Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Salvador (suite)

On peut ainsi mesurer la fragilité économique d’un pays aussi limité par son territoire que par son marché intérieur. Sa tentative « impérialiste » vis-à-vis de son voisin hondurien, dans une zone frontalière mal délimitée, a été bloquée en deux semaines sur les injonctions de l’Organisation des États centre-américains, puis de l’O. E. A. (Organisation des États américains), sans que les États-Unis interviennent dans un conflit où la stabilité politique n’était menacée par aucune idéologie de type socialiste.

Le Salvador est finalement constitué en nation homogène, en raison sans doute d’un noyau de peuplement cohérent et dense concentré autour d’une capitale (San Salvador, 350 000 hab. en 1971) dont le rôle économique était effectif dès l’époque coloniale. Si ce pays n’est pas menacé dans son existence comme nation, le blocage de sa croissance économique peut, cependant, aiguiser les risques de crise sociale interne.

C. B.

➙ Amérique latine / Guatemala / Honduras.

 M. Niedergang, les 20 Amériques latines, t. III (Éd. du Seuil, 1962 ; nouv. éd., 1969). / M. Rodriguez, Central America (Englewood Cliffs, N. J., 1965). / R. C. West et J. P. Angelli, Middle America. Its Lands and Peoples (Englewood Cliffs, N. J., 1966). / D. Browning, El Salvador, Landscape and Society (Oxford, 1971). / M. V. Carias et D. Slutzky, La guerra inutil (Mexico, 1971).

Salvador

V. du Brésil, capit. de l’État de Bahia ; 1 027 000 hab.


Salvador (anc. São Salvador), capitale du Brésil colonial, est restée un foyer culturel important, notamment pour la fraction noire de la population brésilienne ; elle exerce également un rôle commercial non négligeable, hérité de sa fonction coloniale d’exportation des denrées agricoles et d’importation des produits fabriqués. Depuis quelques années, elle est aussi un pôle industriel en expansion, grâce aux efforts des services d’aménagement qui tentent de résoudre les problèmes du sous-développement du Nordeste* brésilien.

Fondée par Tomé de Sousa en 1549, elle est la plus ancienne cité du Brésil ; elle fut la capitale de la colonie jusqu’au xviiie s., époque à laquelle elle fut remplacée par Rio de Janeiro. Elle dut sa croissance non seulement à sa fonction de capitale, mais également à son rôle de port d’exportation de la canne à sucre, cultivée dans le Recôncavo, c’est-à-dire dans la plaine côtière entourant la baie de Todos os Santos (baie de Tous-les-Saints), au bord de laquelle se trouve Salvador. Elle fut aussi un grand lieu du commerce d’esclaves. De ce fait, au début du xxe s., sa population dépassait déjà 200 000 habitants. Vint ensuite une phase de relative stagnation : certes, la population continuait à s’accroître par suite des migrations, mais les fonctions ne connaissaient aucun développement spectaculaire. Aussi Salvador fut-elle choisie comme second pôle d’implantation industrielle volontaire dans le plan d’aménagement élaboré par la SUDENE (Superintendance pour le développement du Nordeste). À vrai dire, quelques années avant l’action de la SUDENE cette fonction industrielle avait déjà été amorcée par la découverte, à proximité de Salvador, de gisements de pétrole ; ceux-ci ont entraîné non seulement l’installation d’une industrie extractive, mais aussi la construction de la raffinerie de Mataripe, au fond de la baie, à une vingtaine de kilomètres de la ville. Auparavant, Salvador abritait quelques usines textiles et alimentaires traditionnellement liées au marché urbain. L’installation de la raffinerie a permis l’essor d’un certain nombre d’industries chimiques dérivées, productions d’asphalte, de gaz, d’huile, de kérosène et autres produits chimiques. Les incitations fiscales, les subventions, les facilités de crédit organisées par la SUDENE ont, d’autre part, développé un centre industriel dans une banlieue de Salvador, la zone d’Aratu, située à 16 km de la capitale et bien desservie par une série de routes. Là se sont installées des industries dynamiques (mécanique, sidérurgie, ciment, réparation de navires). On compte actuellement plus de quatre-vingts entreprises dans cette banlieue industrielle.

Cette nouvelle fonction s’ajoute aux activités traditionnelles, qui animent toujours le centre des affaires de Salvador. Le port a un trafic global de 5 Mt. Cette importance résulte d’abord de l’exportation des denrées agricoles produites à l’intérieur de l’État de Bahia (canne à sucre, cacao et divers autres produits), puis du trafic nouveau créé par l’industrialisation de la ville, et notamment par la production de pétrole et de ses dérivés. Aussi Salvador est-il un centre de maisons de commerce et d’entrepôts. C’est aussi un centre bancaire qui abrite la plupart des succursales des banques brésiliennes et étrangères. Mais sa fonction la plus importante repose sur son rôle intellectuel et culturel, lié à la tradition de l’ancienne capitale coloniale. Son université possède un certain nombre de centres de recherche, notamment dans le domaine de la civilisation afro-brésilienne, Salvador étant la ville brésilienne qui détient la plus forte proportion de population noire. S’ajoute à toutes ces activités une fonction administrative consécutive au rôle de capitale de l’État de Bahia, dont la superficie est sensiblement égale à celle de la France. Salvador, située au contact du Sud-Est en croissance et du Nord-Est sous-développé, est la cinquième ville du Brésil. Mais la population représente un surpeuplement très net par rapport au nombre d’emplois offerts par les activités urbaines ; et l’accroissement accéléré qui se manifeste depuis une vingtaine d’années est essentiellement dû au dépeuplement de l’intérieur de l’État de Bahia : en effet, la misère des campagnes chasse de plus en plus la population vers la grande ville, où, faute d’emplois en nombre suffisant, les migrants s’accumulent dans des zones de bidonvilles.