Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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U. R. S. S. (Union des républiques socialistes soviétiques) (suite)

Les événements les plus graves se produisent à Berlin à partir de 1953, mais il y a également des grèves et des manifestations en Pologne (à Poznán en 1956) et en Tchécoslovaquie. Le dégel diplomatique se poursuit néanmoins : il se traduit par la signature d’un traité de paix (mai 1955) avec l’Autriche, établissant la neutralité de ce pays et prévoyant l’évacuation des troupes étrangères (soviétiques en particulier). La première guerre d’Indochine* se termine en 1954 par les accords de Genève à l’issue d’une conférence à laquelle ont participé toutes les grandes puissances, y compris la Chine.

En U. R. S. S., la nouvelle politique consiste à réorganiser l’agriculture et l’industrie. Dès septembre 1953, le Comité central examine les problèmes agricoles : Khrouchtchev dresse alors un tableau réaliste de la situation. Un effort plus grand est consenti pour les industries de consommation. Il est décidé de mettre en valeur les « terres vierges » de l’Asie centrale, celles du Kazakhstan en particulier. Des centaines de milliers de jeunes partent comme volontaires pour des campagnes de défrichement. Un certain nombre de dirigeants du parti s’opposent cependant à cette nouvelle politique, en particulier Malenkov, Molotov et Lazar Moisseïev Kaganovitch (né en 1893).

Le cinquième plan quinquennal est achevé en 1955 et l’on met en chantier le sixième plan quinquennal (1956-1960).

Malenkov démissionne de son poste de président du Conseil des ministres et est remplacé en février 1955 par Nikolaï Aleksandrovitch Boulganine (1895-1975), un autre membre du Politburo. Le maréchal Joukov — écarté par Staline dès 1946 — refait son apparition et devient ministre de la Défense à la place de Boulganine.

Les camps de travail forcé se vident peu à peu et l’on commence même à réhabiliter d’anciens condamnés, certains à titre posthume il est vrai. Sur le plan international, une conférence au sommet se tient à Genève en juillet 1955 entre les quatre grandes puissances ; s’il n’y a pas de décision précise de prise, on convient de respecter le principe de la coexistence* pacifique. L’Union soviétique reprend ses relations avec la Yougoslavie, et Khrouchtchev se rend en mai 1955 à Belgrade.

C’est en février 1956 que se réunit le XXe Congrès du parti : il confirme et amplifie l’orientation décidée depuis 1953. Mikoïan critique certains écrits théoriques de Staline, mais, surtout, Khrouchtchev prononce, au cours d’une séance secrète, un rapport devenu célèbre dans lequel il met en accusation Staline et ses « crimes ». Les critiques de Khrouchtchev sont incontestablement fondées, mais les explications qu’il donne apparaissent assez fragiles, d’autant plus que lui-même a été un des plus proches collaborateurs de Staline. Communiqué à tous les membres du parti, le rapport Khrouchtchev fait l’effet d’une bombe. Les esprits en U. R. S. S. ne sont pas préparés à le recevoir : d’où le trouble et la confusion politique qui s’ensuivent, d’autant plus que les résistances à l’intérieur du parti communiste et de sa direction se font plus fortes.

Les événements de Hongrie* sont liés aux conséquences du XXe Congrès. Le refus de la « destalinisation » par les dirigeants communistes hongrois suscite la colère populaire, qui est utilisée par les adversaires du socialisme. L’Union soviétique estime nécessaire d’intervenir militairement pour éviter à la Hongrie de quitter le camp socialiste et, sans doute, pour empêcher la désintégration du monde socialiste. La politique du XXe Congrès subit ainsi un sérieux échec.

L’affaire de Suez*, à la fin de l’année 1956, contribue à aggraver la situation internationale. L’expédition franco-anglaise contre Suez, décidée en représailles de la nationalisation du canal par Nasser*, est un moment très grave de l’après-guerre. Venant après les événements de Hongrie, elle montre que tout n’est pas aussi simple que le XXe Congrès l’a estimé.

Sur le plan économique et politique, cette période est caractérisée par les tâtonnements, les recherches de solutions nouvelles dans tous les domaines. À la direction centralisée, on cherche des solutions de remplacement. C’est ainsi que des conseils économiques régionaux, les sovnarkhozes — organes qui de la fin de 1917 à 1932 avaient contribué à l’industrialisation du pays —, sont réorganisés en 1957, mais le gouvernement ne supprime pas pour autant les directions centralisées des ministères. Il y a bien 2 millions de fonctionnaires révoqués de leurs emplois à Moscou et renvoyés en province, et par conséquent une diminution quantitative de l’appareil bureaucratique, mais les chevauchements de compétence entre les organismes anciens laissés en place et les nouveaux, créés souvent à la hâte, ne permettent pas de supprimer le phénomène bureaucratique et créent même de nouveaux goulets d’étranglement.

Le parti communiste et le Conseil des ministres décident en 1957 de substituer au sixième plan quinquennal un plan septennal (1959-1965). À la fin des années 1950 et au début des années 1960, l’industrie soviétique poursuit son essor, mais dans des proportions moindres qu’auparavant. L’industrie légère continue à connaître des difficultés d’expansion dues, certes, aux besoins prioritaires des industries atomique et spatiale, mais aussi au système de gestion utilisé jusque-là.

Si la production d’automobiles n’augmente guère, par contre l’U. R, S. S. fabrique massivement réfrigérateurs, machines à laver et télévisions. Des efforts particuliers ont été décidés pour l’industrie chimique et la construction et ils commencent à produire des résultats ; mais, par rapport aux objectifs décidés au XXe Congrès, ces résultats sont insuffisants. Le système de contrainte hérité de la période stalinienne a disparu et les salariés ont acquis une certaine liberté dans leur travail, mais l’utilisation des stimulants économiques et matériels reste encore médiocre. Quant aux objectifs du plan septennal, ils ont été conçus d’une façon encore trop utopique.