Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Siloé (les) (suite)

L’art espagnol des Rois Catholiques et de l’empereur Charles Quint culmine dans l’unité achevée du territoire et avec le début de l’expansion coloniale. Issu des courants antagonistes de la Reconquista, il échappe déjà aux définitions européennes, comme le « baroque » latino-américain, auquel il va donner naissance. Sans doute un courant italianisant vient-il s’ajouter dans le Levant aux structures françaises ; c’est le fruit non pas de l’humanisme, mais des rapports avec les possessions aragonaises de Sicile et les commerçants génois. Et c’est l’Inquisition qui succède à une tolérance toute orientale en Nouvelle-Castille, quand le gothique flamand ou germanique vient prendre le relais du mudéjar à Tolède. À l’heure où l’art palatial et bourgeois s’impose ailleurs, le mysticisme septentrional et mauresque triomphe ici dans les façades ciselées des églises, de style « Isabelle », puis « plateresque ».

Le rôle de la sculpture est alors déterminant. Pour s’en convaincre, il n’est que d’examiner la chapelle élevée par Juan et Simón de Colonia au chevet de la cathédrale de Burgos* pour le connétable de Castille (1482). Les gisants du tombeau viendront de Gênes tout sculptés, mais l’un des retables, auquel travaille Gil de Siloé (antérieurement aux interventions de Philippe Biguerny et de Diego de Siloé dans cette chapelle), montre l’intégration en cours des mentalités flamande et mauresque. À la chartreuse de Miraflores, reconstruite par les mêmes architectes pour servir de sépulcre à la famille de la reine, Maître Gil élève à partir de 1486 le tombeau d’albâtre de l’infant Alonso, celui de Jean II et d’Isabelle, puis celui du page Juan de Padilla (auj. au Musée provincial de Burgos) ; aidé par Diego de la Cruz, il compose également le retable du maître-autel (1496-1499). Le style reste encore gothique, mais, avec l’incroyable profusion des détails dans une géométrie heurtée, la mystique ibérique triomphe.

Diego de Siloé s’est formé auprès de son père, puis en Italie, à Naples (1517), où il a élevé des retables avec Bartolomé Ordóñez († 1520). De retour à Burgos en 1519, il poursuit le décor sculpté de la cathédrale et construit l’escalier doré (escalera dorada) du croisillon nord, très italianisant avec ses arcades traitées en portiques. Fixé ensuite à Grenade*, il va y fonder une véritable école de sculpture. À la cathédrale, il succède en 1528 à Enrique Egas († 1534), qui, cinq ans plus tôt, a tracé un plan gothique. Il aménage ce plan, établit le sanctuaire en rotonde sous une coupole de 22 m de diamètre, habille les piliers d’un ordre corinthien à piédestal et à entablement. Il aboutit à un système répétitif complexe, d’esprit déjà baroquisant, qui aura grand succès en Amérique latine après avoir été repris aux cathédrales de Jaén et de Plasencia (et par Diego lui-même au couvent des Hiéronymites de Grenade, comme aux cathédrales de Málaga et de Guadix).

En Andalousie, l’absence d’une tradition gothique peut avoir favorisé le succès d’un italianisme qui s’exprime déjà totalement en 1526 avec Pedro Machuca († 1550) à Grenade même, au palais de Charles Quint. Le génie de Siloé semble bien être ailleurs, dans une combinaison des tendances les plus diverses, pour les accorder à la mesure du dynamisme espagnol.

H. P.

 M. Gómez Moreno, Diego Siloe (Grenade, 1963).

Silure

Poisson Téléostéen d’eau douce de l’ordre des Cypriniformes, qu’on peut prendre comme type du sous-ordre des Siluroïdes, caractérisés par les barbillons qui ornent leur museau — d’où leur nom de « Poissons-Chats » — et par leur peau nue ou armée d’écussons osseux.


On distingue deux mille espèces environ, réparties en une quinzaine de familles vivant dans toute la zone intertropicale et tempérée.


Le Glane

Le Silure, ou Glane (Silurus glanis), à distribution euro-asiatique, a une dorsale très courte, une anale longue, une caudale arrondie ; la seconde dorsale adipeuse, fréquente chez les Siluroïdes, fait défaut ; il existe deux longs barbillons supérieurs et quatre courts barbillons intérieurs, porteurs de récepteurs sensoriels tactiles et gustatifs. Le Glane est le plus gros Poisson carnassier d’Europe, et les exemplaires mesurant 2,50 m et pesant plus d’un quintal ne sont pas rares. Le Glane se nourrit de Poissons, de Grenouilles et même d’Oiseaux ou de Rongeurs. Il est encore abondant dans le Danube et les grands fleuves russes, et se rencontre en France dans les eaux du Rhin et du Doubs. Deux espèces voisines, mais de petite taille, se rencontrent l’une en Grèce (S. aristotelis), l’autre en Turquie et en Iraq (S. triostegus). Les petits Poissons-Chats transparents du genre Kryptopterus, d’origine indo-malaise et qui sont élevés par les aquariophiles, appartiennent, eux aussi, à la famille des Siluridés, de même que le Poisson-Chat (Ameiurus nebulosus).


Siluroïdes venimeux

On range dans un premier groupe de cinq familles les Poissons-Chats pourvus d’une nageoire adipeuse et dont la nageoire dorsale et les pectorales sont armés d’un aiguillon en rapport avec une glande venimeuse. Les Ariidés, qui vivent dans les eaux tropicales, sont surtout remarquables par l’incubation buccale que pratiquent les parents, généralement les mâles. Pendant tout le temps du développement larvaire, la cavité bucco-pharyngienne fournit aux œufs protection et oxygénation. Une fois éclos, les jeunes alevins gardent l’habitude de se réfugier dans la gueule paternelle au moindre danger. Les Pimélodidés des fleuves sud-américains et les Bagridés des fleuves asiatiques ont des barbillons sensitifs très allongés. Certains sont très appréciés des aquariophiles ; d’autres sont cavernicoles. Les Ictaluridés sont les Poissons-Chats de l’Amérique du Nord ; le géant de la famille, Pilodictis olivaris, peut atteindre jusqu’à 2 m. Mais le plus connu d’entre eux est Ictalurus melas, qui a été introduit dans nos rivières et peuple maintenant nos eaux calmes et nos canaux. C’est un Poisson très vorace et peu estimé des pêcheurs. Les Mochocidés, ou Grogneurs, ainsi appelés pour les sons qu’ils émettent, habitent les eaux douces tropicales.