Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Togo (suite)

De nombreuses opérations de police seront nécessaires aux Allemands pour arriver à la pacification totale, notamment dans le Nord (insurrection de 1897-98 en pays konkomba et kabré). Le développement économique va commencer très vite, notamment sous l’impulsion de Julius von Zech (1868-1914), gouverneur de 1905 à 1910 : peu de plantations, mais prospection du sous-sol, introduction de la culture du cacao, du coton, du teck, construction d’un wharf à Lomé, construction de trois lignes de chemin de fer, exportation d’huile de palme et de palmistes, importation de cotonnades. Toutefois, le Nord n’est pas compris dans ce vaste plan de mise en valeur. L’administration — ferme et rigoureuse, mais, semble-t-il, juste — pourra susciter plus tard des sentiments de nostalgie dans certains éléments de la population, malgré la faible durée de la présence allemande.

Dès le début d’août 1914, le Togo est le siège d’opérations militaires menées par les Alliés et suivies d’une reddition sans conditions le 20 août. Les riches terres à cacao seront occupées par les Anglais pendant toute la durée de la guerre et resteront sous contrôle britannique en 1919 après la convention du 10 juillet qui donne à la France les deux tiers du pays et l’entier front de mer du Togo. En 1922, des mandats de la Société des Nations sont attribués à la France et à la Grande-Bretagne.

Le pays connaît d’abord une administration dépendant directement du ministre des Colonies, puis en 1934 une sorte d’union personnelle avec le Dahomey (gouverneur et chefs de services administratifs communs) et enfin, en 1936, l’intégration officielle dans l’A.-O. F. La France portera durant toute cette période un intérêt particulier au Togo, où la participation des élites montantes sera plus importante qu’ailleurs. Les différentes cultures vont s’intensifier, le réseau routier se développer. Cependant, le Togo, quoique assez tardivement, ressentira notamment sur son commerce les effets de la crise économique mondiale, à peine conjurée à la déclaration de guerre, que suivront quelques années d’un malaise profond.

Le 13 décembre 1946 est mis en place le régime de la tutelle des Nations Unies suivant les chapitres XI, XII et XIII de la charte de San Francisco, prévoyant l’évolution progressive de la population vers la possibilité de s’administrer elle-même. Un conseil de tutelle assure le contrôle de l’administration française, cependant que le Togo fait partie intégrante de l’Union française.

La vie politique est alors marquée par la création de partis — C. U. T. (Comité d’unité togolaise), animé par Sylvanus Olympio (1902-1963), P. T. P. (Parti togolais du progrès) de Nicolas Grunitzky (1913-1969), U. C. P. N. (Union des chefs et des populations du Nord) — et par le problème des populations éwés, coupées en deux par la frontière avec la Gold Coast. Un mouvement animé de la Gold Coast (All Ewe Conference) réclame l’unification du pays éwé sous tutelle britannique. À la suite d’un mémorandum franco-britannique adressé aux Nations Unies, celles-ci créent une commission permanente pour les affaires togolaises qui ne parviendra pas à une solution, les Éwés constituant une minorité dans les deux pays, dont on comprend mal qu’elle puisse bouleverser la vie politique de l’ensemble. Ce sera pour Sylvanus Olympio l’occasion d’un jeu subtil. Mais, en 1951, c’est N. Grunitzky qui triomphe aux élections législatives.

Dès 1955 est institué un conseil de gouvernement, tandis qu’une mission de l’O. N. U. conclut à l’organisation d’un plébiscite : le 9 mai 1956, les territoires du nord du Togo britannique votent massivement le rattachement à la Gold Coast, au contraire des Ewés du Sud, qui repoussent cette solution. La république autonome du Togo est proclamée le 30 août 1956 et Grunitzky devient Premier ministre. Peu à peu, les pouvoirs passent entre les mains des Togolais. Le 27 avril 1958 ont lieu des élections, contrôlées par l’O. N. U., qui voient l’effondrement du P. T. P. À son tour, Sylvanus Olympio devient Premier ministre, et l’indépendance est proclamée le 27 avril 1960.

La position d’Olympio est renforcée par le triomphe des listes de son parti aux élections présidentielles du 9 avril 1961. Il va dès lors, grâce à une constitution de type présidentiel, mener une politique personnelle, jugulant toute forme d’opposition, instaurant un régime d’austérité financière, isolant le pays à l’extérieur par une politique de non-alignement sur les groupes de Brazzaville ou de Casablanca. Le mécontentement gagne le pays, notamment le Nord, dont les populations se sentent brimées par la place qu’occupe le Sud, mais aussi les planteurs de cacao, l’élite chrétienne, la jeunesse urbanisée..., et, malgré le système répressif en place, Olympio est assassiné le 13 janvier 1963, tandis qu’un comité insurrectionnel militaire prend le pouvoir.

Ce comité fait appel à N. Grunitzky et à Antoine Méatchi, originaire du Nord. Le 5 mai 1963 ont lieu des élections générales, tandis que la nouvelle constitution recueille la majorité des suffrages. La politique d’isolement prend fin. Le Togo entre à l’O. C. A. M., puis en 1966 au Conseil de l’Entente. Une tentative de coup d’État échoue en novembre 1966, mais, le 13 janvier 1967, l’armée s’empare du pouvoir, suspend la constitution, dissout l’Assemblée, et le lieutenant-colonel Étienne Ghansimgbe Eyadema (né en 1935) s’impose dès le 14 avril de la même année. Ses compatriotes du Nord sont majoritaires dans le gouvernement qu’il forme. Depuis, le Togo, préoccupé de son développement, connaît une histoire apaisée.

P. B.

➙ Empire colonial français / Éwés / Ghāna.

 M. Manoukian, The Ewe-Speaking People of Togoland and the Gold Coast (Londres, 1952). / R. Cornevin, Histoire du Togo (Berger-Levrault, 1959 ; 3e éd., 1969) ; le Togo, nation-pilote (Nouv. éd. latines, 1963) ; le Togo (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1967 ; 2e éd., 1974). / B. Schnapper, la Politique et le commerce français dans le golfe de Guinée de 1838 à 1871 (Mouton, 1962).