Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

végétation (suite)

Toujours au cœur de ces questions de dynamisme de la végétation, mais dans un autre ordre d’idées, il faut signaler que les actions humaines ne provoquent pas toujours de telles séries progressives ou régressives, avec des stades et des cortèges floristiques particuliers dont nous avons décrit quelques exemples. La présence de l’homme et de ses diverses activités se manifeste de bien d’autres manières : souvent, le cortège floristique est appauvri, particulièrement à la limite des aires des végétaux. Ainsi, des piétinements trop importants ont eu raison par grandes plaques de la végétation herbacée des forêts de la Région parisienne ; certaines plantes rares ont disparu. La pollution de l’atmosphère a entraîné la disparition de nombreuses Mousses et de Lichens ; la pollution des rivières a fait disparaître de nombreuses hydrophytes, submergées ou non.


Cartographie de la végétation

Le dynamisme de la végétation a paru d’une telle importance et d’un tel intérêt que de nombreux biogéographes en ont fait la base de systèmes de représentation cartographiques de la végétation.

Les végétaux et les ensembles qu’ils forment s’inscrivent dans le paysage au point que l’on a pu écrire (Henri Elhai) que, dans la majorité des cas, un paysage terrestre, c’était d’abord une couverture végétale. Et c’est la raison pour laquelle déjà de très vieilles cartes, comme celle de Cassini (César François Cassini de Thury, 1714-1784), figurent certains traits majeurs des paysages végétaux. De la même manière, la quasi-totalité des cartes topographiques actuelles en tiennent compte. Comme on pouvait s’y attendre, le vert est la teinte privilégiée affectée à la représentation des végétaux. Si, sur certaines cartes topographiques à petite échelle ou sur des cartes simplifiées comme peuvent l’être les cartes routières, un vert unique représente les forêts, sur presque toutes les cartes topographiques à grande échelle du monde, quatre ou cinq nuances de vert ou de figurés dans la même teinte représentent les principales formations végétales.

Mais très rapidement, comme dans d’autres domaines, la nécessité de cartes thématiques apparut ; à côté des cartes géologiques, on se mit à dessiner des cartes de végétations, avant même, dans bien des cas, des cartes de sols et de climats. Cette avance historique explique également le fait que, pour faire comprendre leurs cartes principales, beaucoup de biogéographes aient adjoint des cartons représentant, à des échelles plus petites, les principaux ordres de faits ayant valeur causale ou corrélative (cartons de sols, de climats, d’activités humaines, etc.).

La cartographie biogéographique, si intéressante qu’elle soit, est toujours une aventure complexe, parce que correspondant à des faits plus superposés que hiérarchisés. Nous avons pris soin au début de distinguer clairement flore et végétation. Il faut toutefois dire qu’il n’y a pas de végétation sans l’existence d’une flore et qu’il n’y a pas de flore qui ne s’exprime dans une ou plusieurs formations végétales, si petites et si restreintes soient-elles. Et, en dehors de quelques cartes paupérisantes, mis à part évidemment des cartes analytiques, floristiques, représentant la répartition — ou chorologie — d’une ou plusieurs espèces, toutes les cartes de végétation portent des indications floristiques, et toutes les cartes reposant sur des inventaires floristiques détaillés représentent, à travers les ensembles retenus (les groupements végétaux), des classes plus ou moins fines de végétation.

En effet, pour représenter la végétation dans ses caractères et sa répartition, deux grands types de possibilités existent, selon que l’on met l’accent sur les groupements physionomiques et les formations végétales (ce sont les cartes de végétation proprement dites) ou que l’on prête attention d’abord aux associations végétales, qui reposent avant tout sur les compositions floristiques (ce sont les cartes d’associations végétales ou de groupements végétaux).


Cartes de groupements végétaux

Dans cette optique, l’accent est mis sur la composition floristique de la végétation, c’est-à-dire sur des groupements de végétaux qui vivent ensemble, sans trop se concurrencer, et qui sont adaptés à des conditions de milieu suffisamment semblables. En effet, ces groupements non seulement dépendent des conditions climatiques locales et stationnelles, mais sont également sensibles à divers facteurs d’ordre édaphique tels que l’humidité, le pH, la teneur en calcaire... Tous ces facteurs sont susceptibles de variations sur de courtes distances, et les groupements végétaux correspondants ne peuvent être représentés avec précision et fidélité que sur des cartes à grande ou à très grande échelle (1/20 000e et plus). C’est la raison pour laquelle les cartes réalisées jusqu’ici dans cette optique et essentiellement par la méthode de cartographie phytosociologique de l’école zuricho-montpelliéraine sont peu nombreuses et couvrent des territoires restreints.


Cartes de la végétation

Dans cette seconde optique, on retient d’abord les traits physionomiques et structuraux des formations végétales ; mais d’autres renseignements pourront être ajoutés à la légende, tels que le type de formation, de stratification, la sempervirence ou la caducité ou plus généralement le comportement saisonnier ; si, sur des cartes sommaires, un seul nom d’espèce est retenu pour caractériser la formation (« forêt à Chênes »), sur des cartes plus élaborées, des noms d’espèces secondaires pourront être introduits.

De surcroît, si l’on tient compte du dynamisme de la végétation, il sera possible de porter sur la carte, à côté des territoires où la végétation naturelle peu ou pas touchée par l’homme existe encore, les divers stades de dégradation qui en proviennent et les divers stades de progression qui permettront sans doute d’y revenir. L’ensemble peut être alors considéré comme une seule « série de végétation » et être traité comme tel : une teinte plate de base sera affectée à la représentation de la végétation naturelle optimale ; les autres stades seront représentés par des nuances, en général plus claires, de cette même teinte ou par des figurés appropriés.