Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
U

U. R. S. S. (Union des républiques socialistes soviétiques) (suite)

Le NKVD joue un rôle décisif dans la répression. Il peut arrêter qui il veut et quand il le veut. Il a reçu le droit de déporter pour cinq ans, sur simple décision d’une conférence spéciale (l’osso), tout « individu socialement dangereux ». Il domine ainsi le parti et l’État. Staline, cependant, cherche à le contrôler. Il fait arrêter et exécuter Guenrikh Grigorievitch Iagoda (1891-1938), puis son remplaçant (depuis 1936) à la tête du NKVD, Nikolaï Ivanovitch Iejov, à qui succède Lavrenti Pavlovitch Beria (1899-1953).

Cette politique forme un contraste saisissant avec le texte de la nouvelle Constitution votée en 1936, qui établit l’égalité réelle entre les citoyens sur le plan politique en supprimant les dispositions restrictives (envers les paysans, notamment) des Constitutions de 1918 et de 1924. Mais, entre la théorie, les textes constitutionnels et la réalité, il y a une grande différence. Staline s’attaque aussi aux nationalités non russes. L’Union des républiques socialistes soviétiques (U. R. S. S.) a été créée en 1922 sur une base fédérale par le Ier Congrès des soviets, auquel participent la République socialiste fédérative soviétique de Russie (R. S. F. S. R.) et les R. S. S. d’Ukraine, de Transcaucasie, de Biélorussie (Russie blanche). En 1924-25, des républiques fédérées sont créées en Asie centrale. La R. S. S. de Transcaucasie est divisée, en 1936, en trois républiques : Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan. En fait, Staline développe une politique centralisatrice prorusse destinée à unifier toute l’Union soviétique et à contrôler toutes les parties très diverses du pays (des dizaines de langues, d’ethnies, de religions).

Il serait, cependant, tout à fait erroné de réduire le phénomène stalinien à ces seuls aspects terroristes. On assiste, en effet, dans la même période, à une transformation radicale de l’U. R. S. S. sur le plan économique comme sur le plan culturel.

Le deuxième quinquennat (1933-1937), en raison de la mise en activité de nombreux chantiers ouverts pendant le premier quinquennat, voit un progrès rapide de l’industrie lourde et de la production des sources d’énergie. L’industrie des biens de consommation progresse moins vite. Quant au troisième quinquennat (commencé en 1938, mais interrompu par la guerre en 1941), il se caractérise par un ralentissement général de l’essor économique, lié à la mise en place d’une économie de guerre. En 1941, cependant, l’Union soviétique est devenue, derrière les États-Unis et l’Allemagne, la troisième puissance industrielle du monde. Son retard est encore énorme, mais elle l’a en partie comblé.

Sur le plan agricole, les résultats ne sont pas bons, en raison des conditions dans lesquelles la collectivisation a été réalisée : en 1940, la production de céréales est tout juste supérieure à celle de 1913, mais la production de coton s’est multipliée par trois et celle de betterave à sucre par deux.

Quant au cheptel, il retrouve presque les chiffres de 1928. Des stations de machines et de tracteurs (les MTS) ont été créées depuis 1928-29 et constituent des centres d’initiation technique d’une importance considérable pour l’avenir ; l’U. R. S. S. dispose en 1940 d’environ 500 000 tracteurs. La vie reste dure dans les campagnes soviétiques, mais elle s’améliore quelque peu.

Ce qui est sans doute le plus impressionnant, c’est l’ampleur des progrès culturels. En 1940, l’analphabétisme a disparu chez les jeunes et presque totalement chez les moins de cinquante ans. L’enseignement secondaire a connu un essor étonnant ; plus de 10 millions d’enfants suivent une scolarité de sept ans. Depuis 1929, le nombre d’enseignants a triplé et, en 1940, il y a 811 000 étudiants. La diffusion de la culture s’est effectuée par le canal de nombreuses associations soit politiques, les pionniers et l’Union communiste léniniste de la jeunesse soviétique (komsomol : Vsessoïouznyï Leninski Kommounistitcheski Soïouz Molodeji), soit purement culturelles.

L’« émulation socialiste » joue un rôle important dans la formation de la jeunesse. L’exemple du mineur Alekseï Grigorievitch Stakhanov (1905-1975), qui a battu des records de production, est célébré par les autorités soviétiques. Les meilleurs ouvriers sont mis à l’honneur. La formation professionnelle connaît une faveur toute particulière, car l’Union soviétique doit développer son propre corps de techniciens et d’ingénieurs. Écoles spécialisées, cours du soir, Rabfak (Rabotchi fakoultet, Faculté ouvrière), apprentissage sur le tas constituent des facettes différentes d’une politique audacieuse et de longue haleine. La jeunesse s’enthousiasme pour les exploits d’Ivan Dmitrievitch Papanine (né en 1894) dans l’Arctique et de Valeri Pavlovitch Tchkalov (1904-1938), qui réalise la première liaison aérienne U. R. S. S. - États-Unis par le pôle.

Les progrès sont particulièrement sensibles dans les républiques soviétiques d’Asie, où l’arriération culturelle était presque totale à la veille de la révolution. Par exemple, en Ouzbékistan, 78,7 p. 100 des personnes de neuf à quarante-neuf ans savent lire et écrire en 1939 (contre 11,6 p. 100 en 1926).

Cette période est marquée par l’aggravation du danger de guerre. L’U. R. S. S. cherche d’abord à isoler Hitler en s’alliant aux puissances occidentales ; membre de la S. D. N. depuis 1934, elle signe en 1935 avec la Tchécoslovaquie et avec la France des traités d’assistance mutuelle, mais ses efforts se heurtent à l’anticommunisme de la plupart des dirigeants occidentaux. Si les États-Unis restent neutres, la Grande-Bretagne refuse tout accord avec l’U. R. S. S., et la France se contente d’un accord de caractère très général, sans implications militaires. Lors de la guerre civile d’Espagne* (1936-1939), l’U. R. S. S. fournit armes et militaires aux républicains, qui luttent contre les nationalistes soutenus par l’Allemagne nazie et l’Italie fasciste, la France et la Grande-Bretagne s’en tenant au principe de non-intervention.