objective, au même titre que les sciences naturelles, Watson lui assigne le comportement comme objet d’étude, et l’observation comme méthode. Il réagit fortement contre la psychologie de l’introspection, dont l’objet est les états de conscience, invérifiables par nature, déclare Watson. Si, en 1913, Watson s’insurgeait contre la psychologie officielle, sa démarche s’inscrivait néanmoins dans un certain courant de pensée qui avait vu le jour au début du xxe s. tant en Europe qu’en Amérique : ce courant objectiviste était représenté en psychologie expérimentale par Gustav Fechner, Wilhelm Wundt et Hermann Ebbinghaus, ainsi que par Alfred Binet, qui, en 1905, avait proposé son test de mesure de l’intelligence. Mais il était surtout très florissant en psychologie animale, grâce à Edward L. Thorndike. Watson n’a fait que proposer d’étendre à l’homme des méthodes déjà employées en psychologie animale, où l’introspection, tout comme chez les jeunes enfants, ne peut être d’aucun secours, et où l’accord entre expérimentateurs est garant de l’objectivité des résultats. Watson désigne par comportement toute réponse d’un organisme à une stimulation venue du milieu extérieur ou intérieur ; il se propose d’établir des lois constantes reliant le stimulus (S) à la réponse (R), et permettant de prévoir le comportement si l’on connaît le stimulus. Tout comportement, aussi complexe soit-il, peut se décrire par une succession de S-R.

On reconnaît là l’influence des travaux des physiologistes russes Pavlov et Bechterev sur le réflexe conditionné. Chez l’homme adulte, l’environnement par la vie sociale et le langage crée une multitude de stimulations différentes, donc une multitude de réponses possibles.