Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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télévision (suite)

 W. T. Cocking, Television receiving Equipment (Londres, 1940, 4e éd., 1957 ; trad. fr. les Récepteurs de télévision, Dunod, 1959-60, 2 vol.). / F. Kerkhof et W. Werner, Fernsehen (Eindhoven, 1951 ; trad. fr. Télévision, Dunod, 1953). / P. Duru, Comprenez la télévision (Dunod, 1961). / Y. Delbord, « Télévision », dans Électronique, t. III (Techniques de l’ingénieur, 1971). / R. Besson, Cours élémentaire de télévision moderne (Éd. Radio, 1975).


L’expansion de la télévision

La télévision est devenue un véritable phénomène social dans tous les pays où elle s’est implantée, c’est-à-dire dans ceux qui ont pu faire les frais de ces installations relativement coûteuses. Le petit écran tient en effet une place importante dans la vie quotidienne de ses utilisateurs. En France, par exemple, on a calculé que le téléspectateur moyen passe 139 minutes par jour devant son appareil récepteur. Aux États-Unis, les statistiques font apparaître des moyennes un peu plus élevées. Quant au nombre des appareils en service, il était, en 1971, de 270 millions dans le monde entier ; de 93 millions (dont 32 millions en couleurs) aux États-Unis, de 28 millions en U. R. S. S., de 25 millions (dont 6 millions en couleurs) au Japon ; de 10 millions en France ; de 8 millions en Italie. Aux États-Unis, deux ans auparavant, on avait largement dépassé l’équipement d’un récepteur par foyer, puisqu’on pouvait en recenser 400 pour 1 000 habitants. Tout porte donc à croire que la limite de saturation sera assez rapidement atteinte dans les pays les plus avancés industriellement. En 1935, la télévision était techniquement une réalité ; en 1939, des programmes réguliers avaient fait leur apparition en Amérique. Mais la Seconde Guerre mondiale arrêta les progrès de la télévision. Après 1945, ils reprirent plus vite dans les pays ayant opté, comme les États-Unis, pour la concurrence commerciale que dans ceux dont le choix s’était porté sur le système du monopole d’État. Du moins ceux-ci pouvaient-ils espérer que, étant considérée comme un service public, la télévision maintiendrait ses programmes à un assez haut niveau culturel. À titre d’exemple, voici le nombre de récepteurs de télévision pour 1 000 habitants en 1972, dans quelques pays où existe le système du monopole d’État : Algérie, 10 ; Belgique, 236 ; France, 237 ; Hongrie, 201 ; Italie, 202 ; dans des pays où règne la télévision commerciale et concurrentielle : Brésil, 67 ; Chili, 50 ; États-Unis, 474 ; et dans d’autres qui ont adopté un système mixte : Canada, 349 ; Grande-Bretagne, 305 ; Japon, 225 ; Pérou, 28.

On a noté que l’expansion de la télévision se produit en général à travers les différentes couches sociales presque simultanément, avec cependant un retard pour les catégories les plus défavorisées économiquement, parce que le prix d’achat du récepteur leur impose un lourd sacrifice, et aussi pour les catégories les plus instruites : les « intellectuels » ont d’autres distractions possibles ; ils reprochent au petit écran de présenter des programmes d’un niveau culturel peu élevé et craignent d’être trop fascinés eux-mêmes par ces spectacles et de perdre ainsi un temps précieux. En France, ce sont encore les populations rurales qui sont, en moyenne, les moins bien équipées dans ce domaine. Quant aux cadres supérieurs, c’est seulement depuis 1968 qu’ils viennent en tête quant au pourcentage de familles possédant un récepteur de télévision, alors qu’auparavant ils étaient précédés par les cadres moyens, ces derniers étant depuis 1970 rejoints par les ouvriers qualifiés. Il semble donc que la télévision se soit répandue en raison d’une fonction sociale qu’elle remplit dans le contexte urbain et qui consiste principalement dans sa capacité d’apporter un élément de distraction, surtout dans des situations où rien d’autre ne vient s’imposer pour occuper les moments de loisir après le travail. À cela s’ajoute aussi la fonction de communication, qui permet à diverses couches sociales de mieux s’intégrer dans la communauté urbaine.


L’organisation et les programmes

Dans les pays où la télévision est un service public géré par l’État, deux conceptions sont possibles : ou bien on considère qu’elle doit servir les desseins de cet État, notamment en matière culturelle et idéologique, de manière à fortifier la socialisation et l’intégration, ou bien on cherche à préserver un certain libéralisme, et, dans ce cas, le problème essentiel consiste à limiter ou à délimiter les ingérences du gouvernement dans l’orientation des émissions, en particulier celles qui se rapportent à l’information. Des dispositions statutaires instituent divers conseils ou comités qui exercent des contrôles en ce sens. Dans les pays où la télévision est confiée à des firmes privées, la libre concurrence donne la primauté aux émissions qui sont rentables pour les annonceurs dont la publicité utilise ces supports. D’autre part, l’État exerce un certain contrôle, soit par l’application de lois générales, soit par l’intermédiaire d’organismes spécifiques. Par exemple, aux États-Unis, la Federal Communications Commission, nommée par le Congrès, a pour mission d’accorder des licences d’exploitation et de contrôler le contenu des programmes au nom de l’intérêt public.

Les émissions de la télévision sont très souvent classées par rapport aux trois fonctions principales, qui sont celles de l’information, de la culture et de la distraction. Une classification plus élaborée établit des distinctions entre les variétés, les dramatiques, les feuilletons et les séries, les informations et les magazines, les reportages, les jeux, les émissions pour la jeunesse. Enfin, on peut tenir compte aussi des techniques employées pour l’enregistrement : cinéma, vidéo fixe ou vidéo mobile. Actuellement, certaines émissions sont enregistrées en noir et blanc, d’autres en couleurs.

La « grille » des programmes est le résultat de la répartition des diverses sortes d’émissions dans le déroulement de chaque journée. Elle tient compte, en général, des catégories de public qui sont plus fréquemment disponibles à telle ou telle heure. Par exemple, la période qui suit le dîner est considérée comme celle de la plus grande audience. Durant les jours de congés scolaires hebdomadaires et pendant les soirées qui les précèdent, les programmes font une assez grande place aux émissions pour les enfants. Par contre, on réserve souvent pour la fin de la soirée celles qui sont destinées aux adultes ou à des publics spécialisés et celles qui sont réputées peu accessibles au grand public. Il importe, de toute façon, de connaître aussi bien que possible les préférences des diverses catégories de téléspectateurs. À cet effet, la plupart des organismes de diffusion effectuent des sondages pour mesurer l’audience en même temps que pour contrôler le succès des diverses émissions. Les méthodes employées sont diverses : appels téléphoniques, questionnaires distribués, visites à domicile. Dans tous les cas, les enquêtes sont faites sur des échantillons représentatifs de la population à étudier. Souvent, cet échantillon est un panel, c’est-à-dire un certain nombre de personnes qui consignent le choix de leurs émissions et leurs appréciations, ou dont les pratiques d’écoute sont enregistrées automatiquement par un appareil adapté au récepteur.